De la jaunisse

Jaunisse GJ.jpgPourquoi une chancelière allemande peut-elle accomplir quatre mandats, alors que les présidents français peinent, depuis longtemps, à en terminer un seul ?

Pourquoi la France est-elle sujette, plus que tout autre pays comparable, à ces éruptions insurrectionnelles à répétition ?

Pourquoi suivons-nous la règle des 3L (lécher, lâcher, lyncher) chère à la meute de l’émeute ?

Pourquoi est-ce en France qu’un médiocre pamphlet d’une plume obsolète intitulé « Indignez-Vous » ait pu rencontrer un tel succès de librairie ?

Pourquoi les gouvernements français calquent leur politique sur les suicidaires caprices contradictoires d’une foule chauffée à jaune ?

CAR qui oublie son passé est condamné à le revivre ; et le 14 juillet la France oublie la vérité du sien.

Puisque année après année scolaire, génération après génération, Histoire tendancieuse inculquée dès l’école, feux d’artifice pour les crédules et parade militaire pour les nuls y imprègnent les esprits du mensonger mythe fondateur de la glorieuse « Révolution ».

Le terrain y est donc constamment labouré pour rester propice aux idéologues vociférant des logorrhées « printanières », exhortant le bon peuple au Grand Soir, à la jaunisse généralisée.

Pourtant il suffirait d’un regard lucide sur le 14 Juillet 1789 pour rafraîchir la mémoire.

Pour s’en rappeler les calamiteuses conséquences : un siècle ou presque de sang, de chaos, de larmes et de sueur que des pays comparables, moins promptes à se décapiter mutuellement dans la joie, ne connurent point.

Dont le mythe à l’intérieur du mythe : le 14 juillet nous nous félicitons d’avoir supplicié roi et reine pour tomber aussitôt sous le joug d’un empereur…Dont nous adorons la statue équestre à Paris… Oubliant qu’il a fini par infliger une cuisante défaite à la France, mort et désolation à toute l’Europe ; qu’il ne lui manquait qu’une petite moustache…

Ces faits indéniables, parmi tant d’autres, sont occultés par le discours ambiant, certes à l’école mais avec des fréquentes piqures de rappel à l’oubli ; dont les réjouissances d’office du 14 juillet.

Accréditant l’utopie sanguinaire de la Révolution comme vecteur de progrès.

Accréditant le pieux mensonge selon lequel l’avènement d’une démocratie républicaine en France est dû au « printemps » de 1789.

Alors que sa réelle genèse remonte, certes à la fronde et au discrédit du gouvernement de Napoléon III, aggravés par la guerre contre la Prusse et la perte de l’Alsace et de la Lorraine.

Mais SURTOUT au bouleversement social majeur que fut l’émergence d’une classe ouvrière et d’une classe moyenne, revendiquant le pouvoir, issues d’une révolution VRAIE : l’industrielle du 19ème siècle.

En cause donc l’idolâtrie révolutionnaire incrustée dans l’ADN de la France. Mais pas que.

Ayant tué père et mère prématurément, la France orpheline conjure son traumatisme enfantin. On perpétue une révolte adolescente comme s’ils étaient encore là ; on défile toujours pour prendre une chimérique Bastille ; en tête de cortège l’effigie de Sainte Colère dite « populaire », pourtant mauvaise conseillère ; suivie par les dignes descendants des casseurs de l’an un.

Car sinon, pourquoi sommes-nous aussi puériles, à tout attendre de Papa Président et Maman République, à taper du pied et casser nos jouets dès que l’impossible ne nous est pas servi illico sur un plateau d’argent ?

Atteints de cette jaunisse brunâtre porteuse de mortifères illusions, les moins lotis d’entre nous régressent périodiquement en idiots utiles, pratiquant naïvement la revendication incantatoire auprès de Papa-Maman qui n’existent plus.

Or le dieu marché n’a pas d’oreilles et il abhorre les cracheurs dans la soupe.

Mon cœur saigne pour les gilets jaunes qui dansent la carmagnole avec tant d’entrain, la foi du charbonnier chevillée au corps. Innocente chair à canon d’une bataille perdue d’avance, ils conduisent  notre boîte de Pandore droit dans le mur en klaxonnant.

Et nous tous avec. KS♦

CordeKalman Schnur, mabatim.info

Décembre 2018

9 commentaires

  1. Plutot d’accord avec vous quant a la mentalite frondeuse des francais depuis1789 et meme avant ( oublions pas les jacqueries paysannes ) mais aussi pas toujours (1940 et l’attachement a Petain ).
    Mentalite glorifiee des l’ecole.

    Et pourtant. Il faut etre disciple de Maurass pour regretter la monarchie des Capet , sa lourdeur , son arrieration , son manque d’ambition , son incompetence a se reformer et a regler les problemes , sa nullite.
    Vous pleurez sur les multiples sursauts qui ont suivi et dure pres d’un siecle.
    Mais toutes les societes qui ont vecu ou vivront un pareil bouleversement ( russie chine iran …)doivent passer par un cycle long et combien eprouvant pour enfin s’installer ds la democ.
    Qui a part les francais a reussi le parcours ?

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    • Maurass ? Pourquoi pas Buster Keaton, puisque vous sortez du sujet ? Gardez-le donc.
      Où avez-vous trouvé, Dave, que je « regrette la monarchie » ? Cela n’existe nulle part dans mon texte. Je trace l’instabilité endémique de la France, dont nous sommes en train de vivre un épisode dangereux (si, si…) et peu glorieux, au traumatisme de 1789 et les décennies suivantes et au déni de sa vérité historique par ce pays.
      « Qui à part les français a réussi le parcours ? » Mais, TOUS. Au moins les pays comparables en Europe ; dont, comment les oublier, la dizaine de monarchies constitutionnelles, Grande Bretagne en tête, qui n’ont pas de leçons de démocratie à prendre ici.
      Le pays n’ayant pas « réussi le parcours » est la France ; puisque, au risque de me repeter, l’avènement d’une démocratie républicaine ici n’est pas la conséquence de la révolution de 1789 mais de l’industrielle du 19eme siècle.
      Vos trois exemples sont très parlants. « russie chine iran »… C’est ça, les exemples à suivre ? C’est vers ça que devrait aller la France ? Pourquoi pas la Suède ou le Danemark ?
      La Russie est d’ailleurs fort intéressante ; ayant fait en 1917 une révolution (menée par des gens très inspirés de la révolution française), ayant reconnu, au frais d’immenses souffrances, la tragique erreur at la cataclysmique faute et fait son aggiornamento.
      PAS LA France qui persiste dans le déni !

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  2. C’est bien écrit, rapide et donc plaisant, mais cela donne l’impression que l’auteur est tombé dans le travers qu’il reproche aux gilets jaunes : la simplification…

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    • Certes, chère Liliane.
      MAIS ceci explique cela : il s’agit d’un article de presse et non d’un traité exhaustif.
      J’aurais certes pu m’attarder longuement sur la Révolution de 1789, sur Bonaparte, sur l’impact de ces évènements sur la psychologie collective française, analyser et démontrer ma thèse. Cela ne m’aurait pris que 10 ans…
      MAIS ne nous trompons pas de média ; pas d’illusions : les gens zappent vite…

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    • Non, ours combatif, elle ne se réduit pas à ça. Fouquier-Tinville n’était que l’un des personnages de la « Terreur » ; un petit Eichmann avant l’heure.
      Mais pires sont les résultats indirects : les contrechocs de la mythique ‘Révolution’ pendant le siècle suivant.
      Les huit décennies (dont les calamités napoléoniennes) d’instabilité chronique parsemée d’affrontements meurtriers.
      Avec alternance chaotique entre pseudo-républiques et monarchies d’opérette qui aurait été risible si n’était le destin tragique infligé à plusieurs générations.
      Alors que simultanément, la Grande Bretagne, à l’abri de la stabilité d’une monarchie constitutionnelle ayant la tête sur les épaules (c’est le cas de le dire…), construisait l’empire que l’on sait.
      Merci la Révolution. A bien y regarder le 14 juillet aurait dû être plutôt un jour de deuil national ; au mieux : jour ordinaire comme le 13 et comme le 15.
      La méconnaissance (que dis-je, le déni) du passé est un champ de mines ; lorsqu’on refuse de savoir d’où on vient on ignore où on va ; c’est exactement ce qui arrive à ce pays.

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      • Je ne cautionne pas les dérives de la Révolution française, mais les horreurs de la terreur n’invalident pas les acquis de l’égalité en droits.
        Chaque pays suit sa propre trajectoire, subit ses soubresauts particuliers et idéalise ses champions selon les réussites ou fiascos du moment. Les Anglais avaient fait leur révolution politique bien avant la nôtre, qui leur avait donné une vraie monarchie constitutionnelle. Les Anglais considèrent leur parlement comme garant de leurs libertés traditionnelles. Charles 1er voulant s’engager sur les voies de l’absolutisme, il fut décapité légalement.
        Le régime politique français actuel est totalement dévoyé, mais la Révolution n’en est pas la cause.
        Cela dit, je suis absolument d’accord avec votre dernière phrase.

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    • Vous affirmez que les « dérives de la révolution….n’invalident pas les acquis de l’égalité en droits. »
      Or je conteste ces acquis ; donc le lien de cause à effet qui fonde votre raisonnement vu, probablement, que vous êtes, rien de honteux à ça, comme l’immense majorité des Français, assez largement le produit de l’école « républicaine » et du 14 juillet, parade et feux d’artifice. Si, si…
      Voir « …le pieux mensonge selon lequel l’avènement d’une démocratie républicaine en France est dû au ‘’printemps’’ de 1789 » et la suite.
      Moi qui suis Français d’adoption tardive (francophone idem et 100% autodidacte), n’ayant jamais été exposé au « pieux mensonge » avant l’âge de 36 ans, je n’ai aucun mérite s’il me saute aux yeux.
      Par ailleurs vous dites : « Le régime politique français actuel est totalement dévoyé… ».
      Ayant bien trainé mes guêtres ailleurs, vu et appris une ou deux choses, et la perfection n’étant pas de ce monde, je rappelle que la démocratie est un système exécrable mais on n’en connait pas encore de meilleurs. « Le régime politique français actuel » n’échappe pas à la règle.
      Comme « mieux est l’ennemi de bien » ET « qui veut faire l’ange fait la bête » ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain. Trêve d’adages.
      Soyons positifs et brefs. La sur-présidentialisation du régime est certes d’origine gaullienne ; mais aggravé à l’adoption du quinquennat présidentiel et la simultanéité des élections présidentielle et législative, accordant une majorité automatique au président en place. Paradoxalement il est depuis privé des repères que les Américains appellent « checks and balances », ce qui explique pas mal de problèmes actuels. J’abrège.
      Justement, ils ont une solution, les Américains. Facile à appliquer en France. Mid-terms. Elections législatives à mi-mandat de celles du président. Ceci assure une majorité indépendante, la séparation des pouvoirs et un contrepoids puissant à un président qui, sinon, aurait tendance à couper le cordon ombilical avec le « terrain » et se laisser flotter sur son nuage.
      Ne coûte rien et peut rapporter gros. Nonobstant d’autres améliorations éventuelles d’ailleurs.

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