
Je vous remets une petite couche d’apartheid, Israël ?
Libération a trouvé un nouveau juif consensuel coté en cour, pour justifier son tropisme antisioniste. Samy Cohen, politologue, directeur de recherche à Sciences-Po, apporte son clou à la construction du palais de la délégitimation de l’État juif et l’enfonce avec le marteau de son patronyme israélite.
Pour lui, les Juifs sont coupables du péché mortel d’apartheid, mais ils le pratiquent à l’insu de leur plein gré : sous le titre « Israël-apartheid : la grande confusion », il explique qu’une
« politique ségrégationniste existe en Cisjordanie mais l’intention et l’idéologie ne sont pas comparables à celles de l’Afrique du Sud (Libération) »
Qu’Antisonix ne se désespère pas : l’apartheid existe, Samy Cohen l’a rencontré et son état des lieux n’est là que pour offrir un choix au chaland, entre le tout apartheid, le demi-apartheid et, noyée entre les deux, une pincée homéopathique de déni d’apartheid (le mythe). Un enseignant, ça enseigne. Un qui œuvre à Science-Po, ça politise. Celui-ci révèle donc la pensée libérationnellement juste et sort les dubitatifs de la confusion : l’apartheid est arrivé dans l’État juif porté par un zéphyr, « au départ sans projet préconçu ».
Tout ça, c’est la faute à la victoire de la guerre des Six-jours :
« Sans la guerre des Six jours, pas d’occupation, pas de domination ».
L’étourdi a oublié un « détail » : sans la guerre des Six jours, il n’y avait plus d’Israël !
Feuilles de route, florilège
25 mai 1967, Radio Le Caire, le France Inter local de l’époque, avait donné le La :
« Le peuple arabe est décidé à rayer Israël de la carte… et à donner aux Juifs la leçon de la mort et de l’extermination. »
28 mai 1967, sur la radio palestinienne du Caire, Ahmed Choukeiry, président de l’organisation de libération de la Palestine :
« L’heure H arrive. La Nation arabe l’attend depuis 19 ans et ne reculera pas jusqu’à l’effacement d’Israël de la carte mondiale. »
Le même jour, conférence de presse du Président Nasser, en direct sur Radio Le Caire :
« Nous n’accepterons aucune possibilité de coexistence avec Israël. Il est impossible que nous arrivions à un accord quelconque au sujet de son existence. »
30 mai 1967, sur Radio Saout El Arab, au Caire, Nasser :
« Israël se trouve, après la fermeture du détroit de Tiran, devant l’alternative dont les deux issues signifient pour lui un bain de sang : ou bien périr asphyxié par le blocus des armées arabes, ou bien être exterminé. »
2 juin 1967, Radio Damas :
« Cette bataille doit être une guerre de libération. Elle sera totale et ne s’achèvera qu’après l’anéantissement sioniste ».
4 juin 1967, le Président Boumedienne :
« La liberté de la patrie arabe passe par la liquidation de l’État juif.1 »
Pendant ce florilège, 4 divisions d’infanterie, 2 divisions blindées, 1 division motorisée, 900 chars, 800 pièces d’artillerie et 100 000 hommes franchissaient le canal de Suez et se massaient le long de la frontière israélienne. Nasser demandait au secrétaire général de l’ONU de retirer les casques bleus qui servaient de tampon entre Moïse et Pharaon et le dépositaire de la paix mondiale obtempérait aussitôt, pour ne pas gêner l’offensive.
La guerre : le détail qui tue
Ils sont fatigants, ces sionistes, avec leur obsession de la survie de l’État juif ! La vraie question n’est pas si Israël courait le risque dont il était menacé, l’important, c’est que du fait qu’il n’a pas été annihilé et, bien que quelques dirigeants aient même envisagé de faire la paix, c’est l’apartheid qui est sorti du chapeau :
« Israël […] entendait même rétrocéder les territoires en échange de la paix. Mais l’appétit est venu en mangeant. Les Israéliens ont profité de l’aubaine. »
— Élève Toutlemonde, que comprenez-vous à cette phrase en italiques ?
— Que le peu d’envie des Israéliens d’échanger la terre contre la paix a fait long feu, ils ont changé d’avis et se sont engouffrés dans l’apartheid avec gourmandise.
— 10/10 en ce qui concerne votre compréhension du message passé par le Cohen libéré. Zéro pointé à celui-ci, qui « oublie » qu’Israël n’a pas changé d’avis, ses adversaires non plus. Les trois NON de Khartoum ont répondu à la demande officielle israélienne, via l’ONU, d’échanger la terre contre la paix :
« pas de paix avec Israël, pas de reconnaissance d’Israël et pas de négociation avec Israël (Jeune Afrique). »
Une résolution signée par l’Égypte, la Syrie, la Jordanie, le Liban, l’Irak, le Maroc, l’Algérie, le Koweït, et le Soudan. Et pas les Palestiniens ? Non. Les Jordaniens de Jordanie et les Égyptiens de Gaza ne savaient pas encore qu’ils avaient envie de former un peuple.
Libération nie l’histoire : seul compte l’apartheid fantasmé
« En Cisjordanie, un système parfaitement ségrégationniste y a été mis en place, avec des systèmes juridiques et administratifs séparés pour les colons et les Palestiniens. »
En 1967, la Cisjordanie n’existait pas. Il n’y avait que la Jordanie, premier État arabe palestinien créé sur le territoire que la SDN avait confié à la Grande-Bretagne pour y installer un Foyer national juif. En 1922, la perfide Albion en avait soustrait 77 % soit 92 300 km². Churchill, qui était alors secrétaire aux Colonies du gouvernement britannique, avait écrit sobrement :
« D’un trait de plume j’ai créé la Transjordanie (Les Livres Blancs) ».
Lors de la guerre que les États arabes avaient menée contre Israël, le jour même de sa déclaration d’Indépendance (15 mai 1948), la Transjordanie, qui deviendrait la Jordanie l’année suivante, avait annexé la rive ouest du Jourdain, ainsi que la partie Est de Jérusalem. En 1967, tout cela faisait donc partie intégrante du Royaume hachémite : quand ce n’est pas Israël qui gagne, les règles de la guerre s’appliquent et c’est le vainqueur qui dicte ses conditions.
De ce fait, c’est avec la Jordanie qu’Israël devait négocier. Les systèmes juridiques et administratifs étaient différents pour les citoyens israéliens (dépendant de la Loi israélienne), qui s’installaient sur cette portion de ce qui aurait dû être leur pays depuis 1948, et pour les Jordaniens, qui relevaient du droit jordanien. Logique élémentaire, mon cher Watson.
En 1967, Israël avait aussi conquis une grande partie du Sinaï égyptien. Les villages israéliens qui se sont créés dans ce désert étaient donc administrés par Israël. Lorsqu’il a signé la paix avec l’Égypte en 1979, il les a démantelés et a rapatrié leurs habitants au sein des frontières définies par le traité de Paix. Logique tout aussi élémentaire, mon cher Cohen.
L’irruption du peuple qui n’existait pas la veille complique les choses
Si, en 1948, l’État arabe de Palestine n’est pas né en même temps que son jumeau Israël, c’est parce que les Arabes ont refusé la Résolution 181 de l’ONU. Quels Arabes ? La Ligue Arabe, puis-qu’il-n’e-xis-tait-pas-de-peuple-pa-les-ti-nien. Ça y est ? C’est compris ? Ahmed Choukeiry, premier président de l’OLP, parlait, en 1967, au nom de la Nation arabe, pour la même raison. C’est seulement lors du sommet de la Ligue arabe de 1964 au Caire, qu’il avait reçu mandat d’initier des contacts visant à établir (Établir, pas RÉtablir) une entité palestinienne.
À part ça, de quel apartheid Israël est-il le NON ?
« La Convention de 1973 s’applique de toute évidence à la situation en Cisjordanie »,
car
« un système parfaitement ségrégationniste y a été mis en place ».
Depuis quand l’évidence d’un militant est-elle une preuve ?
Les Palestiniens ne peuvent être ségrégués ou subir le moindre apartheid de la part d’Israël, pour la simple raison que leur droits civiques ne dépendent pas de l’État juif, mais de l’Autorité palestinienne en Cisjordanie et du Hamas à Gaza, selon les dispositions des Accords d’Oslo signés en 1993 par les deux parties (oui, deux, pas trois car c’était avant le coup d’État du Hamas contre l’autorité palestinienne en 2007).
Eh oui, depuis 1995, 90 % de la population palestinienne est administrée par les leaders qu’elle s’est choisie. Les droits politiques des Cisjordaniens ont été exercés pour élire Mahmoud Abbas en 2005, pour un mandat de 4 ans (toujours en cours), et ceux des Gazaouis ont été kidnappés par le Hamas, dans un coup d’État contre l’Autorité palestinienne, en 2007. Il n’est pas prévu qu’ils les récupèrent avant la venue du Mahdi.
Mais Israël n’est pas responsable de ce que font les dirigeants palestiniens et le journagandiste serait le premier à enrager s’ils osaient y prétendre !
La principale disposition que les Accords imposent à la partie palestinienne est la fin de la violence. Nul ne prête la moindre attention à ses infractions : on ne peut la regarder qu’avec les yeux de Chimène, si l’on veut conserver une vie sociale. En revanche, les médias mainstream et les réseaux sociaux regorgent d’enquêteurs bénévoles (comme le Cohen délibérément obtus), prêts à passer 23 heures par jour à polir des reproches à l’encontre d’Israël.
Détournement de fond et de forme
« Pour résumer : la réalité en Cisjordanie aujourd’hui est celle d’un régime ségrégationniste, mais l’intention et l’idéologie ne sont pas comparables à celles de l’Afrique du Sud »,
conclut l’Inquisiteur, qui n’a que des preuves à décharge :
« les inégalités entre citoyens juifs et arabes (n’ont pas disparu), mais les droits de ces derniers ont connu un développement spectaculaire. Au point qu’ils se disent en majorité ‘’fiers’’ d’être Israéliens et préfèrent vivre sous souveraineté israélienne plutôt que palestinienne (sondage Israël Hayom, novembre 2017). Cela ne fait pas pour autant d’Israël une démocratie exemplaire. »
Combien de citoyens français se disent aujourd’hui fiers de l’être ? La question ne leur est pas posée. Vaut mieux pas. Quant aux démocraties exemplaires, elles étaient 23 en 2020, totalisant 8,4 % de la population mondiale (Major Prépa). La France et Israël, sont classées dans les démocraties imparfaites (la France 24ᵉ et Israël 27ᵉ sur 167). Elles sont au nombre de 52, où vivent 41 % des habitants de notre planète. Donc les autres 50,6 % vivent dans 92 régimes hybrides ou autoritaires.
Se lever une heure plus tôt pour critiquer Israël plus que 24 h/jour
C’est le sacrifice qu’a certainement consenti le porte-parole délibéré de l’anti-israélisme et cela lui a permis d’accoucher de :
« Les Arabes d’Israël ont (presque) tous les droits en tant qu’individus, aucun en tant que collectif. La loi de l’État-nation de (sic) peuple juif, de juillet 2018, leur rappelle que ce pays ne leur appartient pas. »
Il a subrepticement quitté les Palestines qui vivent séparées d’Israël, pas encore assez à leur goût, mais trop au sien à lui, pour arriver dans l’État juif intra-muros, où il reproche à Israël d’être chez lui.
L’État juif est l’État-nation du peuple juif, c’est un scandale ! L’État français est l’État nation du peuple wisigoth et l’État finlandais celui du peuple peul, aussi serait-il normal qu’Israël se conformât à cette règle.
C’est fatigant et c’est politiquement incorrect, mais rappelons quelques faits : en 1948, à l’indépendance d’Israël, 156 000 Arabes (sur les 750 000 qui habitaient la Palestine mandataire) sont restés dans le pays. Ils ont aussitôt eu les mêmes droits civiques que les Juifs. Ils votent donc depuis cette date, y compris les femmes. Cela fait d’elles les premières femmes arabes du Moyen-Orient à avoir obtenu ce droit. Le premier parlement israélien, en 1948, comptait trois députés arabes. En 2020, les Arabes israéliens étaient 1,96 million, soit 21 % de la population. Ils ont toujours les mêmes droits, ils votent toujours et ils ont 16 députés à la Knesset, le parlement israélien. Depuis cette année (2021) ils ont même un parti (Ra’am) au gouvernement.
Le 30 septembre 2021, le premier ministre cisjordanien, Muhammad Shtayyeh, a déclaré lors d’une conférence de presse :
« Le conflit sur la Palestine s’achèvera par des coups consécutifs, et non pas par un seul coup fatal (Memri) ».
Le Cohen qui brade le Droit pour la gauche a porté un de ces coups répétitifs. LM♦

Liliane Messika, MABATIM.INFO
1 Citations sur Cairn.info, audio sur BBC