
[22 juillet 2023]
Résolution anti-blasphème
Le 12 juillet 2023, le Conseil des droits de l’homme de l’ONU a adopté une Résolution anti-blasphème initiée par le Pakistan. Ce pays est classé en régime hybride, autrement dit dictature soft, 107ᵉ sur les 167 pays étudiés par l’indice de démocratie. Ces 167 sont tous États-membres de l’ONU, qui en compte au total 193 (Wikipédia).
La Résolution avait ostensiblement pour but de « lutter contre la haine religieuse en tant qu’incitation à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence (la Croix) ». L’initiative en avait été prise suite à un événement survenu deux semaines auparavant : Salwan Momika, un Irakien de 37 ans qui avait obtenu l’asile en Suède, avait brûlé un Coran dans lequel il avait inséré des tranches de bacon, devant une mosquée de Stockholm.
Le texte de la Résolution a été voté : 28 voix pour, 12 voix contre, issues de démocraties qui y ont vu une atteinte à la liberté d’expression.
La preuve qu’ils avaient bien raison, c’est que la Chine a voté pour, car « le phénomène de l’intolérance religieuse et de la discrimination raciale est en augmentation. L’islamophobie augmente…(il faut donc) soutenir la juste position des pays musulmans(ONU) ».
Cette déclaration surréaliste ne provient pas d’une légende de dessin humoristique signé Chereau, mais du compte-rendu des discussions préalables au vote, sur le site de l’ONU. La situation des Ouïghours, musulmans persécutés pour leur foi, emprisonnés dans des camps de concentration et exécutés par la République populaire de Chine, aurait pu avoir sa place sur une page de Charlie Hebdo, mais Chereau dessine pour des médias qui s’arrêtent où commence la vulgarité…
Et pourtant, malgré son islamophobie agressive, l’Empire du milieu n’est jamais victime d’une Résolution dudit Conseil des Droits de l’Homme. Cela n’a rien d’illogique : ses membres comprennent plus de dictatures que de démocraties. Ces pays habitués à incarcérer journalistes et opposants sont donc bien placés pour protéger leurs semblables. C’est pourquoi toutes les Résolutions votées par ce Conseil touchent des États dont le principal méfait est de n’avoir pas assez de copains coquins.
Casting
En 2023, le Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU comprend 45 pays : 17 démocraties parfaites ou imparfaites et 28 dictatures hybrides ou dures.
Par ordre alphabétique (en V.O. anglaise), l’Algérie (régime autoritaire, classée 113ᵉ sur 167), l’Argentine (démocratie imparfaite classée 50ᵉ) le Bangladesh (régime hybride, alias dictature soft, 73ᵉ) ; la Belgique (démocratie imparfaite, 36ᵉ), le Bénin (hybride, 104ᵉ) ; la Bolivie (hybride, 100ᵉ), le Cameroun (régime autoritaire, c’est-à-dire dictature dure, 141ᵉ), le Chili (démocratie, 19ᵉ), la Chine (autoritaire, 156ᵉ), le Costa Rica (démocratie, 17ᵉ), la Côte d’Ivoire (hybride, 106ᵉ), Cuba (autoritaire, 139ᵉ), la Tchéquie (démocratie imparfaite, 25ᵉ), l’Érythrée (autoritaire, 152ᵉ), la Finlande (démocratie, 5ᵉ), la France (démocratie, 23ᵉ), le Gabon (autoritaire, 118ᵉ), la Gambie (hybride, 102ᵉ), la Géorgie (hybride, 90ᵉ), l’Allemagne (démocratie, 14ᵉ), le Honduras (hybride, 91ᵉ), l’Inde (démocratie imparfaite, 46ᵉ), le Kazakhstan (autoritaire 127ᵉ), le Kirghizistan (autoritaire 116ᵉ), la Lituanie (démocratie imparfaite, 39ᵉ), le Luxembourg (démocratie, 13ᵉ), le Malawi (hybride, 76ᵉ), la Malaisie (démocratie imparfaite, 40ᵉ), la République islamique des Maldives (régime hybride non classé), le Mexique (hybride, 89ᵉ), le Monténégro (démocratie imparfaite, 61ᵉ), le Maroc (régime hybride, 95ᵉ), le Népal (hybride 101ᵉ), le Pakistan (hybride 107ᵉ), le Paraguay (hybride, 77ᵉ), le Qatar (autoritaire, 114ᵉ), la Roumanie (démocratie imparfaite 61ᵉ), le Sénégal (hybride 79ᵉ), la Somalie (régime autoritaire non classé), l’Afrique du Sud (démocratie imparfaite, 45ᵉ), le Soudan (autoritaire, 144ᵉ), l’Ukraine (hybride, 87ᵉ), les Émirats arabes unis (autoritaires, 133ᵉ), le Royaume-Uni (démocratie, 18ᵉ), les États-Unis (démocratie imparfaite, 30ᵉ), l’Ouzbékistan (autoritaire, 149ᵉ) et le Vietnam (autoritaire, 138ᵉ).
Les pays musulmans sont quasi tous des dictatures
L’exception est la Malaisie, dont la géographie éclatée en archipels et le régime de monarchie constitutionnelle fédérale constituent aussi des exceptions.
Constater cela n’est ni islamophobe ni le fruit du hasard : 57 États membres de l’ONU appartiennent également à l’OCI, l’organisation de la coopération islamique. Leurs systèmes juridiques s’appuient sur la charia, la loi de Mahomet, considérée comme supérieure à toutes les lois votées par les hommes. Sachant que la démocratie est définie comme le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple, point n’est besoin d’être fort en maths pour comprendre que démocratie et islam politique sont incompatibles.
Les maths ne sont pas à incriminer pour le résultat de ce vote, pas plus que pour ceux des Résolutions votées par l’Assemblée générale, qui sont adoptées à la majorité des deux tiers. Ils ne sont que le reflet d’un principe, ignoré par la plupart des opinions publiques aux yeux desquelles l’ONU est garante du Droit international : l’Organisation a été créée par les vainqueurs de la deuxième guerre mondiale, indépendamment de leurs régimes politiques. Ils sont demeurés les cinq seuls membres permanents du Conseil de Sécurité : Chine, France, Royaume-Uni, Russie et États-Unis.
Outre les chiffres, les lettres
La formulation utilisée par l’ONU pour la Résolution votée le 12 juillet 2023 pourrait prêter à sourire, si elle n’était un signe aussi inquiétant pour les citoyens de pays non musulmans.
En effet, le débat préliminaire au vote portait sur « l’augmentation alarmante des actes prémédités et publics de haine religieuse, démontrée par la profanation récurrente du saint Coran dans certains pays d’Europe et au-delà ».
La dénomination du « saint Coran » est-elle une AOC, appellation d’origine contrôlée, et si oui, contrôlée par qui ?
La Résolution se prétend œcuménique, mais la Sainte Bible n’est pas nommée, ni le Tripitaka, qui comprend les enseignements de Bouddha et les principes et règles du bouddhisme.
D’après deux associations de défense des chrétiens, Open Doors International et Global Christian Relief, en 2023, plus de 350 millions de chrétiens dans le monde sont discriminés et persécutés en raison de leur foi (Open Doors USA). L’ONU ne s’occupe pas de leur cas et nulle Résolution ne sera jamais votée contre leurs persécuteurs, qui sont juges et partie au Conseil des Droits de l’Homme.
Parmi les chrétiens persécutés, ceux qui vivent sous le joug de l’Autorité palestinienne ne sont pas les moins à plaindre :
« Le fait que la communauté internationale continue de négliger le sort des chrétiens sous le régime de l’Autorité palestinienne pourrait conduire à la disparition du christianisme là où il est apparu (Begin Sadat Center). »
Il en va de même à Gaza où, en 2008, un an après le coup d’État du Hamas, la dernière librairie chrétienne du centre de Gaza, The Teacher’s Bookshop, a été la cible de deux attentats. Elle avait été créée par l’Église baptiste de Gaza dix ans plus tôt. Après avoir été menacé de mort par des djihadistes pendant des années, son propriétaire chrétien, Rami Ayyad, a fini par être enlevé, torturé et assassiné. Le Hamas a condamné du bout des lèvre mais, bien sûr, ses meurtriers n’ont jamais été retrouvés (Foreign Policy). Depuis, entre exil, meurtres et conversions, la population chrétienne de Gaza diminue régulièrement (Reuters).
Malgré les trois commissions spéciales et le point de l’ordre du jour de l’ONU, tous quatre exclusivement consacrés au bien-être des Palestiniens, rien n’a jamais été entrepris au bénéfice de ces citoyens chrétiens persécutés.
De mauvais esprits suggèrent que c’est parce qu’on ne peut pas accuser Israël de leurs malheurs. Ça alors, qui l’eût cru ? LM♦

Liliane Messika, MABATIM.INFO
En savoir plus sur MABATIM.INFO
Abonnez-vous pour recevoir les derniers articles par e-mail.
