Le Moyen âge : mal aimé et mal connu

Le Moyen âge est une période de 1 000 ans

Compris entre le Vᵉ et le XVᵉ siècle, le Moyen âge doit son appellation aux hommes de la Renaissance qui le voyaient comme un temps barbare et médiocre en comparaison de l’âge d’or de l’Antiquité gréco-romaine. Les historiens n’ont jamais remis en cause cette appellation et le Moyen Âge est passé à la postérité comme une longue période peu intéressante dominée par les superstitions, l’ignorance et la brutalité. La stigmatisation est allée jusqu’à la déformation, par exemple on a inventé le droit de cuissage qui n’a jamais existé, du fait d’une mauvaise interprétation du droit cullage (cullagium, collecte en latin) que devait payer un nouveau marié aux célibataires du village, par compensation.

Cependant, le Moyen âge n’est ni homogène ni inintéressant dans bien des domaines : technique, architecture, culture, agricole, économique… ; même la définition et les bornes du Moyen âge sont contestées depuis longtemps, pour ma part je distingue trois Moyen Âge correspondant aux trois temps très différents détaillés ci-dessous.

De 476 à 700, une période de déclin

En 476, l’Empire romain d’occident s’effondre, en 486 la bataille de Soissons marque l’avènement des Francs de la dynastie mérovingienne. Dès lors, la Gaule romanisée va progressivement se transformer, se contracter économiquement, avec le rétrécissement des fortunes aristocratiques, des échanges économiques, la disparition du commerce international en méditerranée et l’abandon de l’entretien des grands équipements (aqueducs, arènes… y compris les murailles des villes).

Les paysans sont les grands bénéficiaires de ces changements, on passe d’une agriculture intensive (grande villa romaine) visant l’export dans l’empire, à une culture locale plus diversifiée. Il y a multiplication des petits propriétaires. Il y a une pandémie de peste à partir de 541, qui touche tout le bassin méditerranéen, elle porte le nom de peste Justinienne et a participé à faire échouer l’empereur romain d’Orient Justinien Iᵉʳ (482/565) dans sa reconquête de l’Empire romain d’occident. Enfin, la disparition (vers 675) du solidus or créé par Constantin consacre la fin des derniers signes de romanité.

De 700 à 1300, une période de développement

– Développement économique et démographique : le fait le plus marquant est celui de la croissance démographique de la population européenne qui passe de 27 millions en 700 à 70 en 1300. L’agriculture devient scientifique (assolement triennal, nouvelle charrue…). Il y a multiplication des marchés du fait de la monétisation de la société, pour payer les taxes, les paysans et les seigneurs vendent leur surplus, la monnaie sécurise les transactions.

– Développement des seigneuries : la seigneurie crée un cadre contraignant, stable et sécurisé. La seigneurie a des dimensions politique et économique, par exemple 35 % de la production des céréales est captée par les seigneurs et l’Église, 25 % conservée pour l’ensemencement, il reste 40 % aux paysans producteurs. Il faudra attendre 1250, pour voir se multiplier les chartes de franchise organisant les communautés et les relations avec les seigneurs. La création des villages se développe entre le XIᵉ et le XIIIᵉ siècle.

– Développement des techniques : en Europe le Moyen âge a développé plus qu’aucune autre civilisation précédente l’usage des machines avec le moulin à eau qui fournit de l’énergie, c’est le pétrole de l’époque. Les moulins sont utilisés pour les grains, la bière, le fer… le papier…, pour fouler et 1 homme avec 1 moulin remplace 40 ouvriers foulons. Les attelages antiques de chevaux ou de bœufs couplés permettaient de tirer 500 kg, mais avec le collier pour chevaux inventé au VIIIᵉ, l’attelage peut tirer 2500 à 3 000 kg.

– Développement du commerce international : il y a une reprise du commerce international au début Xe qui se généralise au XIᵉ et prend une expansion considérable aux XIIᵉ et XIIIᵉ, tout cela dû à des innovations techniques comme la boussole ou le gouvernail d’étambot, des innovations commerciales comme l’assurance maritime ou la lettre de change, le développement du commerce intérieur (réseau routier, circulation des commerçants, tenue de nombreuses foires).

– Développement du nombre d’hommes libres : le christianisme et les difficultés économiques (un esclave peut coûter cher à entretenir hors des périodes de récolte) ont poussé du VIIᵉ au XIᵉ à la diminution du nombre d’esclaves au profit des affranchis sous dépendance qui sont dans un statut détérioré d’homme libre, mais qui peuvent librement se marier.

– Développement des universités : le déclin culturel du Moyen Âge a été dû au christianisme, cependant le XIIᵉ et le XIIIᵉ siècle voient la multiplication du nombre des traductions des textes anciens (grecs, romains…) et la création des premières universités.

De 1300 à 1450, une période de grandes épreuves

Le climat en l’an mil était plus doux et plus sec qu’aujourd’hui ce qui faisait que l’on cultivait alors de la vigne en Angleterre, mais à partir de 1300 et pendant 150 ans, des conditions climatiques dégradées génèrent de grandes famines si importantes que l’on verra du cannibalisme comme à Gêne en 1315-1317.

La chrétienté est en crise, et vit le grand schisme d’occident avec la multiplication des papes concurrents, jusqu’à trois papes en même temps. Il y a un durcissement de l’Église, à la foi succède des pratiques de dévotion et beaucoup de mystiques, dans le même temps naît l’inquisition (on brûle beaucoup de sorciers, majoritairement des femmes).

La peste noire 1348-1353 est un cataclysme sanitaire. De 40 à 50 % de la population européenne disparaît. La chute de la population conduit à une raréfaction de la main-d’œuvre, à des hausses des salaires, à une chute de la demande et du prix des céréales. Le commerce est affecté, les foires de champagne déclinent au XIVᵉ, les seigneurs subissent des chutes de revenu. Il y a une crise financière, trop de crédits non remboursés en particulier du fait des guerres, qui ont accaparé beaucoup de ressources, notamment celle de Cent Ans, et outre les dégâts directs, ont arrêté le développement des innovations techniques autres que militaires.

Conclusion

Le Moyen âge a succédé à l’effondrement de l’Empire romain que les experts attribuent à de multiples facteurs (difficultés économiques, déclin de l’agriculture, difficultés sociales, divisions religieuses, problèmes politiques, questions militaires, nombreuses migrations et invasions barbares, plusieurs épidémies et problèmes climatiques), mais il n’y a pas un, mais trois Moyen Âge aux profils bien différents (déclin, développement, grandes épreuves).

Enfin, force est de constater que les hommes de l’époque ont su assez rapidement, en un peu plus de 200 ans, rebondir et malgré de nombreuses épreuves fournir les bases au lancement à partir de 1450 de la Renaissance, de la civilisation occidentale qui a dominé le monde jusqu’à aujourd’hui où son emprise amorce sa fin. MB

Michel Bruley, MABATIM.INFO


Pour finir : une blague sur les sorcières cliquez ici

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