Les enfants arabes tués en Israël ne sont pas tous égaux devant les médias

Par Liliane Messika 
[2 août 2024]

Samedi 27 juillet 2024, (shabbat 22 Tamouz 5784, en version originale), le village de Majdal Shams, au nord d’Israël, est devenu tristement célèbre. Pas pour les raisons habituelles, donc pas de starisation, mais discrète notoriété en une seule nuance de gris.

Les faits sont pointus

Le Hezbollah, une filiale de l’Iran, a lancé une roquette sur un terrain de foot de ce village où jouaient, notamment, des équipes de la ligue de football des jeunes, composées d’enfants âgés de huit à dix ans. Parmi les joueurs et le public, douze enfants ont été tués (dont trois frères de la famille Abu Saleh). Dix-sept des 34 blessés sont encore dans un état critique.

La roquette, une Falaq-1 surface-surface non guidée de 240 mm qui transporte une ogive explosive de 50 kilos, est une production iranienne dont le Hezbollah a l’exclusivité.

Les secours, arrivés rapidement, ont découvert des « scènes d’un champ de bataille », selon le directeur général du Magen David Adom (la Croix rouge israélienne).

Lorsque de tels événements se produisent en Israël, les médias étant binaires, soit les victimes sont juives, soit elles sont palestiniennes.

Dans le premier cas, les redresseurs de tort français nous ont habitués à qualifier les victimes de « colons » et à accuser Israël d’avoir provoqué cet « acte de résistance ». Les prétextes sont bien rodés : numéro 1, l’occupation dont les islamo-gauchistes hexagonaux parlent au présent alors qu’elle s’est terminée il y a exactement 19 ans, en juillet 2005. Numéro 1 ex-æquo, le génocide que l’État juif pratique contre la population des « réfugiés palestiniens », laquelle a été MULTIPLIÉE par 9 depuis l’indépendance d’Israël en 1948 : 750 000 en 1948, 6,9 millions en 2024 (source palestinienne1).

Quand les victimes ne sont pas juives, elles sont naturalisées « palestiniennes » pour le public français (diagnostiqué neuneu), y compris quand il s’agit de musulmans israéliens. Dans ce cas, on accuse l’État juif d’abord, on pose les questions ensuite.

Ainsi Avera Mangistu et Hisham al-Sayed, citoyens israéliens atteints de troubles mentaux et détenus au secret à Gaza depuis 2014 pour le premier, 2015 pour le second2, sont inconnus des services médiatiques, pour cause de mauvais casting : des Israéliens musulmans (et noir pour le premier) détenus par le Hamas depuis dix ans, ça contredit la doxa de façon beaucoup plus rédhibitoire qu’une Carmen qui résiste et tue Don José3 ou qu’une reine d’Angleterre noire4.

2024 est riche en paradoxes

En octobre 2023, le Hamas a attaqué les civils juifs du sud d’Israël avec une barbarie digne des conquêtes de Mahomet lui-même. Cette agression a déjà conduit à une augmentation de 1 000 % des actes antisémites perpétrés dans notre pays : plus on est de fous, plus on rit de voir tant de Juifs torturés et démembrés. Cette surenchère de haine ne surprend pas les observateurs étrangers, mais ridiculise la France, qui se croit toujours la « patrie des droits de l’Homme ».

Le 30 septembre 2000, à Gaza, la mort D’UN enfant palestinien a été mise en scène et filmée par un cameraman pallywoodien et authentifiée par un journaliste français, qui n’avait pas assisté à la scène.

La vidéo, offerte à la terre entière par France 2 avait sanctifié l’enfant (Mohamed al-Dura), provoqué la deuxième intifada et inspiré les assassins du journaliste Daniel Pearl, des enfants de l’école Ozar Hatorah de Toulouse et tous ceux qui ont saisi ce prétexte pour persécuter des Juifs dans le monde entier5.

À l’inverse, alors que le carnage contre les petits footballeurs de Majdal Shams a tué non pas UN mais DOUZE enfants arabes, les médias français sont restés réservés, discrets et ambigus. Pourquoi tant de circonspection ?

Parce que ces enfants n’ont pas été tués par des juifs et qu’ils étaient coupables d’être des Arabes ISRAÉLIENS. Précisément des Druzes, dont l’islam n’est pas jugé orthodoxe par les théologiens musulmans mainstream6.

Couverture presse francophone – Google consulté le 28 juillet 2024 à 10h30

Yahoo sait compter jusqu’à onze, sans multiplier les victimes comme les petits pains à l’instar du « Ministère de la Santé du Hamas ». Le média titre sur le véritable responsable du massacre, mais il ne s’appesantit pas sur l’ethnie et la religion des victimes : des Israéliens tués, c’est bon pour le commerce. Quand le public voit qu’ils ne sont pas Juifs et qu’Israël ne peut en être ni responsable ni coupable, il décroche.

BFMTV est plus rusé que son confrère : en lisant son titre, on peut imaginer qu’Israël est responsable de la tuerie, ce qui est beaucoup plus vendeur que l’inverse, car cela suscite la vertueuse indignation des droitdelhommistes, à qui aucune autre cause ne procure une telle jouissance.

Le Parisien a tenu sa lorgnette dans le sens inverse : il a cherché à susciter l’indignation des bien-pensants en les motivant avec un « Golan annexé par Israël » destiné à rappeler aux antisémites pourquoi ils se disent « seulement antisionistes ».

20 minutes a appâté le chaland avec la « guerre Israël-Hamas », qui est l’un des dièses (OK, hashtags) les plus populaires sur les réseaux sociaux. En réalité, l’agresseur n’est pas le Hamas, mais le Hezbollah. Certes, les deux mouvements ont le même objectif, la destruction d’Israël, pour le même donneur d’ordres, l’Iran, mais où sont les vertueuses recommandations d’éviter l’amalgame ?

À l’heure où ces captures d’écran ont été faites, France 24 a répondu à la requête “dix enfants tués en Israël”, mais sous un titre qui n’a rien à voir avec le sujet, si ce n’est par sa fonction : provoquer un réflexe conditionné de haine israélophobe.

Le quotidien vespéral de référence n’a pas vu que les morts étaient des enfants : il a informé de douze morts « à la suite de tirs de roquettes » (« à la suite » indique une chronologie n’impliquant pas nécessairement de rapport direct de cause à effet) sans mention de l’identité des tireurs desdites roquettes.

Comme à son habitude, Le Monde a commencé à l’envers, par les condoléances du Président israélien, minimisées par la mention que l’armée israélienne (agresseur, forcément agresseur) a annoncé une future riposte (disproportionnée, forcément disproportionnée).

Enfin, last et least7, Libération est libéré du réel depuis longtemps :

Qui aime bien les Palestiniens châtie bien Israël : le quinquagénaire quotidien soixante-huitard a adopté la chronologie de son (centi)mètre à penser Mondial. Les onze morts arrivent après des tirs de roquette et le premier sur les lignes du crime est le Président Herzog qui, avec des doubles guillemets, « a déclaré que “les terroristes du Hezbollah”… »

Une heure plus tard, le même canard déchaîné commençait son article sur « l’attaque de Majdal Shams » par l’évocation de représailles israéliennes sous la forme d’une « guerre totale avec le Hezbollah et le Liban ». Et sur Facebook, un exercice de voltige : « une frappe sur un terrain de foot d’un village druze a tué 9 personnes et 17 des 34 blessés se trouvent dans un état critique, dont 10 sont des enfants ».

Ce qui se conçoit bien s’exprime clairement. Au lieu de cet embrouillamini, il était facile de résumer les faits :

Une roquette tirée par le Hezbollah sur le terrain de foot d’un village druze a tué onze enfants et fait 34 blessés dont 17 dans un état critique.

Mais alors, les lecteurs auraient compris que les enfants étaient morts, ils s’en seraient indignés à juste titre, car il s’agissait d’arabes musulmans. Sauf que leurs assassins étaient des « résistants », ce qui, pour des lecteurs de Libération, enchaînés à leur tropisme idéologique, relève de l’inconcevable…

Le cheikh Mowafaq Tarif, chef de la communauté druze ne lit ni Libé ni Le Monde

Il n’a donc pas leurs réticences, ni leurs pudeurs. Il se sent israélien sans restriction et il appelle un chat un chat et la roquette du Hezbollah une « attaque terroriste brutale et meurtrière »:

« Il est impossible d’imaginer et de décrire les scènes d’horreur des enfants et de leurs corps déchiquetés gisant sur l’herbe. Un État digne de ce nom ne peut pas permettre que ses citoyens et ses résidents soient continuellement blessés. Telle est la réalité des communautés du Nord depuis neuf mois8 », a-t-il déclaré.

Les onze enfants, Fajr Layat Abu Saleh (16 ans), Amir Rabia Abu Saleh (16 ans), Hazem Akram Abu Saleh (15 ans), Jon Wadi’ Ibrahim (13 ans), Izil Nashat Ayoub (12 ans), Finis Adham Safadi (11 ans), Yazan Nayef Abu Saleh (12 ans), Elma Ayman Fakr al-Din (11 ans), Naji Taher Halabi (11 ans) et Milar Mu’adad al-Sha’ar (10 ans) ont été enterrés dimanche 28 juillet au matin.

Ils sont pleurés par tous leurs concitoyens. Et par les quelques Français informés de leur mort ? LM

Liliane Messika, MABATIM.INFO


1 www.unrwa.org/palestine-refugees

2 www.hrw.org/fr/news/2017/05/03/deux-israeliens-detenus-au-secret-gaza

3 www.radiofrance.fr/francemusique/carmen-de-bizet-une-histoire-de-scandales-2510183

4 La chronique des Bridgerton – www.netflix.com/watch/80232920?trackId=14277281

5 Documentaire allemand : l’Enfant, la mort et la vérité, d’Esther Schapira pour la chaîne ARD et livre Al-Dura, Long range Ballistic Myth, de Nidra Poller – www.amazon.fr/Al-Dura-long-range-ballistic/dp/0988711958

6 Les Druzes sont une secte religieuse issue de l’islam chiite qui compte des communautés en Israël, en Syrie et au Liban. 25 000 environ vivent sur les hauteurs du Golan que contrôle Israël, 150 000 dans tout le pays.

7 L’expression idiomatique est « last but not least », le dernier mais non le moindre.

8 www.timesofisrael.com/a-dark-day-for-majdal-shams-druze-community-grieves-after-hezbollah-strike-kills-12/


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2 commentaires

  1. Généralement, la presse française a toujours été antisémite, et ce depuis la fin du XIX° siècle.
    Elle n’en peut plus de vomir sa haine sur LE JUIF.
    Elle adore voir le juif se plaindre, quémander leur pardon, sans défense, etc…
    Et voilà que les juifs POSSEDENT un pays, et ce pays ISRAEL est devenu le JUIF DES NATIONS.

    Toute la presse française et mondiale boit du p’tit lait.

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  2. la presse aux ordres en France est un vecteur puissant de la deliquescence du pays , il est regrettable que certaines de leurs approches scelerates soient si peu eloignées des attitudes de certaines elites israeliennes -finalement en tant que citoyen israelien je me moque des torchons macroniens et de leurs courtisans/ journaleux , par contre l establishment gauchiste israelien me pose un réel probleme et je ne sais pas pour qui voter la prochaine fois , car Bibi l ultra centriste m inquiete un peu plus chaque jour .

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