Tout ignorer de ses voisins mais tout savoir sur le néolithique

Par Michel Bruley
[23 juillet 2025]

Dans ce monde où l’on ignore ses voisins, on peut avoir une foule d’informations sur les hommes du néolithique…

Chronologie et stade climatique

La période néolithique fait suite au Mésolithique, une période dite de transition où l’on trouve les premières traces de sédentarisation de populations de chasseurs-cueilleurs (-14 000 en Europe) et de poterie (-13 000 au Japon). Les pratiques du néolithique ont commencé à des moments différents suivant les régions dans le monde et suivant l’exigence dans les définitions des archéologues. Le Néolithique voit en particulier la naissance de l’agriculture, de l’élevage ; or de fait nous ne sommes sûrs qu’il y a agriculture ou élevage qu’à partir du moment où les traces des plantes et des animaux que l’on retrouve sont déjà génétiquement modifiées du fait de la sélection, de la domestication, mais bien sûr l’idée et les premiers essais remontent à des moments antérieurs difficiles à dater.

L’activité humaine est conditionnée par le climat, en particulier l’agriculture, celle-ci a été inventée, quelle que soit la région dans le monde dans notre actuelle période climatique de l’holocène qui a commencé au 10 millénaire av. J.-C. Cependant, les conditions géographiques et climatiques sont différentes à l’époque, il faut aussi avoir conscience qu’au début de l’agriculture néolithique au Proche-Orient (– 8500), la mer Méditerranée est plus basse de 40 m et ne trouvera sa hauteur actuelle qu’au 5ᵉ millénaire av. J.-C.

Créations du néolithique

Le néolithique ne se résume pas au développement, à la diffusion de l’agriculture et de l’élevage, mais il concerne des créations dans de nombreux domaines, dans le désordre : hache polie, céramique, maison rectangulaire, vin, métallurgie à froid, roue, tour de potier, traction animale, araire, cimetière, ville… Au-delà des nouveautés, il y a aussi une grande multiplication de pratiques ou d’objets déjà connus dans les périodes antérieures : chien domestiqué, aiguille, mortier et pilon, tissage, chaussure, hommage aux morts (tombe, incinération), poterie, corde, village, spécialisation artisanale, « bâtiment communautaire », commerce, navigation, figurine stylisée… À noter qu’il est difficile et souvent provisoire d’établir une période d’invention de pratiques ou d’objets, les nouvelles fouilles archéologiques bouleversent les connaissances et tout ne s’est pas passé en même temps et dans le même ordre partout.

Au-delà des créations, le néolithique apporte une évolution irréversible qui entraîne la fin d’un mode de vie vieux de millions d’années fondé sur la chasse et la cueillette.

Les conséquences de ce nouveau mode de vie ont été :

  • boom démographique, car les femmes sédentaires font des enfants plus souvent ;
  • problèmes sanitaires liés à de nouvelles maladies dues à la proximité avec les animaux ;
  • impact écologique sur la nature ;
  • disparition des populations de chasseurs-cueilleurs (résistance, assimilation, marginalisation) ;
  • développement de sociétés inégalitaires dû à la sédentarisation ;
  • augmentation de la violence… ;

Mais la course à l’armement guerrier ne date pas de là, elle ne commencera qu’à l’âge du bronze.

Enfin, on notera que pour certains spécialistes le néolithique marque la fin de la société d’abondance, le chasseur-cueilleur ne consacrant que 3 heures par jour à sa nourriture. Dans cette vision, il vit l’abondance parce qu’il n’a pas de besoins infinis et devant surtout rester très mobile il limite l’accumulation de biens.

Néolithique en Europe

Le néolithique se développe en Europe plus tardivement qu’au levant (-6400), via deux voies d’importation (la vallée du Danube et le bord de la Méditerranée), il nous a laissé des traces importantes avec les menhirs, les dolmens, les mégalithes… on en dénombre plus de 6000 rien qu’en France. Ces restes sont souvent extraordinaires et nous interrogent : Carnac, Stonehenge…

Les archéologues ne savent pas vraiment comment cette culture s’est diffusée (migration, infiltration de groupes acculturés, colonisation…), il semblerait qu’il y ait eu dans un premier temps une faible intégration avec les populations locales même s’il y a eu des mélanges, mais au fil du temps cela a changé. Vers 3000 av. J.-C., un déclin démographique est observé, attribué à des facteurs tels que la surexploitation des ressources, des conflits avec des populations nomades, et l’émergence de maladies infectieuses.

La diffusion du néolithique a entraîné des conséquences :

  • une augmentation de la population, mais on constate une discontinuité génétique entre le Mésolithique et le Néolithique ;
  • de grandes réalisations collectives (cf. certains sites) ;
  • l’évolution des structures sociales avec l’apparition de traces de hiérarchie ;
  • des guerres (territoriale ?) ;
  • une transformation génétique, les hommes supportent de consommer du lait à l’âge adulte (lait, faisselle, fromage) ;
  • une diminution de la taille des personnes ;
  • une faible transformation des paysages par les espaces cultivés ;

Fantôme du néolithique : Ötzi

En 1991, a été découvert dans les Alpes de l’Ötzal (d’où le surnom d’Ötzi) à 3 210 m, un homme de 1,60 m, 60 kg, 45 ans ayant des tatouages et des traces d’acupuncture, ayant vécu entre -3300/-3255, portant des vêtements de peaux très élaborés, un arc de 1,82 m, 14 flèches, un couteau portant les traces de sang de 4 personnes différentes, les poumons ont des traces de fumée du quotidien ou de la métallurgie… sac à dos en écorce de bouleau… chaussures… Cette momie a fait l’objet d’un très grand nombre d’études qui ont contribué à la connaissance du néolithique. Par exemple, les spécialistes ont en particulier été étonnés par le niveau technique des objets retrouvés. (Pour plus de détails, beaucoup de vidéos, de conférences, de textes sur Ötzi sont accessibles sur le web).

Cette momie est la cerise sur le gâteau de la connaissance du Néolithique que les archéologues ont capitalisée, mais il reste bien des points inconnus comme : les conditions et les motivations de la transition néolithique ; l’organisation économique et sociale des sociétés ; les migrations et peuplements ; les techniques de construction ; les pratiques religieuses ou rituelles ; ; la langue parlée…

Conclusion

Le Néolithique a engagé l’humanité dans une évolution irréversible. Aujourd’hui, il ne reste dans le monde que 32 sociétés de chasseurs-cueilleurs purs (Bushmen ou Hadza d’Afrique, peuples isolés d’Amazonie, indigènes des îles Andaman, peuples de Papouasie-Nouvelle-Guinée, Orang Asli de Malaisie…) qui ne représentent que quelques dizaines de milliers de personnes. Cependant, si l’on compte les personnes qui vivent de la pêche halieutique à travers le monde (sédentaires vivant de chasse ou de cueillette), on arrive à environ 400 millions de personnes, soit un peu moins de 5 % de l’humanité.

Finalement, en 2025, vivre de la chasse, est-ce une bonne idée ? MB

Michel Bruley, MABATIM.INFO


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