Israël : Eyal Zamir continue la politique de dissimulation commencée par Hertsi Halevi
Par Ran Baratz, [29 novembre 2025]
Eyal Zamir
L’enquête sur les enquêtes » et le conflit avec le ministre de la Défense cachent la culture de la dilution des responsabilités dans l’armée israélienne. On peut comprendre les erreurs, mais en aucune manière on ne peut accepter le mensonge et la négligence.
Cette semaine, dans l’armée israélienne ont été finalisées une série d’enquêtes internes, initiées en son temps, par l’ex-chef d’état-major Hertzi Halevi.
Telles qu’elles se présentent, il paraît de plus en plus clair que leur but est d’éviter toute critique et ôter toute responsabilité de l’état-major dans la catastrophe du 7 octobre et les échecs de l’armée durant les jours qui ont suivi.
La nomination d’Eyal Zamir au poste de chef d’état-major était censée provoquer un changement radical au sommet.
Il apparaît clairement, que Zamir s’est montré le digne successeur de Halevi et son action ne diffère en rien de son prédécesseur. Zamir a bien compris la mission, qu’il a héritée, mais il a constaté aussi, que les enquêtes de Halevi étaient superficielles et peu convaincantes. Le but visé, par l’ex-chef d’état-major était d’absoudre l’état-major de toute responsabilité dans le pogrom du 7 octobre.
C’est pourquoi Zamir a utilisé une astuce : nommer une commission « externe » sous la conduite du général Sami Tourgeman.
Sami Tourgeman, général de l’armée israélienne à la retraite jouit de la confiance personnelle de Zamir. Et effectivement, il n’a pas déçu.
La commission Turgeman n’a pas réellement enquêté sur les échecs, mais a fonctionné comme une commission de contrôle des enquêtes déjà réalisées.
Autrement dit, la structure et les thématiques des enquêtes étaient les mêmes, que celles des enquêtes pilotées par Halevi. Turgeman a trouvé des enquêtes succinctes, mais ne les a pas remplacées par d’autres, et n’a presque pas abordé les sujets « polémiques », que Halevi avait omis.
Autrement dit, l’ « enquête de Halevi » était partielle et incomplète, et lorsque Zamir a annoncé cette semaine les conclusions la sienne, elles sont vite apparues insuffisantes et décevantes.
Les porte-parole de Zamir ont annoncé :
« L’armée israélienne est tenue de mener une enquête approfondie, professionnelle et détaillée », c’est pourquoi un « comité d’examen indépendant, pour évaluer les enquêtes et leur qualitéa été mis en place ».
En pratique, il ne s’agit pas d’un comité indépendant, mais d’un comité ad hoc, piloté par le chef d’état-major, qui, au lieu de mener une enquête objective sur le fond, n’a fait qu’« examiner » les « enquêtes » déjà réalisées.
Zamir a pris des mesures disciplinaires envers plusieurs officiers supérieurs, qu’il considérait comme « responsables des erreurs de commandement avant et durant les événements du 7 octobre ». Zamir a aussi déclaré :
« L’armée israélienne a échoué dans sa principale mission… un échec grave, retentissant, systémique et c’est une responsabilité, que nous assumons parce que nous sommes des commandants supérieurs ».
Des mots percutants, mais la vérité est tout à fait contraire.
Les « sanctions » sont dérisoires compte tenu des responsabilités imputées aux généraux concernés.
– Ceux qui ont déjà été démobilisés ne feront plus partie de la réserve.
– Ceux qui sont encore en service actif recevront un « blâme ».
C’est, selon Zamir, la « punition » adéquate pour des officiers supérieurs responsables d’un « échec grave, retentissant et systémique ».
Pire, Zamir contredit ses déclarations, car non seulement il ne détaille pas en quoi ces officiers supérieurs ont échoué, mais au contraire, dans la suite de son communiqué il fait l’éloge de leurs performances et de leur travail « exceptionnel après le 7 octobre ».
De plus, certains généraux ont bénéficié d’une étrange exemption de l’enquête ;
– Ainsi Eliezer Toledano et Rassan Alyan, n’ont pas été limogés, mais seulement mis à la retraite.
– Tamir Yadai et Amir Baram continuent de servir dans des postes importants.
En outre, les responsabilités des anciens chefs d’état-major, dans l’impréparation de l’armée avant le 7 octobre n’ont pas été examinées. Par ailleurs, de nombreux autres sujets relevant du haut commandement n’ont même pas été abordés.
En résumé, Zamir continue l’entreprise de dissimulation de la vérité au peuple d’Israël.
C’est une tentative de désinformation envers les citoyens israéliens, afin qu’ils acceptent l’idée, que l’échec professionnel, voire pénal, sans précédent dans l’histoire d’Israël, n’entraîne aucune sanction personnelle.
De plus, Zamir« déverse » quantités de louanges sur Tsahal,
Qui « s’est relevé de l’échec. Depuis il combat et a vaincu des ennemis, sur tous les fronts. Il a obtenu des résultats opérationnels sans précédent ».
L’essentiel pour Zamir : profiter de toute occasion pour s’auto glorifier. Cette attitude témoigne d’un manque d’esprit critique, ainsi que de la persistance de la culture du mensonge, dans les structures de défense d’Israël.
Zamir considère que l’armée a fait un travail suffisant d’auto introspection, mais en revanche, tous les autres corps de sécurité nationale doivent, selon Zamir, faire l’objetd’une enquête par une commission indépendante.
Donc, l’objectif de l’« enquête » de l’état-major est de clore toute critique et surtout ne pas assumer ses responsabilités.
Eyal Zamir et Israel Katz
Zamir croit que nous sommes assez naïfs pour croire qu’il suffise de dire « enquête approfondie et minutieuse » et « renforcement de la confiance envers nos subordonnés et les citoyens de l’État », pour ne pas voir ses mensonges et les tromperies. L’arrogance et le mépris de Zamir sont tout aussi étonnants.
Et comme si cela ne suffisait pas, dans le cadre de sa querelle médiatisée avec le ministre de la Défense Israël Katz, concernant ses actions de non coordination, Zamir a déclaré que
« L’armée est le seul organisme d’État, à avoir enquêté en profondeur sur ses échecs et à en avoir assumé la responsabilitéet maintenant le gouvernement doit établir une commission objective et indépendante, qui examinera les faits à tous les niveaux, qui ont précédé à ’échec ».
Comment réparer un système aussi défaillant ? Les hauts fonctionnaires sont attirés par l’autorité, le prestige, statut et ressources, qui vont avec. C’est naturel.
Aujourd’hui, le problème du système, ce sont les normes devenues « corrompues », ce qui fait, que les gens intègres ne restent pas dans l’armée et ceux qui se sentent à l’aise dans la culture du mensonge, le manque de professionnalisme, le mépris et la négligence y restent et bénéficient d’avancements. Cet état de choses a conduit au désastre national.
Aujourd’hui, on sème la confusion dans le public, en brouillant la distinction entre la négligence coupable et l’erreur de jugement.
On minimise les faits, par un raisonnement simpliste :
« Qu’attendez-vous des officiers supérieurs ? Ils ont fait une erreur, cela arrive en temps de guerre ».
En effet, dans un environnement rempli d’incertitudes et de dangers comme la guerre, les commandants, à tous les niveaux sont susceptibles de se tromper. Et en effet, les erreurs opérationnelles doivent être étudiées, afin de s’améliorer.
Mais justement, parce que c’est une profession dangereuse et pleine d’incertitudes, les erreurs peuvent être pardonnées, mais la négligence – en aucun cas.
Dans les métiers dangereux, le niveau des exigences professionnelles doit s’améliorer. Dans le métier des armes il s’agit de vie ou de mort. Une baisse de la qualité du commandement, met en danger la vie des soldats.
C’est pourquoi dans l’armée, les erreurs sont pardonnables, mais la négligence, ainsi que la dissimulation et les mensonges doivent être punis avec toute la sévérité.
Pour survivre dans son environnement ennemi, Israël doit repenser et reformer le fonctionnement de l’état-major et réviser les rapports des officiers supérieurs avec la base. Cela ne sera possible, que si ceux qui ont été négligents et ont abandonné la sécurité d’Israël, au prix de terribles pertes humaines, sont punis avec la plus grande sévérité.
Si nous permettons à Zamir et à ses pairs, de se soustraire de leurs responsabilités, nous serons exposés à subir un nouveau 7 octobre. RB♦
Ran Baratz, Makor Rishon Docteur en philosophie, publiciste et conférencier. Ancien directeur des relations publiques au cabinet du premier ministre Benjamin Netanyahou.
Traduction et adaptation : Édouard Gris
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