Palestine : « Élections, piège à Yakafaukon »

Le désert des Tartares

En 2005, Mahmoud Abbas a été élu président de l’Autorité palestinienne pour 4 ans. Deux ans plus tard, il s’est fait voler la moitié de son fromage par le Hamas, qui a conquis la Bande de Gaza par un coup d’État. En réalité, si cette OPA concerne la moitié de la population palestinienne, le fromage n’est pas coupé à 50/50 : comme les fonds des bienfaiteurs qui financent les Palestine sont adressés à Abbas, le président officiellement en charge, il prend son pourcentage au passage.

Cela ne change rien au fait que, depuis 2007, l’intrafada (intifada interne) s’épanouit entre les deux Palestine : elle a fait plus de cadavres que l’occupant israélien, qui n’occupe plus Gaza depuis Mathusalem (pseudonyme de Mahmoud Abbas).

Aussi régulièrement qu’une sécheresse au mois d’août, l’hypothèse d’élections occupe quelques lignes de la rubrique Conflit israélo-palestinien dans les médias estivaux, y compris en France.

Les élections palestiniennes ont été annoncées, puis annulées en 2009 à cause de l’opposition du Hamas (the Guardian), puis en 2011 pour les mêmes raisons (NY Times), en 2018 après un deal entre les deux dirigeants des deux Palestine (BBC), mais qui n’a duré qu’un mois et enfin en 2019, le principe des élections a été accepté par 14 factions palestiniennes, mais on attend toujours l’accord du Hamas (BBC).

Il ne faut pas désespérer : dès que le commandant Giovanni Drogo, créature de Dino Buzzati, a pris sa retraite, les Tartares ont fini par traverser le Désert éponyme. Peut-être en sera-t-il de même pour les élections palestiniennes, dès que les médias français auront le dos tourné ?

Plus les médias français annoncent leurs vœux, moins ils se réalisent

À intervalles réguliers, les journagandistes voient la république palestinienne idyllique à leur porte et entonnent l’hymne « Il est né le divin État », mais leurs incantations n’ont jamais donné de résultat sur le terrain. En revanche, en France, on a vu l’animosité anti-juive augmenter avec leurs accusations récurrentes contre Israël pour tout ce qui se passait (ou ne se passait pas) dans les deux Palestine. Mais sur place, rien, nada, whallou.

À l’inverse, on ne voit jamais, dans nos médias, les faits palestiniens susceptibles d’éclairer un peu notre lanterne. En particulier, le fait qu’aussi bien l’Union européenne que les États-Unis limitent officiellement leur caution à des candidats déterminés visant la « solution à deux États », ce qui implique qu’ils reconnaissent à Israël le droit à l’existence. Et pourtant, cette année, plusieurs listes fondent leur candidature sur l’engagement à poursuivre la lutte contre Israël jusqu’à sa disparition :

« Deux de ces listes appartiennent au Hamas, le mouvement islamiste qui dirige la bande de Gaza, et au Front populaire de libération de la Palestine (FPLP), un mouvement marxiste-léniniste de l’OLP. La liste du Hamas, intitulée « Jérusalem est notre destin », a été approuvée par la Commission électorale centrale palestinienne, bien que les dirigeants du mouvement islamiste affirment ne pas reconnaître les accords d’Oslo signés en 1993 entre Israël et l’OLP. (Gatestone) »

Les Unes sont volatiles…

À la fin du mois d’août, la presse française cesse, provisoirement, de se concentrer sur la douce Palestine en butte aux génocidaires Israéliens. Si bien que dès l’annonce des augmentations du gaz, de l’électricité et des transports en communs de septembre, l’intérêt pour ces élections fantômes s’éteint et Ramallah retombe dans l’indolente corruption d’une dictature bananière.

Ce n’est pas pour déplaire à Abbas, qui est aussi mal placé dans les sondages que notre Merluchon international. Tout comme le Lider Minimo de la France insoumise, la cote de Mahmoud dégringole avec une régularité de coucou suisse. C’est une courbe en miroir inversé de sa fortune dans les banques de même nationalité. Si de vraies élections avaient lieu (c’est-à-dire dans le cas d’électeurs votant une seule fois chacun), il serait balayé.

De l’influence des subventions sur les élections

Avec les Accords d’Abraham, initiés par l’abominable homme de la Maison-Blanche, la centralité incontournable du mini-conflit (moins de 60 000 victimes à ce jour, 49 mondial en nombre de morts, pour les deux côtés confondus – Daniel Pipes-) a été sérieusement battue en brèche.

La doxa des gens bien dans le monde libre tenait en une phrase : « aucune paix dans le monde ne pourra être signée avant la résolution du conflit israélo-palestinien. »

Oups… Sous la houlette du roux furieux de Washington, ce n’est pas un, ni deux, ni trois traités qui ont été signés, mais quatre !

Seuls les palestinolâtres les plus agressifs ne voient pas que la donne a changé et que les « frères » arabes font passer leur propre intérêt avant celui des réfugiés les plus chouchoutés de la planète. Leur intérêt, aujourd’hui, ce n’est même plus de soutenir le camp sunnite contre les Chiites, c’est de ne pas succomber sous les agressions des mollahs iraniens.

Là, les Palestiniens ont fait ce qui s’avère, a posteriori, le mauvais choix en s’alliant avec eux. Ce choix avait été dicté par le fait que l’Iran était d’une générosité illimitée vis-à-vis de tous ceux, quelle que soit leur obédience musulmane, qui luttaient contre l’État juif.

Mais aujourd’hui, cela diminue encore, si cela avait été nécessaire, l’intérêt des États du Golfe pour leur cause.

Pour être heureux, ne vivons surtout pas cachés

Cela pourrait être la devise de Mahmoud, dont l’action concrète pour le fonctionnement d’un État palestinien est inférieure à zéro, mais dont les subsides dépendent de ses apparitions à l’écran, dans le rôle de la victime expiatoire de tous les péchés d’Occident.

Il y a une équation que semblent oublier tous les dirigeants mondiaux, dont l’objectif est de se concilier certains votes en échange d’un soutien inconditionnel à « la » Palestine : c’est le fait que seul, le tenant du titre de Président touche les chèques. Et donc qu’il n’a pas intérêt à accepter que se tiennent des élections qu’il ne gagnerait pas.

C’est basique, mais cela n’a pas encore pénétré l’épaisse couche de préjugés bienveillants qui matelasse l’intellect palestinolâtre.

Aujourd’hui, Mahmoud Abbas sait très bien qu’il n’a pas plus l’ombre d’une chance d’être réélu qu’un François Hollande ou un Jean-Luc Mélenchon dans l’Hexagone. Et alors, ça n’a jamais empêché un politicien français de se présenter !

Certes. Mais ils jouissent de la notoriété et leur objectif est le pouvoir, pas l’enrichissement personnel. Mahmoud Abbas se fiche de la notoriété comme de l’an 48 et le pouvoir n’est pour lui que le moyen de sa faim de richesses.

Il était donc évident, pour tous les observateurs, qu’il n’irait pas au bout de cette prétendue démarche électorale.

Les élections palestiniennes ont été annulées pour la 4 fois

En janvier 2021, About Mazen est entré dans la 17ᵉ année de son mandat de 4 ans. Les saisons de sa série illimitée se suivent et se ressemblent. Aucune péripétie ne retient l’attention du public plus d’un seul épisode, aucun nouveau ou jeune personnage ne survient pour rompre l’ennui, les recettes publicitaires sont statiques, limitées aux institutionnels. Pourtant, son succès à lui, est constant. C’est pourquoi cet homme quelconque, aussi dénué de charisme que du sens de l’État, habitué à être courtisé à l’instar d’un président de superpuissance, s’accroche bec et ongle à sa sinécure.

Puisqu’il lui revient d’écrire les épisodes suivants, il privilégie sa seule valeur sûre : son poste.

Pour autant, les producteurs lui ont bien expliqué que la série devait être politiquement correcte, aussi doit-il, à chaque épisode, prétendre que ses échecs innombrables n’ont toujours qu’un seul et même responsable : l’État juif. Faute de quoi, les annonceurs institutionnels abandonneront, eux aussi, le mécénat et la chaîne passera à un autre soap.

Le présidictateur a donc trouvé l’argument de cette énième saison, intitulée « les élections n’auront pas lieu » : la condition sine qua non pour la tenue des élections est que des isoloirs soient installés à Jérusalem-Est. Cette condition non négociable fait probablement l’affaire d’Israël, pour qui la victoire du Hamas serait une catastrophe. Or plus Abbas est corrompu, plus les électeurs sont tentés par le vote extrême et aucun front républicain n’est disponible pour l’empêcher, puisque tous les opposants sont en prison.

Il n’y a que deux solutions, l’une impossible, l’autre mauvaise

La première serait qu’Abbas soit touché par la grâce et se mette à tenir compte de son peuple. Inenvisageable. L’autre solution est qu’Israël installe les fameux isoloirs sur son territoire, mais le Hamas sera élu haut la main et aura encore plus d’opportunités qu’actuellement pour livrer sa guerre asymétrique.

Partant du principe que mieux vaut un Abbas que deux tu auras le Hamas, Israël a donc donné l’alibi nécessaire à l’octogénaire de Ramallah, en refusant d’ouvrir des bureaux de vote à Jérusalem-Est. Le scénario s’est déroulé comme prévu : pour que ses 150 000 administrés de Jérusalem ne soient pas privés d’isoloirs, Abbas a supprimé les urnes de quatre millions et quelque d’électeurs.

Il a même déclaré que

« organiser des élections à Jérusalem sans ces 150 000 électeurs serait un retour au plan de paix de Trump (Jerusalem Post) ».

On imagine difficilement défaite plus cuisante !

Abbas a évidemment pleurniché auprès de l’Union européenne pour qu’elle influe sur Israël, tout en croisant les doigts pour qu’elle ne réussisse pas. Car il n’a absolument aucune chance.

En sus de la liste unique Hamas (l’avantage de la dictature, c’est qu’elle n’a pas à se soucier d’une opposition), trois listes se partageraient les éventuels suffrages des supporters du Fatah : celle d’Abbas, celle de son challenger renégat, Muhammad Dahlan, qui vit dans les Émirats et celle de Marwan Barghouti, le chouchou des Français, en prison pour meurtres (au pluriel). Non seulement le Fatah se prendrait une dégelée monumentale, mais la propre liste du président arriverait probablement la dernière. Inacceptable !

Notons au passage que la grande majorité des Arabes de Jérusalem ne s’est même pas déplacée lors des élections présidentielles de 1996 et de 2005, ni lors des législatives de 2006, alors qu’Israël n’était pas coupable de rétention d’isoloirs. Selon l’analyste arabe musulman, Bassam Tawil (Gatestone), ils se sont abstenus parce qu’ils ne voulaient pas faire partie du système politique palestinien. Ce faisant, ils montraient le peu de confiance qu’ils portaient à Yasser Arafat (en 1996) et à son successeur, Mahmoud Abbas pour les suivantes. Pire, même, ils actaient qu’ils préféraient vivre sous souveraineté israélienne que sous corruption palestinienne.

Pronostics

Certains prévoient l’enchaînement habituel :

1) Abbas annule les élections et en accuse Israël.

2) Le Hamas ne supporte pas de voir la victoire lui passer sous le nez, il a sa réaction habituelle : il tire des roquettes sur Israël depuis Gaza.

3) Le Jihad islamique se joint à la mitraille et ajoute ses propres roquettes.

4) Après une période de retenue, Israël riposte.

5) Les Palestiniens multiplient les attaques : escalade.

6) Les chancelleries accusent Israël et l’ONU multiplie les résolutions contre lui.

C’est l’hypothèse d’Aryeh Savir, de Tazpit News Agency (Jewish Press).

Hillel Frisch, professeur d’études politiques et spécialiste du Moyen-Orient à l’université Bar-Ilan, également chercheur associé au Centre Begin-Sadat d’études stratégiques, est d’un avis contraire. D’après lui, Abbas est entre le marteau de sa population, s’il annule les élections et l’enclume de la victoire du Hamas, s’il les maintient. Pourtant, le professeur Frisch pense qu’une intifada est peu probable. D’après lui, il ne fait aucun doute que le Hamas fera tout ce qui est en son pouvoir pour en fomenter une dans les territoires contrôlés par Abbas, si les élections sont annulées. Abbas, de son côté, continue d’arrêter et de harceler les dirigeants et les partisans du Hamas et ses promesses de réembaucher ou d’indemniser les salariés licenciés pour cause de soutien du Hamas n’ont pas été tenues. Les conditions d’une intrafada sont réunies… quoique ni plus ni moins que depuis 2007. Mais il estime que le Hamas a d’autant moins les moyens de ses ambitions que le Covid a affaibli ses troupes et son aura (Begin Sadat Center).

Pari gagnant

Nous ne savons pas s’il y aura une Intifada, une Intrafada ou rien. Mais nous partageons à 100 % la conclusion du Professeur Frisch, à savoir que Mahmoud Abbas et le Hamas s’accorderont au moins sur un point : le fait que seul, Israël est responsable de l’échec de l’expérience démocratique des Palestiniens depuis un quart de siècle et de celui de leur mouvement national centenaire itou.

Le professeur Frisch n’est pas spécialiste de l’Hexagone (qui, en matière d’opinions honorées par les médias, va du Quartier latin au 9-3). Il ignore donc probablement que le consensus Fatah-Hamas sera largement majoritaire dans la France multiculturelle. La haine du Juif y est la seule chose qui rassemble toutes les intersectionnalités victimaires, de l’extrême-gauche à l’extrême-droite. LM♦

Liliane Messika, MABATIM.INFO

Un commentaire

  1. Mathusalem Abbas, bien vu Liliane.
    C’est dans les vieux pots (de vin) qu’on fait la meilleure soupe

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