La vérité, ils mentent

Par Liliane Messika 
[20 août 2024]

Il est pas vrai, mon poison1 ?

« Le contraire de la vérité est la fausseté : quand elle est tenue pour vérité, elle se nomme erreur. » (Emmanuel Kant).

Il fut un temps où les clients du Café du commerce, plus modestes que Kant, utilisaient « mensonge » comme antonyme de vérité. Aux temps modernes, qui ont commencé à la naissance de chaque jeune sujet parlant et qui se terminent à minuit, « opinion » en est un synonyme et tout est égal à tout, si bien que « vérité » ne s’accompagne pas d’un article, mais toujours d’un pronom possessif.

Comme la laïcité, la vérité est devenue un couteau de Lichtenberg : enlevez la lame et le manche, il reste le concept, avec lequel on ne peut pas couper du pain. Enlevez la réalité et la reproductibilité, il reste le concept de vérité, avec lequel on ne peut ni raisonner sur un objet, ni se parler comme sujet.

« Les faits sont complètement démentis par notre opinion », se vantent les Nouveaux bas du Front. La triste vérité, c’est que ce sont les démocraties qui ont pris ce tournant depuis l’avènement d’Internet et, plus spécifiquement, des réseaux asociaux, dont on ne sait s’ils sont la poule ou l’œuf de la victoire des émotions sur la raison.

La vérité étymologique était constituée de trois éléments : la réalité, un énoncé et le logos de l’individu qui l’exprimait.

Aujourd’hui, la réalité est considérée comme un avatar évolutif et facultatif : à l’instar du sexe ou de la coupe de cheveux, les vérités évoluent au même rythme que la mode. Elles prennent la forme d’idéologies mouvantes, qui orbitent à des distances plus ou moins éloignées des faits sur le terrain, en fonction de la direction du vent et de l’âge du capitaine.

Il n’y a plus de mensonges, seulement des contre-vérités

Le corollaire est qu’il n’y a plus non plus de vérité, et que les contre-mensonges, tentatives de réinformation par rapport à une « vérité » arachnéenne (traduction littérale de « web »), sont inaudibles par les médias et donc par le public.

On connaissait la realpolitik, qui obligeait les décideurs à des contorsions morales au profit du plus grand bien, mais on est passé au stade de l’inversion : les agressions terroristes sont devenues des « actes de résistance », les violeurs et massacreurs de bébés sont fêtés en héros, les universités défendent les théoriciens de la Terre plate et les politiciens parlent de vertu en donnant des consignes de vote pour le vice.

Exemple emblématique, le flirt de l’USA, hyperpuissance capitaliste moderne, avec l’Iran, puissance moyenâgeuse riche d’or noir, mais anti-matière grise, arc-boutée sur un délire de conquête de la planète tout entière.

L’hyperpuissance pourrait ne faire qu’une bouchée du royaume de l’intrigue, mais elle s’en empêche et donne à son adversaire toutes les verges pour la battre.

En vérité, de quoi s’agit-il ?

La République Islamique d’Iran, qui est considérée, dans le rapport 2023 des États-Unis sur le terrorisme2, comme un des plus solides soutiens du terrorisme international, a néanmoins été courtisée par le président Joe Biden, dès qu’il a pris ses fonctions en 2021. Depuis lors, les mollahs ont attaqué les troupes américaines au Moyen-Orient plus de 170 fois3, ce qui leur a permis de contrôler la Syrie, l’Irak, le Liban, le Yémen et la bande de Gaza, en plus de leur mainmise impitoyable sur leur propre population.

La vérité sur le terrain n’a pas influencé les décideurs démocrates étatsuniens, qui ont continué à croire, contre vents et marée, que si l’Amérique était plus gentille, plus généreuse et plus conciliante, l’Iran deviendrait une démocratie exemplaire.

C’est à cette interprétation irréelle qu’il faut attribuer les condoléances envoyées par l’administration Biden, mais aussi par l’Union européenne, à la mort du Président Ebrahim Raïssi, alias le « boucher de Téhéran4 ».

Avant d’être élu président de la République islamique, Raïssi était procureur adjoint du tribunal révolutionnaire et membre de la « commission de la mort ». Son surnom de boucher lui avait été attribué à la suite de sa première action d’éclat : l’organisation d’exécutions de masse, au cours desquelles plus de 5 000 Iraniens, dont des enfants et des femmes enceintes, avaient été assassinés. Élu la même année que Biden, Ebrahim Raïssi avait déclaré qu’il était un « défenseur des droits de l’homme depuis le début de son mandat dans le système judiciaire et qu’il devrait être félicité pour ses actions. 5»

Cette déclaration cynique n’a pas été contestée et elle a probablement contribué à propulser l’Iran à la présidence du Forum social du Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU6 en novembre 2023… Paradoxe ? Oxymore ? Ni l’un ni l’autre. En vérité, un simple mensonge.

Alors que Trump avait aggravé les sanctions contre l’État voyou, entamant largement sa capacité à développer la bombe atomique qu’elle destine au Petit Satan (Israël) et au Grand Satan (les USA), l’administration Biden les a levées, ce qui a permis au régime iranien d’engranger des bénéfices estimés à 100 milliards de dollars : plus que le budget annuel de la Grèce ou de l’Irlande !

« Si le volume quotidien moyen des exportations de Téhéran était resté le même que lorsque la politique de pression maximale de Donald Trump était en vigueur de mai 2019 à janvier 2021, le régime aurait eu 40 milliards de dollars de moins à dépenser pour les missiles balistiques et les groupes mandataires.7 »

C’est Raïssi qui avait resserré les liens de son pays avec la Russie et la Chine, fournissant à la première des missiles balistiques et des drones d’attaque, et à la seconde des milliards de tonnes de pétrole.

Dans un autre dossier du Département d’État, le Président Biden a proposé un accord entre le Hamas et Israël, qui ne bénéficiait qu’au premier, tout en réaffirmant son « soutien inébranlable et son amitié sincère à l’égard » du second8. En termes de « vérité », il faudrait vérifier si ce terme concerne le dire ou le faire, puisque la version hamastique que Biden poussait alors Israël à accepter n’exigeait pas que le groupe terroriste à l’origine de la guerre soit chassé du pouvoir. Il était pourtant évident (et judicieux) que cet objectif soit prioritaire pour l’agressé.

Mais l’hyperpuissance ne contraint que ses alliés, pas ses ennemis :

« Un haut responsable américain a, lui, parlé d’un »accord détaillé de quatre pages et demi » (sic), qui correspondrait, avec quelques  “ajustements mineur”, (re-sic) à ce que le mouvement islamiste palestinien s’est d’ores et déjà dit prêt à accepter.9 »

Il fut un temps où les États-Unis étaient une puissance respectée, qui respectait sa parole. On parle de l’époque où Eisenhower n’a pas exigé des Alliés qu’ils signent un accord autorisant Hitler à rester au pouvoir. Malgré tous ses mensonges et ses tentatives d’apaisement, Biden s’est retrouvé indigent comme dirigeant, quand le Hamas a refusé cette énième génuflexion… et les suivantes, d’ailleurs.

Khaled Mashaal, le plus haut dirigeant politique du Hamas, a expliqué verbatim, dans une interview, sa position vis-à-vis de la « solution à deux États10 » que Biden et Macron veulent absolument imposer à Israël, persuadés (idéologie), contre toute réalité (vérité), que c’est également le vœu des Palestiniens :

Et de poursuivre, sur la même lancée :

« Après le 7 octobre, les espoirs d’une Palestine du fleuve à la mer et du nord au sud, de Rosh Hanikra à Eilat, ont été renouvelés. C’est également devenu un slogan scandé aux États-Unis et dans les capitales occidentales : « la Palestine sera libre du fleuve à la mer ». »

Beaucoup moins intelligent que Machiavel, mais tout aussi abrupt, il a admis que son mouvement avait digéré tous les appâts que lui proposaient les démocraties et recraché l’hameçon. La stratégie des Occidentaux consistait à croire en l’infinie bonté intrinsèque des terroristes, celle de Mashaal était à l’opposé, toute en taqiya (dissimulation et mensonge au service de l’islam) et hudna (trêve tactique) :

« Afin d’établir un terrain d’entente et un plan palestinien commun avec les autres forces palestiniennes, et en accord avec la position des autres pays arabes, le Hamas a accepté la création d’un État palestinien indépendant dans les frontières de 1967, avec Jérusalem comme capitale et le droit au retour, sans reconnaître la légitimité de l’entité sioniste.

Cette position visait à faciliter, à ce stade, un accord palestinien et un accord arabe, mais sans renoncer à aucun de nos droits ni à aucune partie de notre terre et sans reconnaître Israël. Notre vision reste inchangée. »

Le pogrom du 7 octobre s’inscrivait dans cette stratégie, qui sera suivie d’autres crimes de la même amplitude et qui vise, une fois que le monde entier aura été débarrassé des Juifs, à entreprendre le même nettoyage ethnique vis-à-vis des chrétiens.

« Le 7 octobre a renforcé cette conviction, a réduit les désaccords et a transformé l’idée de libérer la Palestine du fleuve à la mer en un projet réaliste qui a déjà commencé. Ce n’est pas simplement quelque chose à attendre et à espérer. Cela fait partie d’un plan, d’une stratégie et nous en sommes très proches, Inch Allah. »

De deux choses l’une, ou bien Mashaal ment : il veut la paix en prétendant vouloir la guerre. Mais pourquoi ferait-il cela, puisque ses sponsors croient voir du miel et des pétales de roses sortir de sa bouche avec des paroles de paix ?

Ou alors il dit la vérité et indique clairement qu’il n’arrêtera le terrorisme qu’après avoir éliminé le dernier juif de « sa terre ». Dans ce cas, comment appeler la manœuvre des chancelleries occidentales qui menacent Israël pour qu’il souscrive à des « plans de paix » fantaisistes, alors qu’ils savent l’État juif visé par un projet génocidaire, que le Mouvement de résistance islamique ne cherche pas à cacher ?

En 2019, ce n’était pas Mashaal mais un ancien ministre du Hamas, Fathi Hammad, qui haranguait la foule :

« Il y a des Juifs partout, et nous devons attaquer tous les Juifs du monde en les massacrant et en les tuant, avec la volonté d’Allah11 ».

La même année (le 4 novembre), Yahia Sinwar, le chef du bureau politique du Hamas, préparait déjà l’opération Déluge d’al-Aqsa :

« Nous avons des centaines de kilomètres de tunnels souterrains, des milliers de pièges, des milliers de missiles antichars ; nous écraserons Tel-Aviv.12 »

Et après le 7 octobre 2023, Fathi Hammad à nouveau :

« Le Hamas répétera son attaque, telle qu’elle a été menée le 7 octobre, jusqu’à ce qu’Israël soit détruit. Le Déluge d’Al-Aqsa n’était que le premier. Il y en aura un deuxième, un troisième, un quatrième. Allons-nous payer le prix pour cela ? Oui, et nous sommes prêts à le payer. Nous sommes une nation de martyrs et nous sommes fiers de sacrifier des martyrs13 ».

Article 7 de la Charte du Hamas :

« Le jour du jugement n’arrivera pas avant que les musulmans ne combattent les juifs et ne les tuent. Les juifs se cacheront alors derrière des rochers et des arbres, et les rochers et les arbres crieront : “Ô musulman, il y a un juif qui se cache derrière moi, viens le tuer”. »

Complicité de meurtres

Que les islamistes cherchent à tuer tous les Juifs n’est un secret pour personne, car le Coran les y engage sous peine de sanction.

Comment qualifier l’attitude des dirigeants des démocraties occidentales, face au texte de la charte du Hamas que leurs services de renseignement ne manquent pas de leur mettre sous le nez, traduit et surligné ? En commençant par son préambule :

« Israël existera et continuera d’exister jusqu’à ce que l’islam l’anéantisse, comme il en a anéanti d’autres avant lui » et sa devise : « Le Mouvement de la Résistance islamique est l’une des ailes des Frères musulmans en Palestine. […] Dieu est son but, l’Apôtre est son modèle, le djihad, son chemin et la mort sur le chemin de Dieu la plus éminente de ses espérances.14 »

Article 13, chapitre III :

Au temps pour la solution à deux États, que les chancelleries veulent imposer à l’État hébreu, comme si cela pouvait les protéger, eux, une fois accomplie cette étape de la conquête mondiale. Article 31 du chapitre VII :

La vérité tout court était sortie de la bouche de Yahia Sinwar le 7 juin 2024 : il voulait bien signer l’accord que Biden tentait de lui faire avaler, à savoir qu’il acceptait un cessez-le-feu, mais il n’était pas question qu’il dépose une seule arme. L’accord n’aurait engagé que l’armée israélienne et il aurait perduré, même dans le cas où le Hamas aurait repris les hostilités.15

Logique et vérité

Un Martien de passage serait interloqué par l’absence de réaction des « arbitres » auto-proclamés, face aux déclarations de guerre éternelle d’une des deux parties, et par leur persistance à ne vouloir influer que sur l’autre partie, celle qui a subi le pogrom originel pour obtenir d’elle qu’elle cesse de se défendre.

Le Martien, qui croit les démocraties occidentales fondées sur la morale judéo-chrétienne, doit admettre qu’il faut la mettre de côté pour comprendre ce qu’il voit, c’est-à-dire une lâcheté humaine classique. L’arbitre veut permettre au plus puissant (un milliard et demi de musulmans propriétaires de la plus grande partie de l’or noir de la planète) d’exterminer le plus faible (le petit État juif, dénué de matière première, abritant la moitié du peuple juif de la planète, soit 8 millions d’individus) dans l’espoir d’être épargnés par le djihad.

Ce choix est d’autant plus pervers qu’Israël est, comme les États-Unis, une démocratie, alors que leurs ennemis sont tous des dictatures théocratiques. Les « arbitres », en particulier le Président des États-Unis, doivent donc trouver une stratégie qui leur permette de résoudre la dissonance cognitive entre leurs valeurs exprimées et leurs actions qui sont contraires à ces valeurs.

Cette stratégie est le refoulement.

Au XIXᵉ siècle la dissonance cognitive qu’il s’agissait de réduire était celle entre le désir sexuel universel et le socialement correct qui en avait fait un tabou. Les « honnêtes hommes » de cette époque espéraient qu’en ne parlant jamais de la sexualité, leurs pulsions sexuelles finiraient par disparaître dans les hautes valeurs morales.

Les hommes du XXIᵉ siècle espèrent qu’en ne parlant jamais des tendances criminelles de l’islam, celles-ci finiront par se dissoudre dans une modernité bienveillante, accueillante et ouverte. On voit avec quel succès…

« Vérité » et « objectivité » ne sont pas plus synonymes que « Droit » et « Justice »

L’objectivité consiste à relater les faits sans les juger ni préjuger de leurs causes ou de leurs conséquences. La vérité implique une dose de croyance de la part de celui qui l’énonce et qui est persuadé de décrire objectivement un fait ou un événement. Mais l’objectivité oblige à rappeler que lorsque la police interroge les témoins d’un accident ou d’un crime, ceux-ci n’ont pas vu exactement la même chose ni la même chronologie. Pourtant, tous disent la vérité, c’est-à-dire le réel tel qu’ils l’ont appréhendé.

L’idéologie est un filtre qui éloigne plus ou moins la réalité du témoin. Comme la religion, elle ordonne le réel selon une pré-interprétation. C’est ce qui explique que, parmi les Palestinolâtres, seuls les individus qui ont été directement victimes des crimes contre l’humanité du Hamas, ont changé d’avis sur la nature ontologiquement innocente des actes de leurs protégés, alors que nombre de ceux qui les ont seulement vus sur les réseaux sociaux, où les criminels les ont eux-mêmes diffusés, continuent de prétendre qu’ils ne représentent pas la « vérité ».

La vérité est comme la démocratie et la liberté : ce n’est pas une valeur universelle

Ni l’une ni les autres n’ont cours dans l’islam (soumission en français), pour lequel seuls comptent le licite (halal) et l’illicite (haram).

Ce qui est licite est ce qu’a dit ou fait Mahomet. Ce qui est illicite est tout le reste.

Le devoir de tout musulman est de faire advenir un califat mondial où régnera la charia. Cela signifie que tout acte de la vie qui n’est pas halal sera durement sanctionné par la police des mœurs ici-bas (comme c’est le cas en Iran ou en Afghanistan) et le jour du Jugement dernier partout ailleurs.

Pour éviter que la honte de l’acte haram s’étende à la famille et à l’entourage de l’individu qui le commet, le crime d’honneur est halal. Il est imposé dès l’enfance par « un discours suprémaciste qui vise à distinguer les musulmans du reste de l’humanité.16 », explique Florence Bergeaud Blackler, spécialiste de l’islam en général et des Frères musulmans (maison-père du Hamas) en particulier.

Après la guerre, l’amour

Depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, la paix a pu s’installer entre la France et une Allemagne dénazifiée. L’Europe ne souffre d’aucun conflit armé et les adolescents que taquinent les montées de testostérone n’ont plus d’idéal à atteindre, ni de Misérables à sauver. Même le monde bipolaire issu de 1939-45 fait aujourd’hui défaut : l’Allemagne est réunifiée, elle forme avec la France un « couple », dont les enfants ne s’intéressent qu’à leurs droits et répugnent aux devoirs.

En 2003, un film allemand, Good bye Lenin17, mettait en scène une Berlinoise de l’est qui avait passé la transition de 1989 dans le coma. Lorsqu’elle s’est réveillée au bout de huit mois, ses enfants ont voulu lui épargner un plongeon trop brutal dans la société capitaliste, aussi ont-ils reconstruit autour d’elle son univers familier et prétendu faire revivre la RDA dans l’appartement, remis aux normes socialistes. La vérité de leur mère continuait donc provisoirement d’exister alors que le réel l’avait éliminée.

Cette fable sur la vérité préfigurait le déni obstiné des Européens devant l’agressivité des puissances qui les égalent, puis les dépassent économiquement, politiquement et militairement.

Or, c’est justement d’Allemagne qu’est venue la première prise en compte du réel, par la bouche de son ministre de la défense, Boris Pretorius, le 7 juin 2024, qui a admis la vérité :

« Nous devons assurer la dissuasion pour éviter que les choses n’en arrivent à l’extrême. Nous devons être prêts pour la guerre d’ici 2029. […] (N)ous ne devons pas négliger notre propre défense et notre préparation opérationnelle. L’économie de guerre de Poutine travaille à l’élaboration d’un nouveau conflit.18 » Les dirigeants français se sont bouché les oreilles avec succès et ils peuvent continuer d’ânonner leur vérité pacifiste en chantant « qui a peur du grand méchant loup, c’est pas nous ».

« Dis-moi de quoi tu accuses les Juifs, je te dirai de quoi tu es coupable » (Vassili Grosman)

Le 7 octobre 2023, le Hamas a procédé à un pogrom dans les localités juives entourant la Bande de Gaza, côté israélien. 1200 morts, 4500 blessés et mutilés, 240 otages, des viols et des mutilations par centaines, des enfants ligotés ensemble et brûlés vifs, des femmes enceintes éventrées et des fœtus décapités…

Israël a entrepris, trois jours plus tard, une opération en plusieurs étapes pour éliminer le Hamas et ses infrastructures.

En visite en Australie, le colonel Richard Kemp, qui a commandé les troupes britanniques en Afghanistan, a remarqué les précautions prises par les Israéliens pour limiter au maximum les victimes collatérales :

« les Forces de Défense d’Israël ont probablement tué environ 0,8 civil pour chaque soldat du Hamas, alors qu’en Afghanistan et en Irak, les ratios étaient de cinq pour un, trois pour un. Les mesures que prend Tsahal n’ont jamais été prises par aucune autre armée dans l’Histoire19 ».

Ça, ce sont les faits.

Les médias et les militants de l’antisémitisme palestiniste les ont transformés en événement, c’est-à-dire qu’ils ont ajouté un élément métaphysique aux faits bruts. L’événement est devenu un « génocide » qui conduit les Juifs à exterminer sans raison le peuple des civils palestiniens innocents.

C’est ce que croient réellement les étudiants de par le monde, qui réclament la « libération de la Palestine du fleuve à la mer », c’est-à-dire sur toute la superficie de l’État juif.

Cette exigence n’est considérée comme ce qu’elle est en vérité, c’est-à-dire un appel au génocide des Israéliens, que par les mauvais esprits qui s’en tiennent encore aux faits.

Ce n’est plus le cas en France, en tout cas pas dans les lieux où l’on est censé apprendre à réfléchir, notamment à Science Po ou à l’École Normale. Dans ce dernier établissement, la cérémonie de remise des diplômes a pris la forme d’une manifestation anti-israélienne, dont un rare témoin résistant a dénoncé « l’absence totale d’esprit critique et l’antisémitisme abject des propos assenés comme des vérités qui se passent de preuves réelles et de faits concrets20» ainsi que l’omission volontaire de tout ce qui avait précédé les représailles israéliennes.

La post-vérité est à la vérité ce que le vaudou est à la science

Ces mensonges et omissions n’ont pas été relevés par la direction de l’École Normale, par lâcheté, certes, mais aussi parce que, avec le wokisme, nous sommes entrés dans l’ère de la post-vérité. Autrefois, on parlait de « mensonge » ou de « prendre ses désirs pour la réalité ». Aujourd’hui nous disposons d’un « concept selon lequel nous serions entrés dans une période (appelée ère de la post-vérité ou ère post-factuelle) où l’opinion personnelle, l’idéologie, l’émotion, la croyance l’emportent sur la réalité des faits.21 »

Le Hamas l’a bien compris. Dès l’origine de son opération meurtrière, il avait prévu à la fois la barbarie, sa diffusion et son déni.

« Les commandants du Hamas ont donné des instructions le 7 octobre, en citant des versets du Coran et en évoquant des cas héroïques de l’histoire islamique, dans lesquels des soldats célèbres ont décapité et amputé des membres des ennemis pendant la bataille. »

L’armée israélienne a retrouvé des documents enjoignant aux assaillants de diffuser largement leurs faits d’armes :

« Il faut assurer une retransmission en direct de l’assaut et de la prise des avant-postes et des kibboutzim. Le (département) de l’information de la brigade a l’autorisation de télécharger la photo (sur Internet). Vous pouvez emporter avec vous des drapeaux de pays arabes et islamiques pour les brandir dans les avant-postes et les kibboutzim.22 »

Ce qui n’empêchait pas le Hamas de nier, a posteriori, avoir commis le moindre crime. Un document officiel daté de janvier 2024 affirmait que l’attaque du 7 octobre n’avait visé que des sites militaires, afin de capturer des soldats pour les échanger ensuite contre des prisonniers palestiniens. « La religion islamique interdit de nuire intentionnellement aux femmes, aux enfants et aux personnes âgées. Le Hamas, en tant que mouvement discipliné, suit ces règles. » Et les démocraties internationales ont opiné du chef en chœur, car elles ont été cuites à la recette grenouilles dans un moule disciplinaire.

La post-vérité fait l’impasse sur la vérité et sur ses preuves. Cela n’a pas trompé un professeur de l’Université militaire fédérale de Munich, Michael Wolfson, qui a résumé :

« Le Hamas a une idéologie moderne visant à exterminer les Juifs. »
Et d’ajouter que
« les étudiants en Europe et aux États-Unis qui expriment leur identification au Hamas expriment en fait leur solidarité avec les valeurs  des Einsatzgruppen23 nazis ».

En vérité, ils nous le disent, mes frères

La démocratie est contraire à la volonté d’Allah et la guerre est son remède.

D’après al-Zarqaoui24, le nouveau Ben Laden, la démocratie donne aux citoyens tous les pouvoirs, dont le législatif, alors que selon Allah, « la souveraineté ne peut être que divine. » La démocratie postule la liberté de croyance. Or dans l’islam, « si un musulman se rend coupable d’apostasie en se convertissant de l’islam à l’hérésie, il doit alors être tué. » Elle suppose une souveraineté populaire, notamment la possibilité pour les hommes de rendre un jugement, alors que « l’arbitre est Allah et Lui seul ». Le principe de la liberté d’expression est en contradiction avec l’islam, car il s’applique aussi aux critiques d’Allah et de ses Lois. La séparation entre la religion et l’État est elle aussi incompatible avec la nature holistique de l’islam, qui régule chaque aspect de la vie du croyant.

Enfin le principe même de la démocratie, à savoir le gouvernement du peuple, est un « principe complètement erroné et non avenu, car la Vérité est, aux yeux de l’islam, ce qui est en accord avec le Coran et la Sunna ».

Quant à la guerre, si l’on en croit al-Muradi (De la politique), al-Ansari (De la conduite des guerres) et al-Abbasi (les Traces des Anciens en matière de conservation des États), la guerre est un phénomène universel hors la morale et le droit25. Elle intervient parce que l’homme est, selon Ibn Khaldoun, « travaillé par les passions de domination et instinctivement soumis à l’injustice et l’agressivité ». Al-Abbasi compare la guerre à la maladie : c’est une réponse aux maux qui affectent le corps politique, pour lesquels aucune « solution pacifique » (c’est-à-dire la conversion à l’islam) ne s’est avérée opérante. La guerre est le remède contre « un ennemi récalcitrant resté insensible à l’appel de la sagesse et de la raison ». Selon cette vision, le djihad, ou guerre juste, vient sanctionner les attitudes hostiles et belliqueuses d’un ennemi qui résiste avec persistance à la vraie religion.

Conclusion : l’ennemi de la démocratie ne ment pas, c’est la démocratie elle-même qui ne veut pas entendre la vérité. LM

Liliane Messika, Dogma

Paru dans le numéro 27 de la revue Dogma :
https://dogma.lu/wp-content/uploads/2024/08/Edition_27.pdf


1 Paraphrase de Ordralfabétix, le marchand de poissons dans Astérix : « Il est pas frais, mon poisson ? »

2 www.iranintl.com/en/202312020878

3 www.politico.com/news/2024/04/15/iran-us-troops-israel-00152161

4 www.nbcnews.com/news/world/iranian-president-ebrahim-raisi-dead-63-helicopter-cras-rcna152967

5 www.iranintl.com/en/202305292957

6 www.tf1info.fr/international/malgré-la-repression-l-iran-preside-le-forum-social-du-conseil-des-droits-de-l-homme-de-l-onu-2274953.html

7 www.fdd.org/analysis/2024/04/19/irans-oil-exports-continue-to-rise/

8 www.jcpa-lecape.org/reconnaissance-de-letat-de-palestine-une-dynamique-francaise-dangereuse/

9 www.lefigaro.fr/international/conflit-israel-hamas-ce-que-contient-le-plan-de-paix-pour-gaza-presente-par-biden-20240601

10 Vidéo sous-titrée en français – https://lphinfo.com/video-le-hamas-devoile-son-plan/

11 www.thefp.com/p/aae479f8-15d3-47cf-aafe-0af90737e5a9

12 www.memri.org/reports/hamas-leader-gaza-yahya-sinwar-israels-most-wanted-%E2 %80 %93-his-own-words-we-support-eradication

13 www.lbc.co.uk/news/hamas-october-7-attack-repeat-israel-annihilated-ghazi-hamad/

14 www.senat.fr/rap/r08-630/r08-630-annexe2.pdf

15 www.wsj.com/world/middle-east/israel-strike-un-school-gaza-94ec9a23

16 www.causeur.fr/florence-bergeaud-blackler-extension-du-domaine-du-halal-282404

17 Bande annonce : www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19467649&cfilm=52715.html

18 www.lefigaro.fr/flash-actu/nous-devons-être-prets-pour-la-guerre-d-ici-2029-alerte-le-ministre-allemand-de-la-defense-20240607

19 www.australianjewishnews.com/kemp-says-gaza-civilian-casualties-historically-low/

20 https://perditions-ideologiques.com/2024/05/30/jai-honte-detre-normalien/

21 www.larousse.fr/dictionnaires/francais/post-vérité/188379

22 https://infos-israel.news/comme-dans-lallemagne-nazie-de-rares-documents-revelent-que-cest-ainsi-que-la-methode-du-hamas-a-fonctionne-le-7-octobre/

23 Les Einsatzgruppen étaient les « formations opérationnelles » des SS, qui suivaient l’armée allemande dans son invasion de l’Europe de l’Est et qui participaient à l’extermination planifiée et systématique des Juifs.

24 www.iris-france.org/wp-content/uploads/2014/11/2007_alqaida.pdf

25 https://journals.openedition.org/extremeorient/380


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7 commentaires

  1. Hitler disait la vérité sur ses projets, les démocraties ne l’ont pas cru

    Staline mentait , elles l’ont cru

    Depuis Khomeiny les islamistes disent e qu’ils feront et font avec leurs proxys ce qu’ils disent

    Quand les démocraties vont elles comprendre ?

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  2. Les USA hormis la periode Trump tont toujours soutenu les islamistes.

    Ce fut la cas en Algérie, quand en fonction du nouveau pluralisme, le FIS fut agréé.

    La preuve : lors de ses gigantesques manifs a Alger durant l annee 89 – 90, les banderolles etaient ecrites en arabe et en anglais (pas en francais, considéré comme vehiculant un discours trop critique d el islamisme)…

    y aurait bien sur 1000 autres exemples possibles.

    JPL

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  3. Bravo !

    Quels que soient les maquillages de ses expressions, la Réalité aura toujours le dernier mot. Quelle que soit la durée de la traversée du désert où le Mot aura réussi à avoir la Réalité.

    JP Lledo

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  4. Excellent article, en effet, comme toujours avec Liliane.

    « If you beleive it, it’s not a lie » disait George dans un épisode de Seinfeld. C’était du comique volontaire.

    Le tragique de cette époque épouvantable est que je ne vois guère comment éradiquer ce totalitarisme islamique impérialiste comme ont été éradiqués communisme et nazisme.

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  5. En premier lieu, il me semble utile de rappeler que les USA ont très souvent soutenu les islamistes. Par exemple en Afghanistan, où le soutien aux islamistes a été justifié au nom de la lutte contre l’URSS. Les Talibans sont indirectement une création des États-Unis. Depuis, les exemples se sont multipliés. Aujourd’hui, l’Europe de l’ouest (où la démocratie n’est plus qu’un couteau sans manche et sans lame : elle n’existe plus hormis en tant que concept abstrait) est sous domination des islamistes et mouvements d’extrême-droite islamonazis. Jusque dans les médias, les universités et le système judiciaire. Nos dirigeants sont naturellement alliés de moult dictatures islamistes (Qatar, Turquie etc)…Or la situation aux USA (qui ne sont plus du tout une démocratie libérale) est très proche de celle de l’Europe. Les mouvements suprémacistes et islamonazis y ont également le contrôle des universités, d’une partie du monde « culturel » et ainsi de suite. Il n’y a donc pas lieu de s’etonner qu’un occident ayant sombré ou en tran de sombrer ( le degré de soumission differe en fonction des pays) dans le Nazisme islamiste collabore avec l’Iran ou soit tenté de le faire.

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  6. Un article lumineux, brillant d’intelligence, de dicernement, de connaissances,
    Le contenu certes, c’est ce qu’il faut lire, comprendre, retenir, expliquer, et c’est ce qui est l’ Important.
    Mais aussi, permettez moi de saluer l’intelligence exceptionnelle de l’Auteure.
    Merci pour votre engagement Madame.Liliane Messika !

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