Cessez-le-feu : la crainte du « jour d’après »

Maisons endommagées à Shtula, à la frontière nord

par Eliyahou Galil, Makor Richon 
[30 novembre 2024]

Ce n’est pas uniquement le Hezbollah qui nous fait peur, mais ce que nous allons rencontrer “le jour d’après”. L’arrêt des combats est temporaire. Dans une semaine, un mois ou une décennie, le Hezbollah pansera ses blessures et reprendra sa mission d’élimination de “l’entité sioniste”. Qui rencontrera-t-il, face à lui, sur la frontière nord ? »

J’ai eu connaissance d’un étrange document, adressé aux maires des localités du nord d’Israël, demandant aux autorités municipales de faire des relevés d’impacts de missiles et autres munitions que le Hezbollah a envoyés sur le Nord.

Cette demande de localisation d’éventuelles munitions non explosées m’est apparue très inhabituelle en pleine guerre. C’était un signe clair, que les quelque chose se préparait, à savoir, une sécurisation du terrain en vue d’un éventuel retour d’habitants dans le nord d’Israël. Et effectivement, quelques jours plus tard est arrivée l’annonce officielle des pourparlers de cessez-le-feu entre Israël et le Liban. Certes, il y avait des signes préliminaires, on parlait de négociations entre Israël et le Liban, d’un ultimatum lancé par les États-Unis aux deux parties, mais les habitants du nord ne s’attendaient pas à un cessez-le-feu aussi soudain.

Nous espérions une victoire sans appel et où le Hezbollah sortirait des bunkers en agitant des drapeaux blancs, les mains levées et la peur dans les yeux.

En fait le Hezbollah ne s’est pas rendu, il a donné son accord en abandonnant (apparemment) ses premières revendications maximalistes. Malheureusement après deux mois d’âpres combats dans le sud Liban, cette organisation terroriste meurtrière n’est toujours pas vaincue. Mais bon, après 14 mois d’une guerre d’usure, qui a obligé des milliers d’évacués de vivre dans des hôtels, des appartements temporaires chez la famille ou des amis, il était temps de retrouver un peu de routine et de normalité

Le cessez-le-feu est une opportunité de réapprendre la vie.

Les enfants du nord retourneront à l’école. Désormais, ils pourront sortir jouer dans les terrains de jeux, même dans un endroit où il n’y a pas d’abris à proximité. Peut-être que les entreprises pourront reprendre leur activité et se remettre de deux mois intenses d’incertitudes.

La plupart de mes voisins et connaissances ne partagent pas mon opinion. Ils ne croient pas que ce cessez-le-feu durera.

Ils ne croient pas non plus que les barbelés, les murs en béton et quelques postes de contrôle suffiront à nous séparer de Hezbollah, surtout lorsque on a vu l’inefficacité de tels dispositifs le tragique 7 octobre.

Il semble que plus on habite près de la frontière nord, moins on est satisfait de l’accord de cessez-le-feu, car il pourrait devenir permanent sans amener la fin de la guerre.

Si au centre du pays on se satisfait du cessez-le-feu, dans les agglomérations proches de la frontière on pleure.

Leurs habitants seront les premiers à souffrir du Hezbollah, le jour où il décidera de lancer une attaque surprise meurtrière.

Au-delà du cessez-le-feu se pose la question : quel sera l’avenir « le jour d’après » pour les agglomérations frontalières évacuées ?

Non seulement du point de vue sécuritaire, mais aussi du point de vue social.

– Certaines personnes évacuées ont déjà trouvé un autre endroit de vie, un autre emploi, de nouvelles habitudes. Pour ces personnes, retourner vivre sur la ligne de conflit pose problème. Pourquoi retourner vivre face à un village libanais d’où on vous tire dessus ?

– Et que feront ceux qui ont loué une maison avec un contrat d’un an ?

– Quid de ceux dont les enfants fréquentent déjà de nouvelles écoles ?

– Avec qui les enfants joueront-ils dans les communautés qui, même avant la guerre, étaient confrontées à un effondrement démographique ?

Le futur retour à la maison ne se limite pas à l’acte physique de faire les valises, de les charger dans la voiture familiale et prendre la route vers le nord du pays. Le plus important est la confrontation mentale avec une sombre réalité.

Le cessez-le-feu, s’il dure, ramènera une réalité floue et incertaine, qui prévalait avant le 7 octobre.

Nous devront recoller les morceaux, reconstruire de nouveau les communautés brisées par l’exil, mais surtout essayer d’intérioriser ce que sera cette « nouvelle ancienne » vie. Les réalisations sur le front nord ont été impressionnantes, mais le véritable test se fera sur le terrain.

Quel sera le pourcentage de personnes évacuées, qui rentreront chez elles ?

Les communautés réussiront-elles à croître démographiquement ? De nouvelles familles seront-elles absorbées par Kiryat Shmona ? Une crèche à Zarit ou un jardin d’enfants à Margaliot ouvriront-ils l’année prochaine ?

Face à tant de points d’interrogation, les habitants du nord restent dubitatifs face à un futur incertain. EG

Eliyahou Galil, Makor Richon

Traduction et adaptation : Édouard Gris


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Un commentaire

  1. Ah, il ne faut pas s’en faire. Le cessez-le-feu ne durera pas plus du temps qi’il faut pour compter la semaine. Mais, au moins, une trace restera inscrite quelque part comme quoi on a donné une chance, et elle n’a pas été saisie. On ira jusqu’au bout, même si le Liban ne sera plus que décombres, jusqu’à ce que le reste hezbolique rentre en Iran.
    C’ est une autre partie, justement, qui nous attend avec l’Iran. Mais là-bas, le peuple est prêt à nous aider à les aider, pour virer cette junte militaro-islamique…

    J’aime

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