Égypte : Contre qui s’arme-t-elle ?

Par Yves Mamou
[28 janvier 2025]

Le contraste entre ambition géopolitique et désastre économique rend le maréchal égyptien al Sissi particulièrement dangereux… pour Israël.

À la fin du mois de décembre 2024, le Département d’État (États-Unis) a approuvé la vente à l’Égypte de 555 chars M1A1 Abrams (4,69 milliards de dollars), de 2 183 missiles air-sol Hellfire (630 millions de dollars) et de munitions à guidage de précision (30 millions de dollars).

En janvier 2023, ce même Département d’État a approuvé la vente à l’Égypte de 12 hélicoptères CH-47F Chinook pour 426 millions de dollars.

En 2021, l’Égypte a acheté à la France 30 avions de chasse Rafale pour un montant proche de 4 milliards d’euros. La même année, l’Italie a livré à l’Égypte deux frégates multi-missions (FREMM). Et en 2021 encore, l’Égypte a réceptionné son quatrième sous-marin commandé à des chantiers navals allemands.

La Turquie a annoncé qu’elle fournirait à l’Égypte ses célèbres drones Bayraktar, dont la létalité a été démontrée avec succès en Syrie, en Azerbaïdjan, en Ukraine et en Libye.

Des sommes aussi massives n’auraient-elles pas un meilleur effet dans des projets économiques ?

La situation économique égyptienne n’a rien de mirobolant. L’Égypte souffre d’un taux d’inflation supérieur à 25 % et sa dette publique approche les 100 % du PIB. La démographie (106 millions d’habitants) est galopante et l’agriculture ne fournit que 60 % des besoins alimentaires du pays. Selon une note de la Banque Mondiale, le taux de chômage des jeunes sans qualification de 15 à 29 atteint 40,7 %. Mais 43,8 % des jeunes hommes âgés de 24-29 ans et titulaires d’un diplôme universitaire sont au chômage. L’emploi informel touche la totalité du secteur de la construction et la totalité de l’agriculture. Quatre femmes sur cinq ne travaillent pas.

Cette modernisation de l’appareil militaire ne correspond à aucune menace particulière, sauf…

La Libye qui a une frontière commune avec l’Égypte, est toujours déchirée par des conflits tribaux, endémiques depuis la chute de Mouammar Kadafi. Mais le risque de voir ces conflits déborder sur le territoire égyptien est nul. Au sud, le Soudan, est lui aussi aux prises avec une terrible guerre civile, laquelle n’affecte pas la sécurité des Égyptiens. Les autres pays frontaliers – y compris l’Arabie saoudite de l’autre côté de la mer Rouge – entretiennent des relations amicales avec Le Caire.

Reste Israël. Les relations sont pacifiques, mais elles sont loin d’être amicales.

L’Égypte face à la guerre d’Israël contre le Hamas

La paix avec l’Égypte dure depuis le traité de paix signé en 1979. Mais les relations entre l’Égypte et Israël sont demeurées cantonnées à des aspects diplomatiques et sécuritaires. Les échanges économiques sont faibles et les initiatives culturelles voisines du néant. Quant au tourisme, il est embryonnaire. Seuls quelques Israéliens osent aller visiter Le Caire. Un artiste ou un intellectuel égyptien qui irait à Jérusalem serait considéré comme un traître.

La guerre à Gaza a tendu les relations entre les deux pays. En janvier 2024, quand Israël a indiqué qu’il allait s’emparer du corridor de Philadelphie – la bande de terre qui sépare Gaza de l’Égypte – pour mettre un terme aux tunnels de contrebande qui alimentent le Hamas en armes et munitions, le gouvernement égyptien a menacé. Il a affirmé que cela constituerait une violation du traité de paix de 1979.

Un responsable a averti indirectement que si Israël s’emparait du corridor, « l’Égypte défendrait sa sécurité nationale et la cause centrale de la Palestine » (sic).

L’Égypte a aussi averti Israël que toute tentative d’évacuer une partie de la population de Gaza en Égypte serait un cas de rupture du traité de paix signé en 1979.

Un autre responsable égyptien a fait savoir que l’Égypte avait « détruit plus de 1 500 tunnels » le long de la frontière de Gaza, et que toute opération de contrebande était « impossible ».

La réalité est que les forces égyptiennes pourraient avoir détruit les tunnels qui leur faisaient concurrence, pour conserver le monopole de la contrebande avec le Hamas.

Quand les troupes israéliennes sont entrées dans Rafah en mai 2024, elles ont annoncé la découverte d’une cinquantaine de tunnels reliant l’Égypte à Gaza. La complicité de l’Égypte – par corruption et/ou négligence – dans la contrebande d’armes qui a permis l’attaque du 7 octobre, est une source d’embarras pour le gouvernement égyptien.

L’Égypte se prépare-t-elle à la guerre avec Israël ?

/… YM

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4 commentaires

  1. Ce « dossier » hante nos réflexions depuis plusieurs mois . Il faut lui donner une réponse. Les pouvoirs arabomusulmans n’ont plus la main sur leur population respective, tant ils les ont polarisées sur l’hainemi « judeosioniste », cela pour unir leur peuple sur l’objectif de s’en débarrasser, une fois pour toutes… Ainsi, d’éventuelles « révolutions » animées par des oppositions se verraient contrariées, affaiblies pour être l’empecheur de protéger le pays. C’est exactement ainsi que proceda le pharaon de l’ exode, en insinuant que « les enfants d’Ysraël, trop nombreux » pourraient se joindre à un éventuel ennemi, et il fallait donc l’ asservir davantage, et donc être unis face à ce danger. Sissi prépare la guerre, au cas où l’atmosphère générale serait pour la guerre dans le monde arabe, Et il voudrait en être mis en fer de lance, vu la proximité avec l’état hébreu, et sa grande frontière. Il se prépare, en faisant une acquisition militaire disproportionnée pensant, comme l’ Iran (et d’autres) que c’est le volume et le nombre qui importent. Comme toujours. Les accords de paix ? Les Traités ? Il n’y a guerre que ces Juifs pour ne point les renier. Nous sommes prêts. Nos hainemis ne nous ont jamais vus que sur la défensive. Leur courte vue ne leur laisse pas imaginer ce que serait une offensive. Ysraël, après le 7 octobre, a compris la leçon. Il vaudrait mieux ne pas le tester. Ni le tenter ?

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  2. L’Égypte se prépare-t-elle à une guerre contre Israël ? Espérons que non. Sauf erreur de ma part (je ne suis pas économiste, même si j’essaie de m’instruire sur le sujet), l’Égypte traverse une période de grande difficulté économique et financière. Dans ce contexte, une entrée en guerre serait une folie. Les dirigeants égyptiens auraient plutôt intérêt à ne pas s’engager dans une logique d’affrontement, voire à oeuvrer pour un apaisement de la situation géopolitique. A supposer, cela va de soi, qu’ils soient rationnels…

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