Comment vaincre face à un ennemi inhumain (II) : « Terroriser les barbares »

Par Pierre Lurçat
[21 février 2025]

Dans son poème programmatique, Chir Betar,

Jabotinsky avait énoncé cet impératif pour le peuple Juif : « devenir un « peuple intelligent, généreux et cruel ».

Ces mots, qui peuvent sembler énigmatiques, – rédigés il y a plus de cent ans – prennent un sens nouveau et très actuel aujourd’hui. Au-delà de l’intelligence et de la générosité qui sont très répandues aujourd’hui dans la société israélienne, c’est en effet la troisième qualité qui fait défaut à notre peuple, face à des ennemis barbares assoiffés de sang juif.

« Humains, trop humains » ! L’expression de Nietzsche décrit parfaitement le talon d’Achille d’Israël dans sa guerre existentielle contre le Hamas.

Comment triompher du mal absolu, lorsqu’on incarne le Bien et les valeurs morales léguées par Israël à l’humanité ?

La question, au-delà de ses aspects philosophiques et théologiques, a des conséquences bien concrètes qu’on peut énoncer ainsi : comment Israël, son armée et sa population peuvent-ils vaincre, face à un ennemi qui aime la mort et qui éprouve une véritable jouissance à commettre le mal ?

Dans un article éclairant publié en 2007 dans la revue Forum Israël1, le rabbin Oury Cherki abordait cette problématique, tout en montrant l’inanité de l’expression – qui revient sans cesse dans le débat public depuis le 7 octobre – de « civils innocents » à propos des habitants de Gaza :

« Dieu, Lui, juge les hommes. Il sait qui est juste et qui est injuste. Mais partir à la guerre pour tuer des coupables et épargner des innocents, c’est se tromper sur la nature même de la guerre… L’ennemi est à considérer en tant qu’entité collective, c’est une chose qui a été oubliée et qui est le symptôme d’une dégradation morale qu’il faut dénoncer ».

Dans la suite de son article, le Rav Cherki aborde également la nécessité d’être cruels face à des ennemis inhumains, en citant le Rav Kook :

« Nous savons tous que la guerre est cruelle. Les guerres bibliques l’étaient déjà. Considérez ce que dit la Torah du traitement qu’il convient d’appliquer aux Cananéens et à Amalek. Dans une correspondance avec un de ses élèves, le Rav Kook donne très succinctement les fondements d’un code éthique de la guerre. En réponse au Rav Moshé Zaidel qui lui avant demandé pourquoi la tradition impose des guerres si violentes et parfois si cruelles, le Rav Kook répondit :

Pour ce qui est des guerres, il était impossible, à une époque où nos voisins étaient des loups sauvages que seul Israël ne fasse pas la guerre, car alors, les nations se seraient réunies pour nous exterminer. Bien au contraire, c’était une chose indispensable, il fallait terroriser les barbares, en employant également des moyens cruels, tout en gardant l’espoir d’amener l’humanité à ce qu’elle devrait être. »

Ces propos du Rav Kook d’une actualité stupéfiante apportent la réponse à une question cruciale, et donnent la clé de l’attitude nécessaire de la part d’Israël pour vaincre face au Hamas et face à des ennemis inhumains en général.

« Terroriser les barbares » devrait devenir le slogan de Tsahal et d’Israël.

Au lieu de se complaire dans la posture de victimes et d’adopter des normes éthiques inspirées d’une vision chrétienne (que les nations de culture chrétienne n’appliquent pas elles-mêmes), Israël doit impérativement mettre à jour le « code éthique de Tsahal »2* en s’inspirant des propos du rabbin Avraham Kook. L’enjeu est ni plus ni moins que notre survie. PL

Pierre Lurçat, Vu de Jérusalem


1 O. Cherki, « Une éthique juive de la guerre », in Forum-Israël n. 4, juin 2007.

2 Voir aussi : Comment vaincre face au Hamas : Pourquoi le « Code éthique de Tsahal » est devenu obsolète, Pierre Lurçat

NB : Mon nouveau livre, L’étoile et le poing, Histoire secrète de l’autodéfense juive en France depuis 1967, sort ces jours-ci. Il est disponible sur Amazon et B.O.D.


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5 commentaires

  1. Il n’y a pas à faire l’apologie de la cruauté mais à prendre en compte que la guerre (ici pour Israël défensive depuis bien avant le 7 octobre) n’épargne pas les civils, mêmes amis, ce qui fut le cas lors des bombardements alliés en France notamment pour anéantir la pieuvre nazie.

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  2. Je pense qu’il ne faut pas que Tsahal soit cruel ni considérer que tous les Gazaouis sont coupables , même s’il est évident qu’ils sont nombreux à l’être. Il faut simplement que Tsahal « ne soit pas plus catholique que le Pape » et se contente d’agir comme les autres armées de pays démocratiques, comme les Etats-Unis, la France, le Royaume uni. Si Tsahal avait procédé de la sorte depuis le 8/10, la guerre serait terminée depuis longtemps. Tsahal est vraiment cruel à l’égard de certains de ses soldats morts ou blessés pour réduire le nombre de morts gazaouis. A raison, les pays démocratiques susmentionnés n’ont pas cette cruauté vis-à-vis de leur jeunesse.

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  3. Les « valeurs » modernes de l’Europe de l’ouest et de l’Amérique wokiste consistent à dire « Vous n’aurez pas ma haine » et à se laisser massacrer en tendant la joue, voire à victimiser et glorifier les bourreaux en n’accordant aucune valeur aux victimes. Haine de soi et soumission.
    Israël doit effectivement adopter des valeurs inverses de celles de cette Europe suicidaire et en voie de décomposition accélérée. C’est une question existentielle : toute générosité accordée aux islamistes représente une mise en danger des civils Israéliens. Pour protéger la vie des innocents et celle des générations futures, il faut parfois être implacable envers ceux qui vouent un culte à la mort.
    « Une justice inspirée par la pitié porte préjudice aux victimes ».

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Répondre à Est-il moral de mettre en danger la vie de nos soldats pour épargner la population gazaouie? | Boker Tov Yerushalayim Annuler la réponse.