
Par Einat Wilf,
[24 août 2025]
(Chaîne YouTube du Docteur Ouri Milstein philosophe et chercheur en histoire des conflits armés)
VERBATIM
Einat Wilf soutient qu’Israël n’a pas compris qui est l’ennemi, et c’est pourquoi nous avons mené, une guerre erronée, ce qui a également conduit à l’inaction d’Israël le terrible 7 octobre 2023.
Cette guerre erronée, dont l’essentiel n’est pas sur les champs de bataille, mais dans les studios de télévision, dans les journaux et sur Internet, car l’ennemi principal est l’idéologie palestiniste, dont le but principal est de détruire Israël.
Les leaders d’aujourd’hui sont incapables de mener cette guerre avec détermination. Il nous faudrait des leaders d’une autre trempe, à l’instar de ceux que nous avions lors de la création de l’État.
Il est indéniable que les Palestiniens ont mieux compris, que nous (Israéliens), la région dans laquelle ils vivent. Ils ont bien intégré le fait, que cette guerre ne se déroule pas uniquement sur le champ de bataille, mais aussi dans les médias : télévision, journaux, réseaux sociaux…
De nouveau Israël tombe dans le piège du Hamas, où le pays arrive non préparé à cette guerre médiatique et psychologique.
Sous les pressions internationales, résultat d’une communication bien ciblée du Hamas, l’armée israélienne, bien malgré elle est devenue un fournisseur de l’aide humanitaire à son ennemi. Alors qu’en aucun cas, les lois de la guerre, contenus dans des accords internationaux, n’obligent une armée à fournir de la nourriture, médicaments, hydrocarbures…
Par son comportement, Israël « normalise » son attitude au point de se croire obligé de se soumettre aux injonctions de la « communauté internationale »
Dans un livre écrit par Adi Shwartz et moi-même, nous présentons des bizarreries, qui obligent Israël à mener ses guerres depuis sa création il y a 80 ans.
– La première bizarrerie est que la plupart des Arabes sont du même avis, à savoir, l’éradication de l’État d’Israël et si possible de tous les juifs.
– La deuxième bizarrerie est le fait, que l’Occident, dans son ensemble, ne fait pas de pressions sur les Arabes, mais toujours sur Israël, pour qu’uniquement celui-ci fasse des concessions. On a inventé des « lois », qu’on utilise uniquement contre Israël. Comme la non intégration des « réfugiés palestiniens » dans des pays arabes où ils se trouvent, alors que partout dans le monde, suite à des guerres, il y a eu des échanges des population et en général après une ou deux générations, ces populations se sont intégrées. Pour le Palestinien le statut de « réfugié » est héréditaire et où, la quatrième génération de palestiniens vivant, par exemple au Canada, possède toujours le statut de réfugié et, quelle que soit sa situation économique, elle reçoit des aides de l’ONU.
– La troisième bizarrerie est que c’est la première fois dans l’histoire des guerres, où le vainqueur demande la paix et le vaincu exige du vainqueur une capitulation inconditionnelle.
– Et une quatrième bizarrerie est que les Israéliens ont intériorisé ces bizarreries, que de façon inconsciente ils considèrent ces bizarreries comme normales et pire, une grande partie de la population israélienne considère ces aberrations comme des « valeurs morales » d’Israël…
Il y en a bien d’autres, mais ce serait trop long de les énumérer ici. Je rencontre des officiers ou des politiques, qui soutiennent, que donner l’aide humanitaire à l’ennemi est une valeur prônée par le judaïsme. Cette folie collective peut être illustrée par cette blague juive : « on dit à un poisson, que l’eau est agréable aujourd’hui et il répond, quelle eau ? ».
J’ai longuement étudié cette anormalité, dans laquelle notre peuple est enlisé depuis des décennies et je crois, que cet état des choses a rendu possible le massacre du 7 octobre 2023. En effet, le Hamas a compris qu’il peut tirer de cette situation un bénéfice stratégique énorme, à savoir, que
Cet état d’esprit des Israéliens entraîne
un mépris vis-à-vis du Hamas.
Et il n’y a pas de meilleur avantage, pour une force militaire qui projette une attaque surprise, que d’être méprisée par son ennemi et c’est sur la base de ce mépris que l’organisation terroriste a conçu toute sa stratégie.
Nous avons vu, qu’avant le 7 octobre, le Hamas a organisé, le long de la frontière, des manifestations qu’Israël a interprétées comme demandes de la part des Palestiniens, d’obtenir plus d’autorisation de travail en Israël, élargissement des zones de pêche, permettre au Qatar d’envoyer plus d’argent, etc., etc. et
Alors nous entendons de nos politiques, qui annoncent qu’Israël est arrivé à des accords non écrits, afin de satisfaire les demandes des Palestiniens et que grâce à ces accords Israël obtient la tranquillité de la part des Gazaouis.
D’ailleurs, deux jours avant ce jour terrible du 7 octobre, étaient des journées les plus tranquilles, sur les frontières de Gaza, depuis des semaines ou même des mois.
De ces deux jours, le gouvernement et l’armée ont tiré des conclusions, que la tranquillité a été « achetée » à moindres frais.
Par conséquent, le commandant en chef de Renseignement militaire est parti pour quelques jours à Eilat (pointe sud d’Israël sur la mer Rouge), le premier ministre est parti en week-end dans le nord du pays, on a octroyé plus de permissions aux soldats et même on a allégé le dispositif militaire sur la frontière de Gaza, pour ne pas énerver le Hamas. Par son attitude, le Hamas a intoxiqué et a manipulé nos décideurs de façon à nous faire croire que si les Palestiniens souffrent, c’est à cause de nous (Israël). Notre comportement me fait penser à la mentalité des juifs en exil, où la faiblesse structurelle des communautés juives et l’environnement hostile ont induit un comportement effacé, de crainte des réactions violentes de la part des non juifs, sous le prétexte de se montrer trop visibles.
Cette attitude de l’exil se caractérise par une crainte inconsciente, de s’affirmer comme un État souverain, revendiquant et assumant clairement sa politique, conforme aux intérêts régionaux et internationaux.
Le problème de notre gouvernance est que nous avons deux sortes de dirigeants.
– D’un côté il y a des gens faibles, qui ne comprennent pas la nécessité absolue de conduire une politique froide, claire, réaliste et déterminée, par conséquent, ils nous abreuvent de déclarations grandiloquentes et vides de sens, avec zéro efficacité,
– ou encore des gens complètement déconnectés de la réalité et qui vivent dans une bulle, pour lesquels Israël « devrait respecter le droit international », qui à mon sens serait une capitulation de facto.
– Et d’un autre côté, nous avons, malheureusement, peu des gens qui comprennent très bien, quel ennemi se trouve face à nous. Ces personnes comprennent très bien, que si Israël prend la responsabilité d’administrer Gaza, alors quelle que soit notre activité, on accusera Israël de pires maux et catastrophes et que ces accusations seront basées principalement sur des fakenews.
À mon grand regret, ces gens sont absents parmi nos dirigeants.
Maintenant concernant les erreurs du 7 octobre.
La première et peut-être la plus grande, c’est notre définition de l’ennemi complètement erronée. À partir du moment où la compréhension de l’ennemi est fausse, quelle que soit la manière de conduire la guerre, en aucune façon la victoire ne peut être obtenue.
– Nous n’avons pas compris que le Qatar est notre ennemi au même titre que le Hamas,
– Nous n’avons pas compris, non plus, que l’Égypte se comporte à Gaza comme si c’était son propre territoire.
– Nous n’avons pas osé d’utiliser notre force armée et la diplomatie, pour mettre « l’opinion internationale » devant un fait accompli, que Gaza n’est pas notre problème, et que le monde doit se débrouiller avec l’Égypte, pour instaurer l’ordre à Gaza. Ensuite, dès le début de la guerre, nous aurions dû annoncer clairement et sans appel au monde, que la punition pour nous avoir attaqué, ce sera l’annexion par Israël, de tout territoire perdu par le Hamas.
Un jour, j’avais demandé à un habitant du kibboutz Beeri, à quelle condition il reviendrait vivre dans cette localité. Il a répondu :
« Lorsque depuis le kibboutz jusqu’au bord de la mer Méditerranée à Gaza, s’étendront des champs de pommes de terre. »
Au début de la guerre, nous avons réussi à déplacer la majorité de la population du nord vers le sud de Gaza. Et là, nous avons fait l’erreur stratégique majeure, de les laisser revenir dans le nord, contre le retour de quelques otages.
Il fallait poser au Hamas une condition sine qua non qu’« aucun gazaoui ne retournera dans le nord de Gaza, sans la libération de tous les otages.
Ce gouvernement et cette armée ont fait toutes les erreurs, qu’il était interdit de faire. Aujourd’hui, je doute qu’ils soient capables de redresser la situation, tous ces gens étaient et sont encore englué dans des conceptions erronées sur la nature et les possibilités du Hamas.
La gauche ne vaut pas mieux, car elle est d’avis d’arrêter la guerre, ce qui veut dire le retour au 6 octobre, donc capitulation sans obtenir le retour des otages. Le pire dans tout cela est que depuis 22 mois, la situation reste figée. De nouveau, nous faisons entrer dans Gaza des centaines de camions d’aide du Qatar, que moi j’appelle « les valises d’argent, déguisé en camions d’aide humanitaire », bref rien ne change.
Le Hamas est toujours au pouvoir et l’armée israélienne tourne en rond dans Gaza, car la direction politique, malgré des déclarations guerrières, hésite à donner un ordre univoque d’écraser le Hamas et obtenir la victoire.
Je considère que le Hamas est le bras armé de l’ethos palestinien.
Par conséquent, au travers du Hamas c’est aux Palestiniens dans leur ensemble que nous faisons une guerre.
En effet, tant que tous ceux qui se disent palestiniens : de Gaza, de la rive Occidentale (Cisjordanie), de Jordanie, du Liban, de Syrie… se donnent pour l’objectif suprême de détruire Israël et le Peuple Juif dans son entièreté, alors notre vrai ennemi n’est pas seulement le Hamas, mais le « peuple palestinien » dans son ensemble.
Vis-à-vis de monde entier il est plus facile de mener la guerre contre le Hamas, car « tout le monde sait, que le Hamas ce sont des méchants », alors que mener la guerre contre les Palestiniens c’est difficile puisque « tout le monde sait, que les Palestiniens ce sont des gentils ».
Je vais aller plus loin dans ma définition du réel ennemi d’Israël.
La majorité des « Palestiniens » ont un but existentiel, à savoir, l’effacement de la surface de la terre du Peuple juif en général et de l’État juif en particulier. Ce but, qui est collectif à presque la totalité du « peuple palestinien », le fédère aujourd’hui, sous une idéologie obsessionnelle : le palestinisme
… et le palestinisme est une idéologie, qui est en train de conquérir, au-delà du monde islamique, l’Occident, y compris l’Australie, la Nouvelle-Zélande et l’Amérique latine.
Donc au-delà des gens, notre guerre, oh combien plus difficile, est contre l’idéologie palestiniste et tant que cette idéologie reste vivante, notre guerre ne sera pas terminée. Elle le sera, à la capitulation absolue de l’idéologie palestiniste et que tous ceux, pour qui elle constituait le credo quasiment religieux admettent, qu’ils ont perdu leur guerre contre le sionisme.
En ce qui concerne Gaza. Il faut la diviser en trois secteurs.
– Ensuite, déplacer toute la population du nord vers le sud.
– Puis, la partie nord doit être tout simplement annexée.
Par là même, Israël placera l’opinion internationale devant le fait accompli pérenne :
Faire comprendre au monde entier,
qu’à toute agression il y a un prix à payer.
– L’étape suivante sera se retirer de la frontière Égypte/Gaza et annoncer aux Égyptiens, qu’il leur incombe de prendre en charge, leurs frères et sœurs gazaouis.
– Dans le secteur central sera créée une zone tampon sécurisée uniquement par Israël, où les villes, les infrastructures seront reconstruites (à définir par qui et dans quelles conditions). Les écoles et universités dispenseront une éducation conforme aux valeurs humaines. On créera des entreprises, on développera le tourisme, etc., etc. Dans cette zone n’habiteront que les Gazaouis qui reconnaîtront l’existence d’Israël, qui abandonneront leur statut de réfugié et le « droit au retour » et à qui on signifiera, que toute velléité d’activité subversive sera immédiatement sanctionnée par un retour dans la zone sud.
Au-delà de Gaza, la négation de l’État juif, par les Arabes qui se définissent comme palestiniens, le monde arabo-islamique, dans sa grande majorité, ne s’accorde que sur le palestinisme et son corollaire, la destruction de l’État d’Israël. Cette quasi-unanimité fait taire les quelques voix marginales du monde arabe, qui critiquent l’emprise de l’idéologie anti juive, mais surtout ces quelques marginaux ont peur pour leur intégrité physique. Cette croyance dans la justesse de leur cause, les rend patients et résilients. Bien qu’à chaque conflit avec nous, ils perdent militairement, il y a toujours quelqu’un parmi eux ou en Occident, qui leur dit soyez patients, si ce n’est pas cette fois, ce sera la prochaine.
Pourquoi je souhaite ardemment la liquidation de l’UNRWA (agence de l’ONU, exclusive aux « réfugiés palestiniens »), qui depuis qu’elle existe « verse de l’huile » sur le conflit arabe contre le sionisme. C’est cette organisation qui établit les programmes éducatifs antisémites, organise des camps d’été pour les enfants de 4 à 16 ans d’endoctrinement et de lavage de cerveaux.
Mais nous aussi nous avons nos torts. Nous avons fermé les yeux sur l’action de l’UNRWA, en se disant, laissons-les faire, de cette façon ils nous laisseront tranquilles.
Tout cela doit changer. À nous de muscler notre communication et expliquer au monde la réalité de objective du conflit entre nous et arabes palestinistes.
Afin de vaincre, nous devons entrer dans la tête de nos ennemis.
Du point de vue du Hamas, ils n’ont pas perdu ce conflit, car ils détiennent toujours les otages, ils administrent encore une bonne partie du territoire de Gaza et ils sont en train de reconstituer leurs forces pour le conflit suivant.
Tant que nous ne comprendrons pas la mentalité moyen-orientale, nous ne vaincrons pas. En fait, des le premier jour, il fallait attaquer Gaza avec violence sans précédent, fermer l’eau, couper le gaz et les hydrocarbures, il aurait fallu ouvrir les portes de l’enfer et annoncer au Hamas et au monde, que tant que le denier des otages ne rentrerait pas à la maison, aucune considération humanitaire ne nous arrêterait. Comme on dit en hébreu : « ba’al ha baït hishtaguéa », le maître de la maison (Israël) est devenu fou. Mais, puisque nous ne sommes pas devenus fous, alors nous sommes rentrés dans un cycle de négociations, d’attaques puis de retraits, une conduite brouillonne de la guerre, aide humanitaire à ennemi, etc., etc. et le tout à un prix humain exorbitant. EW♦

Einat Wilf, Docteur Ouri Milstein
Le Dr. Einat Wilf, ancienne parlementaire (Yesh Atid de Yaïr Lapid centre gauche), a été conseillère politique du vice Premier Ministre, Shimon Peres, et chercheuse au Centre d’Études du Peuple Juif.
Traduction et adaptation pour MABATIM : Édouard Gris
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excellent texte , pour resumer : la victoire amene la paix .
il faut les ecraser lourdement pour les persuader , du prix a payer et de l impossibilitė de nous detruire .
tout le reste n est que tergiversation .
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Bien parlé. Les solutions que propose l’auteur sont ce qu’il y a de mieux à faire. Sans la fermeté, on ne peut pas faire comprendre à l’ennemi que nous connaissons son jeu, et que nous ne sommes pas dupes. Israël doit être décomplexé vis-à-vis du monde, lequel fonctionne sur des bases mensongères
.
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La faute impardonnable commise par Rabin a été de continuer les négociations de Camp David, alors que Jérusalem et Tel Aviv étaient à feu et à sang, en raison des attentats terroristes meurtriers qui y étaient provoqués quotidiennement contre des civils, dans des bus, des restaurants, des discothèques, des pizzerias, etc.
Il suffisait de les suspendre le temps que les choses se calment, et d’exiger d’Arafat qu’il mette un terme à ces violences dont il était l’instigateur.
C’est au cours de ces négociations que Shlomo Ben Ami a entendu Erakat le « négociateur à vie » dire que le Temple de Jérusalem n’avait jamais existé, et que les Juifs n’avaient jamais vécu en « Palestine », avant d’ajouter qu’il ne comprenait pas les raisons pour lesquelles Israël donnait des territoires sans aucune contrepartie, cela lui paraissait très incompréhensible.
Enfin, un peu plus tard, c’est le Nobel-Terroriste qui avait qualifié le Musée de la Shoah de « Musée du Mensonge« .
Ainsi, les mendiants sans dignité ont reçu Jéricho, la première ville juive de l’Histoire, sans rien donner en contrepartie.
Ces propos sont repris dans son livre.
Oui, les accords d’Oslo ont été la plus tragique erreur commise par Israël, malheureusement, elle est irréversible.
L’autre désastre a été commis par Moshe Dayan qui n’a rien trouvé de mieux à faire que de confier le contrôle des Lieux Saints au WAQF musulman, ce qui nous empêche de prier sur nos lieux les plus saints, une folie incompréhensible et surtout, irrémédiable elle aussi.
Comment, dès lors, envisager de faire la paix avec des partenaires qui nient l’histoire du peuple juif et de ses racines religieuses qu’ils ne sont toujours pas prêts de reconnaître ???
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