Par Hervé Korchia,
[12 novembre 2025]
La conférence de Raphaël Jerusalmy du lundi 10 novembre 2025 ouvre des pistes de réflexion que l’histoire permet de compléter.
Le 7 octobre restera un traumatisme. Et dans son sillage, une question demeure ouverte. Comment Israël, pays de la vigilance permanente, a-t-il pu être surpris ?
Dans son intervention, quatre idées saillantes reviennent :
- Israël aurait laissé le Hamas se renforcer pendant vingt ans ;
- des forces militaires auraient été détournées vers la Cisjordanie ;
- des alertes précises n’auraient pas été prises au sérieux ;
- certaines décisions auraient été guidées par l’idéologie plus que par la sécurité.
Ces constats ont une part de vérité, mais ils deviennent trompeurs lorsqu’on les sépare de la réalité historique, sociétale, politique et militaire dans laquelle ils s’inscrivent.
Il est exact que le Hamas s’est consolidé depuis la prise de contrôle de Gaza en 2007.
Mais cela n’est pas le choix d’un gouvernement particulier. Des majorités de gauche, de centre et de droite ont successivement toléré ce statu quo, parfois pour éviter l’effondrement humanitaire, parfois pour acheter des périodes de calme relatif.
Le renforcement du Hamas est une décision nationale étalée sur deux décennies, pas l’initiative d’un seul homme. Sans cette chronologie, l’affirmation devient un slogan.
La critique portant sur le déplacement des forces vers la Judée et Samarie, elle aussi, exige une recontextualisation.
L’opinion internationale parle de « colons » ; Israël parle simplement de citoyens.
Protéger les civils israéliens vivant sur tout le territoire israélien est une obligation constante, quelle que soit la couleur des gouvernements.
Le problème central n’est donc pas d’avoir positionné des bataillons en Judée et Samarie, mais d’avoir sous-estimé la préparation du Hamas.
Les habitants du sud ont pourtant signalé des phénomènes inhabituels. Des postes d’observation ont transmis des alertes. Des analystes ont fait remonter des doutes. Beaucoup fut vu ; peu fut entendu.
Ce défaut d’écoute n’est pas seulement bureaucratique. Il tient au fonctionnement même du système politique israélien.
Contrairement aux régimes où le pouvoir exécutif commande verticalement les forces armées, Israël repose sur un principe de fragmentation institutionnelle :
- Le Premier ministre ne dirige pas l’armée comme le ferait un chef d’État dans un système présidentiel.
- L’état-major jouit d’une autonomie réelle.
- Le Shin Bet (sécurité intérieure), le Mossad (renseignement extérieur) et Tsahal (armée) ne répondent pas à une chaîne unique, mais à des hiérarchies distinctes, parfois concurrentes.
- À cela s’ajoute la Knesset, un Parlement proportionnel où aucun parti n’a jamais détenu la majorité absolue, rendant indispensables des coalitions instables.
Gouverner Israël, c’est composer en permanence. Décider, c’est négocier. Et dans ce système conçu pour empêcher la concentration du pouvoir, l’urgence se heurte souvent à la dispersion de l’autorité.
Le 7 octobre, ce mode de gouvernement a révélé sa face sombre. Trop d’organes pouvaient dire « non », trop peu pouvaient dire « maintenant ».
À cette fragilité institutionnelle s’ajoute une mémoire collective lourde.
Depuis trente ans, trois tentatives de paix ont retourné l’opinion israélienne : Oslo, Camp David et le retrait de Gaza.
Chaque fois qu’Israël a cédé du territoire ou tendu la main, la réponse a été faite d’attentats, d’Intifada ou de roquettes.
À cela se superpose une réalité rarement commentée hors d’Israël :
L’Autorité palestinienne rémunère les auteurs d’attentats et leurs familles, proportionnellement à la gravité de l’attaque. Pour la société israélienne, cette politique a anéanti l’idée qu’un règlement pacifique puisse reposer sur la confiance. Ce n’est pas une position idéologique : c’est une donnée psychologique nationale.
Reste un élément essentiel, que Jerusalmy évoque moins, mais que l’historien Georges Bensoussan documente depuis des années :
L’Occident – Israël compris – s’est interdit de penser le jihad comme phénomène anthropologique et culturel.
Les sociétés sécularisées, persuadées d’avoir refermé la parenthèse religieuse, n’ont pas su concevoir qu’une vision sacrée du conflit puisse encore guider une stratégie politique.
On a analysé le Hamas avec les outils de la rationalité occidentale : incitations économiques, logique de compromis, gestion du pouvoir local.
Mais le Hamas n’appartient pas à cette culture. Il est enraciné dans une cosmologie où la mort n’est pas dissuasion mais promesse. Le 7 octobre n’était pas un accident stratégique ; c’était l’accomplissement d’une vision du monde.
La conférence de Raphaël Jerusalmy n’a pas la prétention de rendre un verdict.
- Elle brise l’illusion selon laquelle le danger était maîtrisé.
- Elle montre que l’échec du 7 octobre ne peut être imputé à un chef, à une faction ou à un vote.
– C’est l’échec d’une machine d’État fragmentée,
– d’une société qui a voulu croire à la fatigue de son ennemi,
– d’une armée trop confiante dans sa technologie,
– et d’une communauté internationale prisonnière d’analyses importées d’autres conflits.
Le Hamas a annoncé ce qu’il était. L’Iran l’a nourri. Le Qatar l’a financé. L’Occident l’a sous-estimé.
Et Israël, noyé dans ses querelles internes, n’a pas voulu entendre ses propres citoyens, ses propres soldats, ses propres analystes.
La conférence de Jerusalmy, le livre écrit avec Mohamed Sifaoui et les travaux de Georges Bensoussan ne disent pas la même chose.
Mais mis ensemble, ils produisent une vérité commune : la lucidité est désormais une question de survie. HK♦

Hervé Korchia, Substack
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ephraim errera le grand islamologue explique que l universitė israelienne refuse d etudier l islamisme et le djihad ! Quand les bobos israeliens cesseront de se croire a san francisco et decouvriront l orient , nous aurons fait un grand pas en avant .n oublions pas que les kibboutznikim massacrés etaient souvent , eux meme , de doux reveurs , ignorants volontairement l ideologie de leurs voisins .
non Israel n est pas situė en scandinavie , et oui , nos voisins sont t des barbares vivant encore au moyen age .
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