Le mois de Tichri[1] recèle une durée de jours de fêtes plus grande que tous les autres mois du calendrier juif. Il contient, en outre, des solennités différentes les unes des autres par leur esprit. Concrètement, le début du mois a un caractère sérieux, voire sévère, en ce qu’il est une période de jugement. « Le 1er Tichri, tous les habitants du monde passent devant Lui comme les moutons qui sortent de leur enclos, un à un » lisons-nous dans la Michna[2] de Roch Hachana[3]. Toutes nos destinées de l’année sont sur la balance. Dix jours nous sont offerts, jusqu’à Yom Kippour où nous avons la possibilité de modifier la sentence par le retour à D-ieu.
Dès le lendemain de Kippour, nous sommes déjà affairés à la préparation d’une fête qui durera neuf jours (en diaspora) et qui est placée sous le signe de la joie. Souka[4], Loulav[5] et ses espèces, Fête de Simhat Torah[6], tout contribue à l’ambiance joyeuse, propre à la fête de Soukot[7].
On peut légitimement se demander s’il y avait une suite logique à ces différentes occasions, qui s’étalent sur une période relativement longue.
Essayons d’analyser le sens du jugement de Tichri. L’homme est jugé, certes, mais à travers lui, c’est toute la création qui est jugée. N’oublions pas que chaque année est unique, différente de celle qui se termine tout comme de celle qui suivra. Il n’y aura qu’une année 5775 dans l’histoire ! Dans l’histoire de la Création, chaque instant qui passe rapproche le monde de la réalisation de son but ultime : la révélation de D-ieu à toutes ses créatures. Ainsi dit le Prophète Zacharie (14-9) : « L’Éternel sera roi sur toute la terre, en ce jour l’Éternel sera un et Son nom un ». Ce verset est lu à l’office de Moussaf de Roch Hachana.
Or, à chaque début d’année, le monde est réévalué quant à sa position par rapport à cette échéance. Le Tout-Puissant, qui s’érige pour cette occasion en Juge Suprême, redistribue les rôles de chaque homme, l’homme étant le seul être doté de libre-arbitre, de qui on peut exiger des réalisations. Une question se pose alors : comment un individu peut-il prétendre à un jugement clément et favorable ?
La réponse est toute donnée. Celui qui se sera disposé à s’inscrire dans ce grand programme divin, méritera d’être « affecté » à cette noble tâche. Il bénéficiera par conséquent de tous les moyens qui lui seront nécessaires : vie, santé, moyens matériels, tranquillité, soutien de ses pairs.
Cette réalité étant admise, tout le mois de Tichri retrouve son sens premier. A Roch Hachana on reconnait la royauté de D-ieu, c’est même le fil rouge de toutes nos prières de ce jour. On se rapproche de Lui de notre mieux jusqu’à Yom Kippour, espérant obtenir Son pardon et être ainsi sélectionné parmi ceux qui Le serviront le mieux. Car sans le pardon, l’avenir ne peut être sereinement envisagé.
Une fois cette étape réussie, nous nous installons dans un mode de vie conforme à nos engagements de Roch Hachana et Yom Kippour : rapprocher le monde de l’ère messianique, où toutes les créatures reconnaîtront leur Créateur. La manière la plus efficace d’y arriver est de vivre notre judaïsme dans la joie. Le bonheur qui se dégage de notre mode de vie durant la fête de Soukot témoigne du grand privilège de connaître la volonté de D-ieu, la Torah, et de pouvoir fièrement la réaliser. Comme le début de l’année imprime sa marque sur le restant de l’année, alors nous aurons compris que tout au long de 5775, nous devons être des juifs heureux. Ce bonheur nous aidera à aller toujours de l’avant et à attirer d’autres coreligionnaires à suivre ce chemin. AT♦
Sources : « sifté haïm » du Rav Haïm Fridlander et divers
[1] Premier mois de l’année juive (période de septembre-octobre)
[2] Compilation écrite des lois orales (voir : http://www.archedulivre.com/content/6-michna )
[3] Jour de l’an juif
[4] Cabane
[5] Branche de palmier
[6] Joie de la Torah
[7] Cabanes