Par Liliane Messika
Au commencement…
Au commencement était le casting : d’un côté (le côté gauche), les bons, quoi qu’ils fassent, de l’autre (à droite), les méchants, quoi qu’ils fassent également.
Les médias virent que le casting était bon, qu’il leur permettait de vendre beaucoup de journaux et de se voir comme les présidents du bon goût lorsqu’ils se regardaient dans la glace en se rasant le matin.
Le deuxième jour, ils créèrent le scénario immuable et burinèrent dans le marbre les deux premiers commandements : jamais les pauvres et les faibles ne critiqueras et jamais les riches et les forts n’approuveras.
Ils virent que ce scénario s’accordait parfaitement avec leur casting et ils décidèrent que ce scénario était bon.
Le troisième jour, ils envisagèrent de séparer le bon grain de l’ivraie, mais cela impliquait de choisir des critères au regard desquels juger les actions des uns et des autres.
Ils virent que cela obligeait à des remises en question du casting et du scénario, ils en conclurent que ce n’était pas bon et ils jetèrent le bébé avec l’eau du bain.
A partir de ce moment, tout alla de travers, la réalité pointa le bout de son nez et les ventes chutèrent. Ce fut le déluge.
On réécrivit donc l’histoire.
Elle ne commençait plus avec Cro-Magnon, même plus avec Jésus-Christ, voire avec Mahomet.
Le premier jour devenait le 14 mai 1948, celui de la Katastroff, naqba en arabe, indépendance en hébreu.
Les médias eurent un peu de mal à faire comprendre pourquoi les bons, donc les pauvres, étaient ceux qui possédaient tout l’or noir de la planète, et pourquoi ils étaient les faibles, au nombre d’un milliard quatre cent millions, contre les forts, treize millions tout mouillés.
Mais comme les journalistes étaient les seuls à parler et à décider de qui ils invitaient à témoigner, ils réussirent tant bien que mal à limiter l’Histoire majuscule à sept décennies au lieu de sept millions d’années et à inverser les causes et les effets, de manière à clouer le bec aux tenants de la prise en compte des faits, des chiffres et du principe de réalité.
Pour autant, les événements devenaient de plus en plus difficiles à insérer de façon un tant soit peu crédible dans le sens du scénario.
Ainsi, début 2018 (après Jésus-Christ), cinq nouvelles se télescopèrent
- Le Président américain décida de cesser de financer l’UNRWA, l’agence de l’ONU exclusivement consacrée aux « réfugiés palestiniens ».
- L’envoyé américain rendit public le fait que l’Iran finançait le Hamas (qui contrôlait la moitié gazaouite de la « Palestine » depuis son coup d’état de 2007) à hauteur de 100 millions de dollars par an, consacrés à l’achat d’armes et à la construction de tunnels offensifs vers Israël.
- L’ONU énonça la crainte que se produise à Gaza une catastrophe humanitaire, pour laquelle elle sollicitait des donateurs.
- Le mouvement BDS (Boycott, Désinvestissement et Sanctions contre Israël) fut nominé comme candidat au Prix Nobel de la Paix par un député norvégien.
- La ville du Cap, en Afrique du sud, était à la veille de pénurie en eau.
Qu’est-ce qui liait entre elles ces cinq informations apparemment disparates ?
- L’UNRWA se distinguait en tous points du HCR,
– le Haut-Commissariat aux Réfugiés de l’ONU, qui prenait en charge les réfugiés du monde entier. D’abord, l’agence ne s’occupait que des Palestiniens.
– Ensuite, le statut de réfugié, loin de concerner uniquement les gens qui avaient quitté leur pays, était héréditaire sans limitation du nombre de générations. Étaient donc considérés comme « réfugiés palestiniens » des citoyens de n’importe quel pays au monde, qui pouvaient revendiquer un aïeul ayant vécu en Palestine mandataire pendant les deux ans précédant l’indépendance d’Israël. Dans cette catégorie, entraient les dizaines de milliers de « réfugiés palestiniens » naturalisés Jordaniens.
– Et puis aussi, les Palestiniens vivant dans les Territoires palestiniens que certains pays avaient déjà reconnus comme « l’État de Palestine », administrés par soit l’Autorité Palestinienne en Cisjordanie, soit le Hamas à Gaza, continuaient d’être « réfugiés » sur leur propre sol.
– De plus, si le statut de réfugié lambda cessait quand la personne retournait dans son pays, cela n’était pas le cas des réfugiés palestiniens qui devaient retrouver la maison-même dont était parti l’ancêtre.Une partie de l' »aide de l’Europe » aux Palestiniens – Enfin, le HCR rendait des comptes à la communauté internationale et la définition de « réfugié » excluait ceux qui avaient commis un crime. En revanche, ce n’était pas le cas de l’UNRWA, dont 30% du budget, officiel mais jamais contrôlé, servait à rémunérer les terroristes et leurs familles.
C’est ce dernier point qui avait conduit le Président des USA à geler une partie des millions de dollars que son pays versait à fonds perdu à l’UNRWA depuis des décennies.
Mais tous ceux qui suivaient encore le scénario d’origine s’en indignaient d’autant plus haut et d’autant plus fort que leur nombre diminuait. - Les USA n’étaient pas les seuls bienfaiteurs des Palestiniens.
L’Iran, dont une partie de la population était au bord de la famine, les subventionnait aussi avec cent millions de dollars annuels, mais contrairement à l’UNRWA, c’était sous condition d’utilisation pour la guerre contre « l’ennemi sioniste » et avec une obligation de résultats.
Curieusement, l’administration américaine y a vu une stratégie fort éloignée de « la paix pour deux peuples sur deux États » qui était la formule officielle des militants palestiniens en charge de la collecte de fonds.Le reste du monde s’offusqua de ce que l’envoyé américain ait osé twitter : « L’Iran a investi près d’un milliard de dollars dans le financement du terrorisme au Liban, en Israël, en Judée Samarie et à Gaza. L’argent de ces violences de plus en plus sanglantes ne fait rien pour aider le peuple palestinien. (…) Le Hamas gaspille des ressources en tunnels et en roquettes pour attaquer Israël au lieu d’aider les habitants de Gaza … »
Le reste du monde était allergique à la relation de cause à effet.
- L’ONU estimait Gaza au bord « d’un effondrement total ».
C’est par la bouche de son envoyé pour la paix au Moyen-Orient, Nickolay Mladenov, que les Nations-Unies firent ce constat. La grande nouveauté, c’est qu’Israël n’était plus stigmatisé pour cet état de fait et que le sauvetage de Gaza devrait passer par « la restauration du pouvoir de l’Autorité palestinienne sur ce territoire. »
Que doit-on en conclure de l’opinion qu’avait Mladenov du Hamas, s’il voulait en sauver la population de Gaza en la confiant à Mahmoud Abbas, été élu Président de l’AP pour 4 ans il y en a 11 ? BDS nominé pour le Prix Nobel de la Paix par un parlementaire norvégien.
« Nominer le mouvement BDS à cette reconnaissance est parfaitement en accord avec les principes que moi-même et mon parti avons très à cœur. Comme le mouvement BDS, nous sommes pleinement engagés à faire cesser une politique raciste et de droite qui se développe beaucoup trop dans notre monde, et à garantir la liberté et l’égalité pour tous », s’est vanté Bjørnar Moxnes, leader du Parti Rouge, qui représente environ 2,5% des électeurs norvégiens.
BDS (acronyme de Boycott Désinvestissement Sanctions) reproche à Israël « son système de discrimination raciale qui touche les citoyens palestiniens et qui s’avère un système d’apartheid, selon la définition de l’ONU. BDS veut également le retour des Palestiniens dans leur maison d’origine d’où ils ont été expulsés à l’occasion d’un nettoyage ethnique. » Dixit Omar Barghouti, son fondateur, interviewé pour l’Humanité le 16 janvier 2016.
Cette formulation est remarquable : un système de discrimination raciale toucherait les citoyens palestiniens ? Ceux qui vivent à Gaza, qu’Israël a quitté en 2005, ou ceux qui sont administrés par l’Autorité Palestinienne en Cisjordanie ? Ni les uns ni les autres, puisqu’Israël n’a pas son mot à dire chez eux. S’agirait-il alors des citoyens israéliens arabes ? Ceux qui sont électeurs, éligibles, députés, Président de la Cour Suprême, Miss Israël, ambassadeurs ou leaders syndicaux ? On serait curieux de voir la définition onusienne d’un apartheid qui consisterait pour la victime à ordonner la mise en prison du Président de l’État bourreau…
Quant au retour des 5,4 millions de Palestiniens recensés par l’UNRWA dans les maisons qu’habitaient les 650 000 habitants d’origine, dont 80% sont partis à la demande de leurs « frères » arabes, le temps que ceux-ci se livrent à l’épuration ethnique des Juifs, qu’en dire ? Cette exigence à elle seule montre le véritable objectif des bédéhèsseux : créer la confusion dans l’esprit des Français bien intentionnés mais ignorants.
La population israélienne se monte, en 2018, à 8 millions, dont 6 millions de Juifs (+20% d’Arabes et 6% agrégés dans la catégorie « autres »). Faire revenir 5 millions, c’est-à-dire 84% de Palestiniens en Israël serait l’équivalent pour la France de 56 280 000 d’ennemis qui souhaitent la disparition des Français. Ah, ouaiaiais…
Last but not least, pourquoi réclamer son propre État, si c’est pour ramener sa population dans l’autre État, l’ennemi ?-
Tout sauf se faire aider par Israël Il y a deux ans, une conférence avait été programmée en Afrique du Sud
Il s’agissait de trouver des solutions à la pénurie imminente d’eau dans le sud du pays. Mais « grâce à » BDS, qui s’offusquait de la participation de l’ambassadeur israélien, la conférence a fini par être annulée. Inutile de dire que, chat échaudé craignant l’eau froide, le gouvernement sud-africain s’est bien gardé depuis de contacter l’État juif, pourtant leader en matière de dessalement et de conservation de l’eau, une expertise qu’il partage pourtant volontiers.
Du coup, Le Cap, qui connaît la pire sécheresse de son histoire, va être la première grande ville occidentale à manquer d’eau. Malgré les restrictions (moins de 50 litres par jour et par personne), il est probable que la pénurie n’est pas très éloignée.
Quand la conférence de 2016 a été annulée, Radio Islam en Afrique du Sud s’en est félicitée et a interviewé un « professeur », un dénommé Patrick Bond, pour qui tout ce qu’Israël a réalisé en termes de prévention de la sécheresse est à la portée du premier enfant venu. D’après ce « spécialiste », Israël a en fait pratiqué un « apartheid de l’eau » et volé celle des Palestiniens.
Que les Israéliens soient les experts mondiaux en dessalement et en recyclage (85% de l’eau dans les villes israéliennes) n’entre pas en ligne de compte. Ou alors c’est à la portée d’un enfant.
De la même façon que l’UNRWA oublie les Palestiniens dans son acronyme (United Nations Relief and Work Agency for the Palestinians in the Middle-East), BDS oublie Israël (Boycott Désinvestissement Sanctions contre Israël).
La première ne se vante pas de ne s’intéresser qu’à une infime minorité de réfugiés, le second cherche à faire oublier que son action concerne exclusivement l’État juif et qu’il se fiche comme d’une guigne des États où les Palestiniens subissent réellement un apartheid (le Liban, par exemple), voire de ceux qui se livrent à une véritable épuration ethnique (Mali, Soudan, Yémen…).
L’important n’est ni le flacon ni l’ivresse, c’est la façon dont on s’adresse aux sentiments du public en omettant, transformant ou inventant des faits. Hips… LM♦