Par Liliane Messika
Les infatigables promoteurs français d’un État palestinien répètent qu’il sera forcément démocratique, pacifique et, cerise sur le gâteau au miel, généreusement de gauche.
Ils ne précisent jamais (et aucun journaliste ne se permettrait de leur poser une question aussi indiscrète) s’ils envisagent cette démocratie à Gaza sous la houlette du Hamas, en Cisjordanie sous celle du Président élu en 2005 pour 4 ans, ou bien les deux à la fois.
Le blocus affame les Gazaouis, pas les trafiquants d’armes
Le fameux blocus, contre lequel se mobilise tout ce que le monde occidental compte d’antisémites déguisés en humanistes, concerne en réalité exclusivement les armes et les matériaux de construction permettant de creuser des tunnels.
Pourtant, Gaza construit des piscines olympiques et des centres commerciaux. Pourtant, Gaza exporte des armes. Curieux, non ?
Cette fois-ci, c’est un Français, Romain Franck, qui a été pris la main dans le sac, ou plutôt dans la valise consulaire.
Le garçon avait le statut de « volontaire international », ne pas confondre avec « volontaire de la flottille de la paix armée », car il s’agit pour les candidats, de pouvoir bénéficier d’une « expérience professionnelle de terrain à l’étranger ».
En fait de terrain, c’est surtout les Territoires palestiniens qui l’intéressaient. L’expérience professionnelle du jeune Romain Franck et son permis de conduire lui ont donné l’occasion d’utiliser le véhicule consulaire pour aller chercher des armes au Centre culturel français de Gaza et les livrer en Cisjordanie.

Volontaire dans l’entité sioniste contre les nazis israéliens, c’est bon pour « pécho »
Chauffeur dans un consulat à l’étranger, c’est sympa, mais cela ne fait pas forcément rêver les idéalistes petites françaises. En revanche, quand le type peut se targuer de risquer sa peau au service des gentils au nez et à la barbe des méchants, cela doit lui conférer une aura pour « emballer » comme disait Guy Bedos quand il faisait encore rire. Aujourd’hui, on dit « pécho », verlan de « choper », qui révèle le degré de romantisme chez certains djeun’s.
Juste avant les attentats du Bataclan, une étudiante française qui avait alors le même âge que Romain Franck, expliquait à l’auteur de ces lignes :
« C’est normal que je soutienne les Palestiniens et que je déteste Israël : je suis née en France, j’ai été à l’école en France, je lis les informations françaises, je suis donc forcément pour les gentils, contre les méchants. C’est une question d’éducation, mais je suis contente d’avoir eu celle-là : être du côté des gentils, cela me correspond parfaitement. » (sic)
Mêmes lectures pour Mohammed Merah, les consuls français et Romain Franck ?
En 2012, le consul général de France à Jérusalem s’appelait Frédéric Desagneaux. Il avait déjà manifesté si fort son antisionisme qu’il avait encouru une « réprimande » du ministère israélien des affaires étrangères, dont le porte-parole déclarait l’État juif « choqué que le consul général français a rejoint ceux qui voudraient réécrire l’histoire à leur bénéfice et effacer le lien du peuple Juif et des Israéliens avec la Terre d’ Israël ». Le même Desagneaux montrait les dents à Hébron, dont « les habitants (…) notamment ceux de la vieille ville (…) sont, comme chacun sait, victimes de l’occupation et de l’injustice dans leurs formes les plus virulentes » (sic[1])
La même année, une petite frappe française, déjà coupable du meurtre de trois militaires, assassinait à bout portant des petits enfants dans leur école juive de Toulouse, se félicitant en direct de « venger les enfants de Gaza ».
A part le public français, personne ne sait que l’antisionisme est généralisé en France
Depuis plus d’une décennie, l’Alliance Française n’est plus située en Israël (où l’exil continu des Juifs français fait aujourd’hui dépasser le million au nombre des francophones). Elle est à Bethleem, dans les Territoires palestiniens.
Plutôt que des philosophes ou des promoteurs de paix, elle y présente des antisionistes militants, comme Alain Gresh ou Pascal Boniface.
Le titre-phare de ce dernier, Peut-on critiquer Israël, est un admirable exercice d’oxymore : l’auteur, qui a eu les honneurs de tous les médias français pour y présenter son ouvrage en long, en large et en travers, y explique qu’il est interdit de parole, de publication et d’antenne du fait de sa critique argumentée de la politique israélienne, car le tentaculaire lobby juif a fait de lui un paria.
C’est ce statut de prophète maudit, quoique largement célébré dans son pays, qui lui vaut les ponts d’or de l’Iran et d’autres démocraties éclairées adeptes des caricatures de la Shoah.
Un timing entre carotte et bâton
Le ministre des Affaires étrangères français est attendu en Israël le 25 mars 2018. L’affaire du volontaire trafiquant d’armes ne date pas d’aujourd’hui, mais c’est quelques jours avant la visite de Jean-Yves le Drian, que l’agent du consulat général de France à Jérusalem va se voir signifier son inculpation, avec huit de ses complices, pour 70 pistolets et 2 fusils automatiques passés en contrebande au cours de cinq voyages étalés dans le temps.
Le Shin Bet (le renseignement israélien) le suivait donc depuis l’origine, pour avoir comptabilisé ses allers-retours ?
Si la DGST israélienne considère l’affaire comme grave, parce qu’ont été exploités « de manière cynique l’immunité et les privilèges accordés aux représentants étrangers, pour se livrer au trafic de dizaines d’armes susceptibles d’être employées contre des civils et des membres des forces de sécurité israéliens », elle absout cependant le coupable de l’intention de leur donner la mort : ouf, il n’aurait agi que pour l’appât du gain et à l’insu du plein gré de sa hiérarchie.
L’appât du gain ? Hum, hum…
Serait-il moins grave de vouloir se faire de l’argent de poche en vendant des armes qu’en fournissant de quoi tuer des gamins ?
C’est comme les dealers : ils ne vendent de la drogue que par appât du gain, ce qu’en font les consommateurs, ce-la-ne-les-re-gar-de-pas.
En revanche, une brebis galeuse qui trafique en utilisant les privilèges de son entreprise, ce n’est pas pareil, au plan diplomatique, qu’un militant qui met trop de zèle à appliquer la politique promue par son ambassade et qui se fait pincer…
Donnant, donnant ou bien retenant, donnant ?
Si l’État hébreu lui-même sauve la mise diplomatique de la France, Monsieur Le Drian sera-t-il très gentil avec le petit Israël ?
Il est ministre des Affaires étrangères, pas de l’Intérieur.
On ne lui demande donc pas de faire en sorte que les Juifs de France soient respectés à l’instar des « Français innocents » chers à Raymond Barre. Et après tout, s’ils continuent à être tués et tabassés au seul motif de leur appartenance au peuple juif, ils seront plus nombreux à faire leur alyah, ce qui ne saurait déplaire à l’État juif…
Les relations franco-israéliennes sont-elles sur le point de se modifier ?
Vous le saurez en lisant le prochain épisode de notre feuilleton… « Le Drianix au pays des Hébreux » LM♦
[1] Dans son discours à l’occasion de l’élévation au titre de Chevalier dans l’Ordre national du Mérite de Chantal Abueisheh, présidente de l’Association d’échanges culturels Hébron-France, le 24 avril 2012.