14 juillet 2020
Repentance spectaculaire…
Après le rock’, le twist, la lambada et la macarena, la mode de l’été 2020 est à la génuflexion photogénique.
Il s’agit de convoquer la presse à grand renfort de battage puis, lorsque les objectifs et les caméras sont pointées, de s’agenouiller pendant 8 minutes et 46 secondes en affectant un air sérieux et, pour les comédiens les plus chevronnés, repentant. Ce n’est pas à la portée de tout le monde : même un bateleur comme Mélenchon n’a pas obtenu d’Oscar pour sa prestation !
Pour les Martiens qui liraient ces lignes, 8’46’’ correspondent au temps qu’il a fallu à un policier américain blanc pour étouffer un délinquant noir lors de son arrestation.
Quel rapport avec Mélenchon et ses collègues ?
Après le Covid où ils ont brillé par une inaptitude qui n’avait d’égale que celle du gouvernement, les has been de la politique française ont trouvé matière à se faire valoir en transposant la situation américaine à la France. Pour ce faire, ils ont recyclé la crise cardiaque dont est mort, lors de son arrestation mouvementée, un multirécidiviste français, issu d’une fratrie cumulant un nombre de délits et de condamnations frisant le record olympique.
Mais pourquoi s’agenouiller ? Comme le rock’ et le twist, la mode vient d’Outre-Atlantique et symbolise la repentance des Blancs, supposément coupables au nom d’ancêtres non identifiés, de l’esclavage des ancêtres de noirs contemporains, dont rien n’indique que leurs familles l’ont connu. L’essentialisation des uns dans le rôle de coupables et des autres dans le rôle de victimes répond à la définition du racisme, mais chut ! Il ne faut pas le remarquer, puisqu’on parle en novlangue dans le texte et que les mots veulent dire le contraire de leur définition.
… et aveuglement volontariste
Les esclaves, les vrais auxquels il convient d’apporter aujourd’hui la preuve de sa compassion, sont morts depuis au moins deux siècles. Ou pas ?
Ceux-là, oui, mais l’ONU en a découvert, aujourd’hui, un plus grand nombre que le total cumulé des siècles passés.
« Ce sont essentiellement des esclaves : des êtres humains qui ont été réduits à être des biens à valeur fixe, sur la base des évaluations du type de revenu qu’ils peuvent rapporter à leurs propriétaires en tant qu’objets d’extorsion, en tant que travail non rémunéré ou – comme c’est souvent le cas des femmes – prostituées. Selon l’Organisation internationale du travail (OIT) des Nations Unies, il y a aujourd’hui plus de trois fois plus de personnes en servitude forcée que celles qui ont été capturées et vendues pendant les 350 ans de la traite transatlantique des esclaves. Ce que l’OIT appelle ‘le nouvel esclavage’ compte 25 millions de personnes en servitude pour dettes et 15 millions en mariages forcés. En tant qu’industrie illicite, c’est l’un des réseaux criminels les plus lucratifs au monde, rapportant 150 milliards de dollars par an, juste derrière le trafic de drogue et le trafic d’armes (Time). »
Qu’y a-t-il dans le programme de Mélenchon et consorts pour libérer ces esclaves contemporains vivants ? RIEN. S’agenouiller devant les caméras, cela prend 8’46’’, alors que lancer des offensives contre les trafiquants est un travail de longue haleine, qui doit, de surcroît, être mené dans le secret et le silence, condition sine qua non de sa réussite… et raison incontournable du dédain des agenouillés idolâtres du délinquant Adama Traoré.
L’objectif de ces politiques est leur réélection, pas la libération des esclaves
Le Royaume-Uni cumule un passé colonial (si vaste que le soleil ne s’y couchait jamais) avec une tradition statuaire qui, particulièrement au XIXe siècle, a couvert le paysage britannique de représentations d’hommes célèbres, dont le rejet de l’esclavage n’avait jamais été le premier critère de sélection.
Avec la mode Black Lives Matter venue de l’ancienne colonie américaine, les autorités locales ont senti passer le vent de la révolte et tentent de le détourner vers ces vestiges artistiques : elles sont en train de trier frénétiquement les sculptures qui doivent être déboulonnées et celles qui pourront rester debout.
Le maire de Londres, Sadiq Khan, a globalisé son action purificatrice en lançant une commission chargée de statuer sur la conformité politique (et représentative des minorités) des monuments, non seulement les statues, mais aussi les fresques murales, le street art et les noms de rues.
La phrase ci-dessus n’est pas empruntée au Meilleur des Mondes, mais au communiqué du maire : la Commission pour la diversité dans le domaine public a pour but d’améliorer « la diversité dans le domaine public, afin de s’assurer que les monuments de la capitale reflètent convenablement les réalisations et la diversité de Londres (FR24) ».
Dans le sud de l’Angleterre, c’est le créateur du mouvement scout, Robert Baden-Powell, qui s’est retrouvé sur une « liste cible d’attaques », d’après la police. Apparemment, Baden-Powell est jugé, a posteriori, homophobe et raciste (CNN).
Il est loin d’être le seul, ayant vécu à une époque antérieure et jugé selon les critères d’aujourd’hui.
Il y a d’autres relativités que celle d’Einstein
Quand un enfant de dix ans se moque d’un plus petit qui ne connaît pas les noms des rois égyptiens, il se fait à son tour ridiculiser par un plus âgé, au motif qu’il est incapable d’extraire une racine carrée.
Le rôle des parents est d’expliquer, à l’un comme à l’autre, que le temps est une donnée essentielle, à l’aune de laquelle se déroule l’évolution de l’enfant vers l’âge adulte, qui conditionne celle de ses compétences et de ses opinions.
Quel chaînon manquant dans l’évolution humaine a empêché les adultes contemporains de faire la différence entre les siècles, en termes de connaissances et de valeurs, qui les conduit aujourd’hui à vouloir que Don Quichotte se batte contre des éoliennes et non des moulins à vent et qu’il chevauche une voiture hybride plutôt que son Rossinante, au nom mûrement choisi (qui aurait dû se traduire en français par « Canassonissime 1er »)
Le moindre effort est encore de trop
Les génuflecteurs qui se prosternent avec une avidité délectable devant des contemporains au nom de maux endurés, il y a des siècles, par d’autres, répondraient à nos remarques en disant qu’il vaut mieux réparer tard que jamais. C’est vrai.
Mais il existe des victimes encore vivantes, qui subissent les souffrances pour lesquelles ces militants du vide compassionnent à tort et à travers. Leurs efforts seraient plus efficaces, s’ils étaient dirigés vers les plus de 9,2 millions de Noirs africains qui sont AUJOURD’HUI esclaves (le chiffre de Global Slavery Index date de 2016).
Oups, le mot intrus n’était pas « esclaves » ou « aujourd’hui » : c’était « effort ».
En effet, les contempteurs des Blancs n’ont pas la moindre velléité de se plonger dans des dossiers ardus, afin d’appréhender les données de base de l’esclavage moderne. Quant à passer leurs vacances à aller tenter de libérer les esclaves de leurs bourreaux, même pas en rêve !
Il y aurait pourtant de quoi faire, puisqu’en Afrique, 76 personnes sur 10.000 vivent en esclavage ! Mais en plus d’être fatigant, ce serait dangereux. Demandez aux militants des droits de l’homme emprisonnés et torturés en Mauritanie ! Le dernier rapport d’Amnesty International en témoigne. Il analyse « les schémas de répression utilisés contre les défenseurs des droits humains, en particulier ceux qui dénoncent et combattent l’esclavage et la discrimination, depuis les dernières élections présidentielles de 2014. Il y a eu un nombre croissant d’arrestations arbitraires, de torture, etc., ainsi que des mauvais traitements et la persécution des défenseurs des droits de l’homme, sans oublier la prolifération de législations répressives qui sapent davantage le travail en faveur des droits de l’homme (Amnesty). »
Ils veulent AVOIR (bonne conscience), pas ÊTRE (utiles)…
… A fortiori s’ils doivent payer de leur personne dans des pays étrangers, sans sèche-cheveux et sans formule « all inclusive ».
À vrai dire, si leur objectif était autre qu’une vertueuse indignation ostentatoire, ils pourraient presque rester à domicile et agir de façon significative, en Europe même : l’Organisation Internationale des Migrations, qui dépend de l’ONU, a écrit dans son rapport sur l’arrivée des migrants sexuellement exploités, particulièrement en provenance du Nigéria, que « Au moins 20.000 Nigérianes, souvent mineures, sont arrivées en Sicile entre 2016 et 2018. Cette traite des femmes était organisée par des Nigérians déjà installés en Italie. Au cours des trois dernières années, une hausse de près de 600 % du nombre de victimes de la traite sexuelle arrivant par la mer a été enregistrée. Elle s’est poursuivie au premier semestre 2017. 80 % des Nigérianes, souvent mineures, sont victimes des réseaux de prostitution. Leur nombre a considérablement augmenté : elles étaient 1.454 en 2014 et 11.009 deux ans plus tard (UN Migration). »
L’extase de la bien-pensance mieux cotée que les Bonnes Actions
Si les critères du présent semblent indépassables aux militants de la repentance, chaque époque a quand même usé de techniques différentes. Celle du XXIe siècle, la génuflexion, laisse moins de séquelles douloureuses que la flagellation des moines du Moyen Âge
Ce qui constitue le summum du militantisme contemporain revient, pour des gens qui n’ont jamais possédé d’esclaves, à s’agenouiller devant d’autres qui ne l’ont jamais été.
Dis-moi quels exploits tu as accomplis et je te dirai combien je t’admire… LM♦
Liliane Messika, MABATIM.INFO