Par Liliane Messika
C’est le monde à l’envers !
Le prince héritier d’Arabie Saoudite, Mohammed ben Salmane, fait régulièrement la Une des journaux pour ses positions progressistes. Attention : « progressistes » dans le sens étymologique de « qui avance et fait des progrès », pas dans celui, novlanguien, de « qui s’aligne avec l’islamisme quoi qu’il fasse et quoi qu’il dise en prétendant que c’est un progrès. »
S’il a démarré en première, en autorisant les femmes saoudiennes à passer le permis et à conduire sans la présence d’un « tuteur » mâle, le prince MBS (comme on l’appelle familièrement dans les médias occidentaux) a passé la vitesse supérieure.
Un leader musulman insoumis
Rompant avec la langue de béton armé qui faisait jusqu’alors office de discours sur le conflit du Moyen-Orient parmi les nations arabes, il a déclaré : « Je crois que chaque peuple, où que ce soit, a le droit de vivre dans sa nation pacifique. Je crois que les Palestiniens et les Israéliens ont le droit d’avoir leur propre terre ».
Cela se passait au début du mois d’avril 2018, peu avant le lancement de la « Grande marche du retour des Palestiniens exilés ». Peu avant, ou bien « incitant le Hamas à la lancer » ?
Il n’est en effet pas complètement idiot d’imaginer cette initiative comme la réponse du berger à la bergère : Tu fais les yeux doux aux Israéliens pour qu’ils t’aident à te débarrasser de la menace iranienne ? Eh bien, nous, on soutient notre financier iranien en occupant les Israéliens (qui ne nous occupent plus) pour lui laisser plus d’espace afin de mieux préparer sa solution finale version 1.2 contre eux.
Peu importe qui est la poule et qui est l’œuf…
… le résultat sera une omelette, mais cette fois, pas pour les Juifs. En effet, Mohammed ben Salmane a encore poussé le bouchon d’un cran le 30 avril, en déclarant à une chaîne américaine que les Palestiniens n’avaient plus qu’un choix : « revenir à la table des négociations ou se taire ».
Que ce soit un Saoudien qui remette les pendules à l’heure doit indigner plus d’un Helvète, surtout parmi ceux qui sont domiciliés Palais des Nations, à Genève (code postal 1211), au siège européen de l’ONU.
En effet, une fois n’est pas coutume, concernant les « réfugiés » palestiniens, au lieu d’une affirmation péremptoire sur leurs droits inaliénables, il s’agit d’une opinion documentée et argumentée : « Au cours des dernières décennies, le leadership palestinien a manqué une opportunité après l’autre et a rejeté toutes les propositions de paix qui lui ont été offertes. »
Hiérarchiser les conflits par nombre de victimes…
… est aussi une mesure de bon sens dont la logique n’avait jamais touché les dirigeants du monde libre, pour qui le conflit israélo-palestinien est, depuis 1973 et la crise du pétrole, la chose au monde la mieux partagée.
Pourtant le gâteau à distribuer est l’un des plus petits parmi ceux parfumés aux conflits armés dans le monde du XXIe siècle : « Selon le ministère de la Santé dans la bande de Gaza, 16 Palestiniens ont été tués et plus de 1 400 blessés dans les affrontements avec l’armée israélienne », explique l’Huma. Oui, elle existe toujours, sponsorisée à 99% par l’État français et elle est peu susceptible de minimiser les pertes de ceux qu’elle chouchoute en tant que prolétariat-post chute du Mur (pas celui de l’apartheid, celui de Berlin qui protégeait les gentils communistes des méchants capitalistes). Face aux 500 morts civils en une semaine dans la Ghouta (Syrie), cela relativise la défense de sa frontière contre les attaques gazaouies par Israël !
C’est ce que le prince Salmane a dû penser, car il a dit, tout net : « la question palestinienne n’est pas une des principales priorités de l’agenda gouvernemental saoudien ».
Ou alors, c’est qu’il sait des choses dont nos médias ne croient pas utile de nous informer ?
Que sait Ben Salmane du rapport du State Department américain ?
Ce rapport, qu’un groupe de députés du Congrès a récemment demandé au Département d’État de publier, …
…conclurait que sur les 5,4 millions de réfugiés revendiqués par l’UNRWA, l’agence de l’ONU dédiée exclusivement aux réfugiés palestiniens, seuls 30 000 pourraient se prévaloir du titre de réfugiés s’ils relevaient du HCR, le Haut-Commissariat aux Réfugiés.
Pourquoi l’équivalent américain de notre Ministère des Affaires Étrangères s’y refuse-t-il ? Ses dirigeants arguent de raisons de sécurité nationale, mais les autres estiment qu’il s’agit plutôt de cacher aux contribuables qu’ils ont financé, pendant des années, des gens qui n’avaient ni droit à l’appellation de réfugiés, ni intérêt à être ainsi infantilisés et utilisés comme pions par la Ligue Arabe.
Cette polémique fournit un éclairage encore plus cru sur la déclaration du nouveau dirigeant saoudien… et les leaders palestiniens feraient bien d’y croire, eux aussi. LM♦
1er mai 2018
Parfait.
On peut aussi souligner que le nombre de morts parmi la chair à canon des hamasnikim est infime eu égard à la puissance de feu des snipers de Tsahal, ce qui devrait inciter les médias conformes à nuancer leur appréciation sur la « disproportion ».
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Décapant, comme toujours.
Merci LM.
JJ Hadjadj
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