Israël : Le putsch déjoué

[Tel Aviv 29 mars 2023]

Fort du soutien de l’ensemble de son gouvernement et de l’appui des 100 000 manifestants (selon la police) qui pour dénoncer la tentative de coup d’État des élites israéliennes, se sont donné rendez-vous à Jérusalem le lundi 27 mars, et ce sans le relais des médias, seulement quelques heures après l’appel qui venait de leur être lancé (mais pourquoi si tardivement ?), le Premier Ministre Netanyahou a proposé de « suspendre provisoirement, les deuxième et troisième lectures de la loi afin de parvenir à un large consensus » (LPH Info).

Ce faisant, Netanyahou interrompt le processus du coup d’État qui devait mener à la destitution du Premier ministre et à la chute du gouvernement, et va déranger le plan des initiateurs de ce mouvement de révolte, énoncé par un de ses leaders, Shikma Bressler (Times of Israel) :

« Ce que nous espérons, ce qui devrait arriver, c’est que s’ils adoptent ces lois, la Cour suprême les rejettera d’une manière ou d’une autre. Elle a la capacité de le faire. D’ailleurs, notre ministre de la Justice a déjà déclaré qu’il ne suivrait pas la décision de la Cour suprême si elle les rejetait. Cela signifie qu’il dit qu’il enfreindra effectivement la loi… Ils s’opposent à la loi, ils deviennent des criminels. Ce qui devrait en fait se passer, c’est que tous les organes de sécurité – la police, l’armée et les services secrets – devraient respecter la loi. Ils sont dans l’obligation de respecter la loi… alors nous devrions gagner de cette manière. ».

Suivez donc son regard. « La loi » incarnée par la Cour Suprême et non par la Knesset (sic), fera des membres du gouvernement des criminels, que les forces armées devront arrêter. Et le tour est joué ! L’égérie de la « démocratie » se rend-elle compte seulement qu’elle est en train d’énoncer la planification d’un putsch, qui s’il réussissait, ferait d’Israël une dictature militaire ?

Sans parler de la guerre civile qui serait sanglante, qui ferait disparaître tout simplement Israël entourée d’ennemis, et que cette excitée envisage avec le calme des monstres : « Nous sommes donc déjà dans une sorte de guerre civile. »

Face à de tels propos si gravissimes d’un leader, face aux violences quotidiennes hors-la-loi de son mouvement contre l’ordre public, contre les policiers eux-mêmes, contre des députés molestés voire matraqués, et allant même jusqu’à l’effraction du domicile du Premier Ministre (!),

comment interpréter l’étrange silence de la Cour dite suprême qui prétend incarner la Loi, sinon comme de la complicité ?

La soi-disant « conseillère » du gouvernement qui voulait interdire à Netanyahou de s’exprimer sur la réforme sous le fallacieux prétexte du « conflit d’intérêt », est-elle obtuse au point de ne pas remarquer que si l’on devait parler de « conflit d’intérêt » c’est bien à l’encontre d’une Cour suprême qui, ayant peur de perdre le pouvoir totalitaire qui est le sien depuis plus de 30 ans, ne dit mot de toutes les agressions quotidiennes contre l’ordre public, et des incitations à la guerre civile de cet autre excité, aigri par ses défaites politiques passées, le général Ehud Barak, ce qui équivaut à un consentement voire à un encouragement ?

Face à ces monstres, comment ne pas louer la sagesse des motivations du Premier Ministre :

« Je ne suis pas prêt à voir le peuple se déchirer » ?

Mais aussi comment ne pas s’inquiéter des effets de la jouissance interrompue chez ces « élites » et de leur représentant politique Lapid, manifestement en manque, décontenancé par cet Appel qui dérègle l’agenda des putschistes ?

La Réforme

En attendant qu’un jour Israël puisse adopter une Constitution, je pense qu’il aurait été bon d’ajouter préalablement une nouvelle Loi fondamentale aux douze déjà existantes dont le but serait de fixer strictement les zones d’intervention de cette Cour Suprême d’où seront exclues les zones politiques qui reviennent à la Knesset.

Cela faciliterait grandement le débat, car tout le reste (modification des composantes de la Cour suprême et mode de désignation) ne fait que découler de l’impérieuse nécessité de mettre fin à son pouvoir absolu : son totalitarisme, son activisme, son droit de veto intempestif, son droit de générer des lois, voire de décider sans appui sur la loi (« la raisonnabilité » !), sans parler de ces conseillers qui ont plus de pouvoirs que les ministres !!!

Ce qui est sûr, c’est qu’il faudra mettre fin au scandale d’une Cour qui s’auto-coopte et se mettre aux normes des pays dits « démocratiques » où les Juges sont désignés par les Élus du peuple (Mabatim.info).

Ceci dit, il faut lire le texte l’étude d’Éric Desmons : « Démocratie constitutionnelle ou Autocratie judiciaire ? » (Revue des deux Mondes Fev-Mars 2018) pour vite comprendre que même désignés par des Élus, les Juges du monde « démocratique », au moins depuis les années 70, ont commencé à se politiser, c’est-à-dire à empiéter sur le pouvoir des Parlements. « Il y a dès lors fort à parier que derrière la démocratie constitutionnelle assurant l’empire des droits de l’homme s’active une oligarchie judiciaire (ou une aristocratie ?) d’un genre particulier ».

Célébré par certains pour sa « génialité », le père de la « révolution constitutionnelle » (ainsi qualifiée par son propre auteur Aaron Barak !) n’a fait en vérité qu’un copié-collé de ce qui se tramait ailleurs.

Mais d’où viendrait la supériorité de la Cour suprême sur le Parlement ? De quelle légitimité peut-elle se prévaloir ? D’une prescience divine (« la Jugocratie » en place de la théocratie) ? D’une infaillibilité fondée sur le Savoir ? D’une incorruptibilité (cf les méfaits de l’ex-Présidente Dorit Binish –JForum /Yoav Itshak pour News1) ?

Mais si c’était le cas, et si en dernière analyse ce sont les Juges qui devaient décider, à quoi sert le Parlement, pourquoi voter, puisque voter ne serait plus qu’un moyen d’avaliser sa propre impuissance ?

Mais le régime d’un pays qui est dirigé par un petit groupe d’individus non élus et non contrôlés par le peuple ne s’appelle-t-il pas une DICTATURE ? Les dizaines de milliers de manifestants qui obéissent à des leaders qui se sont auto-cooptés1 (Comme les Juges ! Mais choisis par qui en réalité ?) ont-ils conscience de leur servitude volontaire ?

Enfin, certains disent que la Cour suprême servirait à défendre le droit des minorités, au nom donc des droits de l’homme à la liberté et à la dignité, à l’aune desquels devraient être jaugés tous les autres droits. Mais une démocratie où les minorités imposeraient leurs lois à la majorité serait-elle encore une démocratie qui signifie le pouvoir du peuple, c’est-à-dire de la majorité ?

Une société vivante et libre se caractérise par un certain nombre d’intérêts et de valeurs collectifs et divergents. À moins de faire éclater cette société en autant de groupes que de valeurs et d’intérêts, comment gérer la diversité, comment continuer à rester en société ?

Cette lame de fond venue des États-Unis qui s’est répandue sur l’Europe et a atteint Israël ne viserait-elle pas en fait à pulvériser les sociétés ainsi réduites à une somme d’individus n’ayant plus rien en commun ? Ce qui soudait les sociétés, leurs histoires, cultures, mythes fondateurs, religions (religare en latin, relier) tout « ce fatras d’archaïsmes » faudrait-il désormais s’en débarrasser ?

La « cancel culture » (c’est-à-dire l’effacement des traces de ce qui a donné naissance à des peuples divers, puis a renforcé leur cohésion et les a empêchés de disparaître) n’aurait-elle pas pour fonction de s’en prendre à ce qui faisait le ciment des sociétés afin de les atomiser et de les réduire à des agglomérats d’individus, lesquels devenus impuissants à résister n’auraient plus qu’à devenir les pions de ceux qui ont le savoir et l’argent ?

Au nom de la soi-disant protection des minorités, le nouveau rôle des Juges du monde « démocratique » ne viserait-il pas à désarmer les peuples par l’abolition de toutes les frontières, physiques, historiques, culturelles, sexuelles, de genre, afin d’être le facilitateur de la domination universelle et incontrôlée de la finance qui chaque année va plastronner à Davos sous la houlette de son créateur Klaus Schwab, auteur du livre « The Great Reset » (La grande réinitialisation) (le Courrier des Stratèges) et de ses autres acolytes, genre Soros ?

En tous cas, Israël en bon élève appliqué, a, depuis des décennies, banni de l’enseignement la plus grande partie de l’histoire juive et pareillement ses textes fondateurs que sont le Tanakh et la Kabbale, dont pourtant procèdent non seulement Israël mais aussi une bonne partie de l’humanité… !

La victoire aux dernières élections des partis qui tiennent à conserver les valeurs juives montre en tous cas que malgré le forcing de ses « élites », ÇA RÉSISTE. Et faute d’être en mesure de changer le peuple, nous assistons à une tentative de l’émasculer.

Tentative qui est largement épaulée par ce beau monde « démocratique » qui hypocritement se déclare « inquiet » (voir la PÉTITION À SIGNER), mais qui en sous-main fournit un soutien discret mais conséquent en finances (Israel247.org) et surtout en méthodes de déstabilisation. Un know-how (savoir-faire) venu des États-Unis depuis la fin du siècle dernier et qui a largement pu être expérimenté durant les dites « Révolutions de couleur » en Europe de l’Est et en Asie centrale.

Regardez ce film « Les États-Unis à la conquête de l’Est » (Film de Manon Loizeau : YouTube) qui ne manquera pas au moins de vous troubler en raison de quelques… similitudes, à commencer par ce fameux slogan de « Démocratie » et du symbole du poing levé de couleur noire, les méthodes de communication, la montée en puissance du mouvement de révolte, etc. Vous y verrez des agents américains qui opérèrent en Europe de l’Est et en Asie centrale durant les dites « révolutions de couleurs » au début des années 2000 (Institut Frantz Fanon), vous expliquer tranquillement que désormais la CIA n’agit plus directement mais par l’intermédiaire « d’ONG » telles Freedom House, National Endowment for Democracy, et bien d’autres, notamment Soros avec son « Open Society »…

À la minute 28’36 vous pourrez même voir la version hébraïque du manuel « From Dictatorship to Democracy » (« De la Dictature à la démocratie ») traduit dans une trentaine de langues et dont l’auteur Gene Sharp est aussi soutenu par le National Endowment for Democracy)… Il s’agit là d’une sorte de vade mecum de la déstabilisation des gouvernements, pour laquelle sont formés sur place ou aux États-Unis des milliers de « militants ».

En Israël, il semblerait que l’interface entre les États-Unis et les manifestants soit « l’ONG » dite Mouvement pour la qualité du Gouvernement (Movement for Quality Government).

Et s’il est vrai que les États-Unis ont appris à être plus discrets qu’en Ukraine lorsque Victoria Nuland dirigea le coup d’État, de concert avec l’ambassadeur américain à Kiev (allant même jusqu’à distribuer des petits pains aux manifestants (YouTube) !), il n’en demeure pas moins que l’ingérence américaine, via l’ambassadeur américain en Israël Tom Nides, vient d’atteindre son climax, avec l’injonction, oui vous avez bien lu l’INJONCTION du Président Joe Biden himself d’abandonner les réformes (LPH Info) !!! Ben, voyons !

Les États-Unis ont une expertise certaine en matière de renversement de régimes qui refusent d’être à sa solde. La « démocratie » n’est plus que la feuille de vigne pour élargir toujours plus ses zones d’influence, et la preuve en est qu’aux régimes autoritaires d’Europe de l’Est et d’Asie centrale ont succédé des régimes de marionnettes arrivistes et corrompues, que Joe Biden lui-même, alors Vice-président, avait contribué à mettre en place, allant même jusqu’à se vanter en conférence de presse d’avoir neutralisé le Procureur Général d’Ukraine qui faisait une enquête sur la corruption où était mêlé son fils, Hunter Biden (les Crises).

Comment ne pas saluer la réponse pleine de dignité de Netanyahou :

« Israël est un pays souverain qui prend ses décisions par la volonté de son peuple et non sur la base des pressions de l’étranger, y compris de ses meilleurs amis. » ?

En comparaison comment de pas se sentir humilié par la réaction typiquement dhimmie d’un Gantz :

« Une atteinte aux relations avec les États-Unis, notre meilleur ami et notre allié le plus important dans le monde, est un attentat stratégique. » ?

Et maintenant ?

J’espère que face à la « gôche » embourgeoisée et aveuglément proaméricaine, la droite populaire ne se laissera pas faire en tenant compte de l’expérience de ces trois derniers mois. Même s’il est vrai que les médias mainstream la boycottent, elle doit trouver tous les moyens de communiquer ce qui va se jouer durant les négociations chez le Président Herzog.

Elle doit aussi faire la démonstration de sa force, une force tranquille et non violente, et de sa volonté de ne pas se laisser intimider, ni par le quarteron de généraux locaux ni par les États-Unis, ni encore moins par l’Europe, qui en ce moment même fait montre de la plus grande violence contre ses propres manifestants, sans que cela ne gêne Biden.

Non au Coup d’État à l’israélienne !
Non le Deep State israélo-américain ne doit pas vaincre !
Non à un Israël vassalisé !
Oui à un Israël fier de son histoire et de sa culture !

Jean-Pierre Lledo, MABATIM.INFO
Cinéaste


1 Dans l’interview que lui a généreusement accordé le journal en ligne anti-Netanyahou « Times of Israel », la déjà citée Shikma Bressler avoue que la centaine de groupes de son mouvement est coordonné par un « conseil d’administration entre 6 et 8 personnes » sans donner leurs noms, ni dire comment ils se sont retrouvés là……

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7 commentaires

  1. C’est bientot Pessah, la fete de la Liberte.
    Calmez vous et cherchez a reunir ce superbe Peuple plutot que d’accuser toute une partie de ce Peuple

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  2. Je suis entièrement d’accord avec les thèses énoncées par l’article de Monsieur Lledo… Toutefois, je crois que la droite devrait durcir son mental et être prête à répondre avec fermeté – fermeté est un euphémisme – aux mensonges et manipulations de la gauche qui devient de plus en plus marxisante, bolchévique et qui assume sans vergogne ses démonstrations de force. On sent bien qu’elle est nourrie par la probité et la bienfaisance de la droite. Elle se rit de nos contorsions politiques, nous sommes dans une certaine mesure ce que les Français nomment « la droite molle ». Ma comparaison est sans doute excessive parce que Netanyahou doit gouverner avec intelligence et doigté, mais nous les commentateurs pouvons leur jeter à la face leurs ignominies et leur insuffisance, sans avoir peur d’user de dureté.

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  3. Gantz déclare:
    « Une atteinte aux relations avec les États-Unis, notre meilleur ami et notre allié le plus important dans le monde, est un attentat stratégique. » ?
    Ce qui rend cette déclaration absurde, c’est que Gantz prend le parti de négliger une réalité centrale.
    Car il y a deux Amériques (USA…) qui sont en conflit, le pays étant radicalement divisé entre:
    1/ l’Amérique d’ultragauche, Wokiste, anti-chrétienne et pro-islam, avec fraude électorale massive, avec un président Biden sénile et usurpateur, avec son état profond, judiciaire, médiatique, universitaire, etc… mis en place par Hussein Obama pendant ses deux mandats successifs..
    Cette Amérique n’est pas une alliée d’Israël puisqu’elle tente de lui imposer, menace stratégique majeure, comme à un état vassal, la prétendue « Solution à Deux Etats » qui établirait un état « Judenrein » en Judée, Samarie et Jérusalem, état vite contrôlé par le Hamas, le Djihad Islamique et autres agents terroristes de l’Iran, pour une fin subrepticement programmée d’Israël dans un déluge d’attaques meurtrières.
    Obama déteste Netanyahu qui a exprimé courageusement son refus catégorique de la « Solution à Deux Etats » suicidaire, ce qui n’a pas empêché une collaboration active entre Israël et les USA, dans le domaine du renseignement, de la technologie de pointe, etc…
    et
    2/ l’Amérique judéo-chrétienne, qui a élu le patriote Donald Trump en 2016, et semble pouvoir le réélire en 2024, si la fraude électorale ne s’en mêle pas trop.
    Donald Trump est, lui, un allié sincère d’Israël, son « meilleur ami », qui a déplacé son ambassade à Jérusalem, a entrepris de construire les accords d’Abraham pour la normalisation des relations entre les pays arabes et Israël, et qui s’abstient d’imposer à Israël, pays souverain, une solution suicidaire aux revendications infinies et injustifiées des prétendus « palestiniens ».
    Gantz qualifie absurdement l’administration Biden de « ….meilleur ami et notre allié le plus important dans le monde… » alors qu’ elle intervient abusivement et finance une tentative de coup d’état qui fragilise dangereusement Israël, poussé à la guerre civile.

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  4. Merci pour cette mise au pont claire et salutaire. Nous voyons la pieuvre étendre ses tentacules un peu partout, et il est urgent de comprendre et de dénoncer la politique américaine de Biden qui traite Israël et notamment Netanyahou, son premier Ministre démocratiquement élu par le peuple, comme un laquais.

    Aimé par 1 personne

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