En finir avec le Hezbollah avant l’Iran

[2 mai 2023]

Source Makor Richon, Haïm Goloventzits spécialiste du Moyen-Orient, conférencier à l’université de Tel-Aviv

Le Hezbollah d’abord : ce que nous n’avons pas terminé au Liban doit être fait avant l’Iran

Bien que les responsables israéliens, lors de la deuxième guerre du Liban en juillet 2006, aient lancé une campagne présentant la résolution 1701 de l’ONU1, comme un grand succès politique, le Hezbollah est devenu un acteur qui menace de contrecarrer toute idée d’attaque contre l’Iran.

Ces dernières années, Israël mène des actions sur deux axes principaux :

– La première : empêcher le Hezbollah de s’implanter en Syrie et de maintenir une dissuasion vis-à-vis du Hezbollah au Liban. Il faut admettre que cette dissuasion est en train de s’éroder.

– La seconde : le combat contre le programme nucléaire iranien qui c’est accéléré depuis l’échec de l’accord nucléaire, signé en 2015 entre l’Iran et 5 pays européens, États-Unis plus Russie. L’Iran, qui a torpillé cet accord, a multiplié ces succès diplomatiques avec les pays arabes sunnites (et notamment avec l’Arabie Saoudite), enfonçant un coin entre Israël et les États sunnites modérés, signataires des accords Abraham. La situation actuelle face au Liban et du Hezbollah est le produit de l’échec de la résolution 1701 d’août 2006, qui a mis fin à la deuxième guerre du Liban. À l’époque « l’idée fixe » des dirigeants israéliens était « le calme à tout prix », en conséquence de quoi l’armée israélienne s’est retirée sans défaire le Hezbollah. Cette défaite aurait permis à Israël une plus grande liberté d’action vis-à-vis de l’Iran aujourd’hui.

Israël paie le prix de la résolution 1701, qui a été concoctée à l’époque par Olmert (Premier ministre), Livni (ministre des Affaires étrangères) et Halutz (chef d’état major). Une attaque israélienne contre l’Iran, (sans entrer dans la question de l’opportunité politique ou militaire d’une telle action), sans que le Hezbollah n’ait été neutralisé auparavent, aurait pour résultat une attaque massive sur Israël, qui comprendra des tirs de très haute intensité de missiles sur les infrastructures civiles et militaires, des tentatives de conquête des villes et villages du nord d’Israël, avec son sinistre lot d’enlèvements, prises d’otages et crimes de guerre. L’éventualité d’une telle attaque a octroyé au Hezbollah un certain pouvoir de dissuasion, qu’Israël ne peut pas ignorer.

Le programme nucléaire iranien, bien qu’apparemment uniquement pour les besoins civils, remonte à 1957. Malgré la signature du Traité de Non Prolifération par ce dernier en 1970, il a investi des efforts considérables dans le développement de son programme nucléaire jusqu’à la révolution islamique de 1979. Il a été stoppé par les ayatollahs en raison de la conception islamique de l’atome comme illégitime. Toutefois, lors de la guerre Iran-Irak, l’Irak a utilisé massivement des armes chimiques. l’Iran est alors revenu sur sa décision d’arrêt du programme nucléaire et a mis en œuvre une infrastructure nucléaire à des fins militaires. Depuis lors, il mène une politique du « chaud et du froid » envers la communauté internationale, qui, face à sa duplicité, a instauré des sanctions internationales et des mesures préventives depuis des années, sans grande efficacité. Aujourd’hui, l’Iran est proche du niveau d’enrichissement d’uranium à 90 %, ce qui laisse à Israël très peu de temps pour traiter le problème.

La dissuasion du Hezbollah vis-à-vis d’Israël s’inscrit dans la réalité du Liban. Le pays est en plein chaos économico-politique et au bord de la faillite. Il est vrai que lors des élections législatives du 22 mai, le Hezbollah a enregistré une baisse des voix, en raison de sa responsabilité dans la détérioration de la situation au Liban. Toutefois, il bénéficie du désastreux (pour Israël) accord concernant le tracé de la frontière maritime entre le Liban et Israël, car le public libanais considère qu’Israël s’est plié sous la pression militaire du Hezbollah (menace supposée ou réelle, d’attaques des drones sur le champ gazier israélien Karich). De plus, le surprenant accord irano-saoudien récemment signé, ne fait que renforcer la rhétorique guerrière de l’organisation terroriste.

La situation actuelle est, entre autres, la conséquence de l’accord honteux de la résolution de l’ONU 1701. La violation perpétuelle, par le Hezbollah, de cette résolution a permis à la milice chiite de construire de redoutables capacités balistiques, qui représentent une menace existentielle sans précèdent dans l’histoire d’Israël. Le Hezbollah a mis sur pied une armée bien entraînée et expérimentée et qui, au vu et au su du monde entier s’est massée sur la frontière nord d’Israël. L’incapacité d’Israël à régler le problème du Hezbollah en 2006, alors qu’il était encore possible de le faire à un « prix raisonnable », a posé à Israël un dilemme quant à la manière de répondre aux provocations de la mouvance terroriste. Encore au mois d’avril dernier, lors du ramadan, plusieurs dizaines de roquettes ont été tirés par le Hezbollah sur le nord d’Israël. Cela témoigne malheureusement que le Hezbollah a atteint un équilibre de dissuasion face à Israël. Par conséquent, si Israël décide d’attaquer les installations nucléaires de l’Iran, il devra au préalable lancer une attaque préventive contre le Hezbollah, qui, si elle réussit, détruira les capacités de l’organisation pour de nombreuses années. La destruction de ces capacités privera les Iraniens de leur carte maîtresse offensive au Moyen-Orient. Détruit préventivement, le Hezbollah sera incapable d’initier une guerre contre Israël, car s’il avait l’initiative d’attaque, cela aurait créé un scénario catastrophique pour Israël.

Israël devra se soucier de la légitimité internationale relative, en espérant qu’elle lui sera acquise s’il lance une attaque contre une organisation terroriste telle que le Hezbollah. Espérons qu’Israël aura un leadership suffisamment fort et consensuel, pour prendre les bonnes décisions au bon moment, et surtout qui saura tirer les leçons des erreurs passées, pour donner à son armée, une efficacité écrasante face à ses ennemis. EG

Édouard Gris, MABATIM.INFO
Traduction et adaptation


1 Résolution du Conseil de sécurité de l’ONU, instaurant un cessez-le-feu durable entre le Hezbollah et Israël et obligeant l’État libanais et la FINUL à interdire au Hezbollah de s’approcher de la frontière israélienne. Cette résolution n’a jamais été respectée par le Hezbollah.

Publicité

Laisser un commentaire. Il sera visible dès sa validation.

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s